Nous voulions étudier ce que recouvrait l’étiquette « médiation » dans quatre villes présentant des caractéristiques contrastées – Gennevilliers (Hauts-de-Seine), Pantin (Seine-Saint-Denis), Limoges (Haute-Vienne) et Romans-sur-Isère (Drôme). Que représente la médiation ? Quels sont ses outils ? Quelles procédures ? Quels savoir-faire ? Nous souhaitions connaître les pratiques quotidiennes et les capacités des médiateurs à innover.
Si on ne peut pas parler d’une seule mission de médiateur, les dispositifs présentent néanmoins de nombreux points communs et s’inscrivent tous dans une volonté d’améliorer la tranquillité publique, les relations entre les services publics et la population ou entre différents groupes de la population. Le processus, c’est « aller vers, écouter, communiquer, faire circuler la parole, expliquer ». A Limoges et à Romans, le travail des médiateurs s’articule essentiellement autour de la tranquillité dans le logement social. A Gennevilliers, la priorité est donnée au public adolescent et donc aux sorties de collège, avec une insistance de plus en plus forte sur les problématiques liées aux relations filles-garçons. A Pantin, la mission porte plus généralement sur la résolution des conflits sur la voie publique. D’une façon générale, les médiateurs ont un rôle très précieux d’information de la municipalité sur les problèmes rencontrés sur le terrain et l’évaluation de la « température » des quartiers. Mais ce qui est ressorti également, c’est l’importance de la diversité dans les recrutements des médiateurs.
Les équipes de médiateurs doivent présenter une mixité pour bien fonctionner. Cela ne se limite pas à l’ethnicité ou à la religion. L’âge est pris en compte, tout comme le genre, le lieu de résidence ou encore le niveau de qualification, la façon de travailler ou les hobbies pratiqués. On optera même sur des profils psychologiques variés : certains plus doués pour rassurer, d’autres sachant mieux réagir aux conflits. Cette diversité apporte une légitimation, qui a pour conséquence de faciliter le contact puisque les agents interviennent souvent dans des quartiers où habitent des personnes d’origines très variées. Connaître les codes culturels de chacune d’entre elles permet de mieux les comprendre et de mieux régler les problèmes.
C’est un raccourci selon moi !
L’appartenance au même quartier et éventuellement au même groupe ethnique qu’une personne au cœur d’un conflit peut avoir des effets contrastés: selon certains, cela facilite le dialogue, pour d’autres, cela affaiblit au contraire la crédibilité des médiateurs en tant que figures d’autorité. Les médiateurs doivent trouver le bon dosage pour être suffisamment proches des personnes afin de leur faire passer certains messages, mais sans entrer dans une démagogie qui risquerait de les discréditer aux yeux des autres habitants et institutions. Je garantis que les communes cherchent à s’éloigner du modèle des « grands frères », porteur de dérives souvent constatées par le passé sur plusieurs des terrains étudiés. Au contraire, la mixité permet d’envoyer à la population le message que la médiation n’est pas au service d’une partie spécifique de la population. La compétence de la médiation ne se juge pas à l’aune du profil individuel d’un agent, mais à la complémentarité d’une équipe. C’est pour cela que sa composition relève d’une alchimie très délicate. Mais la diversité ne résout pas tous les problèmes, il faut aussi des formations sur-mesure, une bonne organisation et de la clarté dans la définition des missions.
(1) La médiation face à l’altérité – Sous la responsabilité de Sebastian Roché, Laura Boschetti et Mathieu Zagrodzki – Juin 2014 – Disponible sur