Auditionner sans influencer

Les connaissances scientifiques concernant le témoignage des enfants ont beaucoup progressé depuis une trentaine d’années. La pratique de l’audition des mineurs en justice et de tout entretien d’évaluation ou d’expertise avec eux est donc mieux balisée que par le passé. Mais encore faut-il que les savoirs engrangés soient plus largement diffusés, en particulier auprès des intervenants appelés à rencontrer des enfants présumés victimes de mauvais traitements, ou qui auraient été témoins de violences. Dans cet ouvrage, Mireille Cyr, spécialiste québécoise des agressions sexuelles envers les enfants, s’emploie précisément à faire le point sur l’acquis des recherches concernant le processus de révélation chez les enfants, ainsi que sur leur mémoire et leur suggestibilité. S’agissant de cette dernière dimension, peu de conclusions définitives peuvent être tirées des très nombreuses études réalisées, souligne l’auteure. Si ce n’est que le style des questions de l’interlocuteur des mineurs ainsi que son attitude ont un impact déterminant sur le récit des intéressés. Aussi les protocoles d’audition présentés recommandent de recourir à des questions ouvertes afin d’interroger les enfants sans les influencer. Il en est ainsi de l’entretien par étapes progressives, qui est notamment utilisé par la police française – ou du moins par les rares enquêteurs ayant été formés à cette méthode, précise le psychiatre Gérard Lopez dans sa préface. C’est aussi le cas du protocole américain mis au point par le National Institute of Child Health and Human Development, qui est employé outre-Atlantique, mais aussi en Suisse et en Belgique.