Le Parlement a définitivement adopté, le 21 juillet – un an après sa présentation en conseil des ministres –, la loi sur l’économie sociale et solidaire (ESS), qui entend, notamment, favoriser le développement de ce secteur. L’objectif affiché par le gouvernement est en effet d’encourager un « changement d’échelle » de l’ESS et de favoriser ainsi une croissance « plus robuste, plus riche en emplois, plus durable et plus juste socialement ». « Quelle est l’économie qui a du sens, qui crée des emplois non délocalisables ? C’est l’économie sociale et solidaire », s’est félicitée la secrétaire d’Etat chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’ESS, Carole Delga.
La loi est entrée en vigueur le 2 août, sous réserve des dispositions nécessitant des textes réglementaires d’application. Présentation des principales mesures intéressant le secteur social et médico-social.
La loi définit l’ESS comme un modèle entrepreneurial adapté à tous les secteurs d’activité humaine qui concilient des exigences de solidarité, des objectifs de long terme et des performances économiques. Relèvent ainsi du champ de l’ESS les organismes qui appartiennent statutairement à l’économie sociale traditionnelle, tels que les associations, les coopératives, les mutuelles et les fondations ayant une activité économique. Entrent également dans ce domaine certaines sociétés commerciales respectant plusieurs exigences découlant des principes fondateurs de ce secteur. Elles doivent notamment justifier d’une gouvernance démocratique, d’une gestion à but lucratif limité ou encadré, et surtout de la poursuite d’un objectif d’utilité sociale.
A cet égard, la loi précise ce qu’il faut entendre par utilité sociale. Ainsi, une entreprise doit remplir au moins une des trois conditions suivantes :
→ apporter un soutien aux personnes en situation de fragilité liée à leur situation économique ou sociale, à leur état de santé ou à leurs besoins en matière d’accompagnement social ou médico-social ;
→ contribuer à la lutte contre les exclusions sanitaires, sociales, économiques et culturelles, à l’éducation à la citoyenneté, notamment par l’« éducation populaire », au développement du lien social et au renforcement de la cohésion territoriale ;
→ participer au développement durable.
Cette définition doit permettre aux entreprises et associations agréées de voir leur accès aux financements facilité, par le biais notamment de la Banque publique d’investissement (Bpifrance) qui, pour mémoire, réserve au secteur quelque 500 millions d’euros de crédits(1).
L’agrément « entreprise solidaire d’utilité sociale » remplace celui d’« entreprise solidaire ». Jusqu’à présent, une entreprise qui souhaitait se voir délivrer cet agrément, nécessaire pour accéder aux fonds d’épargne salariale solidaire, devait se conformer à des principes de responsabilité sociale ou environnementale. Désormais, il ne pourra être accordé que si l’entreprise respecte les exigences relevant du mode d’entreprendre propre à l’ESS (gouvernance démocratique, lucrativité limitée), ainsi que les contraintes portant sur son capital et sur la rémunération de ses dirigeants. En outre, les critères d’attribution de l’agrément sont centrés sur la poursuite d’une mission d’utilité sociale qui contraint durablement la rentabilité de l’entreprise.
De plus, la loi précise que cet agrément « entreprise solidaire d’utilité sociale » est accordé de plein droit, notamment, aux structures de l’insertion par l’activité économique, aux services de l’aide sociale à l’enfance et aux établissements et services accompagnant et accueillant des enfants et des adultes handicapés.
Afin de promouvoir le secteur de l’ESS, le texte crée, au niveau national, une chambre française de l’ESS. Elle devra assurer la représentation auprès des pouvoirs publics nationaux des intérêts du secteur et ce, sans porter préjudice aux missions de représentation des organisations professionnelles ou interprofessionnelles de l’ESS. Au plan local, la promotion de l’ESS sera assurée par des chambres régionales de l’économie sociale et solidaire.
En outre, le conseil supérieur de l’ESS, à qui la loi donne une assise législative tout en étendant ses compétences, doit adopter un guide définissant les conditions d’amélioration continue des bonnes pratiques des entreprises du secteur, telles que les modalités effectives de gouvernance démocratique. Un rapport d’évaluation de ce dispositif sera publié tous les trois ans.
Par ailleurs, dans un objectif de création d’emplois, la loi donne un cadre juridique aux pôles territoriaux de coopération économique (PTCE) afin de favoriser leur multiplication. Il s’agit de regroupements, sur des territoires donnés, d’entreprises classiques et de structures de l’économie sociale et solidaire associés à des petites et moyennes entreprises socialement responsables, des collectivités locales, des centres de recherche et des organismes de formation, qui concourent à la mise en œuvre d’une stratégie commune et continue de coopération et de mutualisation au service de projets économiques innovants de développement local durable. Un décret fixera la procédure et les critères de sélection des projets, précise le texte.
La loi donne également une base légale au Haut Conseil à la vie associative qui est saisi des projets de loi et de décret comportant des dispositions spécifiques relatives au financement, au fonctionnement ou à l’organisation de l’ensemble des associations, et doit établir tous les deux ans un bilan de la vie associative. Cette instance, placée auprès du Premier ministre, pourra être saisie par au moins 100 associations couvrant au moins trois régions et ayant un objet statutaire comparable à l’ensemble des associations, indique la loi. Ce Haut Conseil peut également se saisir de « toute question relative aux associations », quel que soit leur secteur d’activité. Un décret doit venir fixer les modalités de fonctionnement de ce Haut Conseil « nouvelle formule ».
De plus, le texte transforme le volontariat de service civique, réservé aux plus de 25 ans – différent du service civique destiné aux 16-25 ans –, en volontariat associatif. Ces contrats de volontariat peuvent être proposés par les associations et fondations reconnues d’utilité publique agréées, et sont souscrits pour une durée de 6 à 24 mois.
Par ailleurs, la loi autorise le gouvernement à prendre par ordonnance toutes mesures relevant de la loi, afin de simplifier les démarches des associations auprès des administrations, notamment en adaptant les modalités d’enregistrement, d’agrément et de reconnaissance d’utilité publique et les conditions d’obtention de financements.