A l’issue d’un parcours législatif agité, les parlementaires ont, le 23 juillet dernier, définitivement adopté la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014. Avec ce texte, le gouvernement entend réduire le déficit du régime général de la sécurité sociale à 9,6 milliards d’euros et traduire certaines mesures du pacte de responsabilité et de solidarité visant à l’amélioration du pouvoir d’achat des salariés(1). Mais le Conseil constitutionnel a contrecarré une partie de ses ambitions puisque, dans une décision du 6 août, il a censuré la mesure d’allégement de cotisations salariales pour les bas salaires. Tour d’horizon des principales dispositions de la loi.
Les pensions de vieillesse versées par les régimes de retraite de base, y compris leurs majorations, accessoires et suppléments, ne seront pas augmentées cette année. Toutefois, précise la loi, cette mesure ne concerne pas les assurés dont le montant total des pensions de vieillesse de droit direct et dérivé versées par des régimes légaux ou rendus légalement obligatoires, y compris leurs majorations, accessoires et suppléments, est inférieur ou égal à 1 200 € par mois(2). Pour ces assurés, le montant de ces prestations sera revalorisé sur la base d’un coefficient fixé selon les modalités de droit commun. Pour ceux dont le montant total des pensions est compris entre 1?200 € et 1 205 €, le coefficient annuel de revalorisation sera réduit de moitié.
En revanche, conformément à la feuille de route 2014 du gouvernement « Ayrault » pour lutter contre la pauvreté(3), les montants et les plafonds de l’allocation de solidarité aux personnes âgées, de l’allocation supplémentaire d’invalidité et des composantes de l’ex-minimum vieillesse bénéficieront, eux, d’un coup de pouce au 1er octobre prochain, après une hausse de 0,6 % en avril dernier(4).
Rappelons aussi que le gouvernement proposera au Parlement de voter, pour 2015, une mesure de gel des montants des pensions d’invalidité, des rentes accidents du travail et maladies professionnelles et des prestations familiales dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.
Enfin, les parlementaires n’ont pas adopté la disposition qui prévoyait, à titre exceptionnel, de ne pas revaloriser les paramètres de calcul de l’allocation de logement familiale au 1er octobre prochain. Ceux-ci seront donc bien augmentés à cette date tout comme ceux qui permettent le calcul de l’allocation de logement sociale et de l’aide personnalisée au logement (voir ce numéro, page 38).
Conformément au pacte de responsabilité et de solidarité qui prévoit de réduire de 30 milliards d’euros le coût du travail d’ici à 2016, la loi de financement rectificative prévoit que, au niveau du SMIC, les cotisations patronales dues à l’Urssaf seront entièrement supprimées dès le 1er janvier 2015. L’exonération sera ensuite progressive jusqu’à 1,6 SMIC. Le barème des allégements de charges « Fillon » existant entre le SMIC et 1,6 fois le SMIC sera modifié en conséquence.
En outre, le texte intègre la baisse des cotisations familiales voulue par le président de la République. Elles seront réduites de 1,8 point en 2015 pour les salaires inférieurs à 1,6 fois le SMIC, puis de nouveau en 2016 pour les salaires jusqu’à 3,5 fois le SMIC annuel – c’est-à-dire plus de 90 % des salariés. Ainsi, précise l’étude d’impact de la loi, le taux de cotisation d’allocations familiales passera de 5,25 % à 3,45 % en 2015 et à 1,65 % en 2016.
Signalons enfin que le texte fusionne, à compter du 1er janvier 2015, la contribution et la cotisation au Fonds national d’action logement. « L’ensemble des entreprises sera ainsi assujetti à une seule cotisation, au taux de 0,1 % sur les salaires plafonnés dans les entreprises de moins de 20 salariés et de 0,5 % sur la totalité des salaires dans les autres entreprises », précise l’exposé des motifs du projet de loi initial.
Afin d’améliorer le pouvoir d’achat des salariés les plus modestes, les parlementaires ont adopté un article 1er qui devait permettre, dès le 1er janvier 2015, de réduire de manière progressive les cotisations salariales pour les salaires compris entre 1 et 1,3 fois le SMIC sur l’année. Une mesure identique a été actée en faveur des fonctionnaires. Mais le Conseil constitutionnel a invalidé ces dispositions.
La Haute Juridiction rappelle tout d’abord que ces cotisations salariales sont des versements à caractère obligatoire ouvrant des droits aux prestations et avantages servis par les branches vieillesse et maladie. Or, constate-t-elle, le législateur a institué une réduction dégressive des cotisations salariales, tout en maintenant inchangés, pour tous les salariés, l’assiette de cotisations ainsi que les prestations et avantages auxquels ces cotisations ouvrent droit. « Ainsi, un même régime de sécurité sociale continuerait […] à financer, pour l’ensemble de ses assurés, les mêmes prestations malgré l’absence de versement, par près d’un tiers de ceux-ci, de la totalité des cotisations salariales ouvrant droit aux prestations servies par ce régime ». Le Conseil constitutionnel a donc considéré que « le législateur a institué une différence de traitement, qui ne repose pas sur une différence de situation entre les assurés d’un même régime de sécurité sociale, sans rapport avec l’objet des cotisations salariales de sécurité sociale » et a ainsi méconnu le principe d’égalité.
Pour compenser l’annulation du Conseil constitutionnel, le président de la République a indiqué, dans une interview accordée au Monde du 20 août, que « deux grandes réformes ”» allaient être engagées : « l’une visera à rendre plus juste et plus simple le barème de l’impôt sur le revenu notamment pour les premières tranches, c’est-à-dire pour les contribuables modestes et moyens. L’autre fusionnera la prime pour l’emploi et le revenu de solidarité active “activité[5] pour favoriser la reprise du travail et améliorer la rémunération des salariés précaires. » Ces réformes doivent être traduites dans le projet de loi de finances pour 2015.
(2) La prestation complémentaire pour recours à tierce personne, ex-majoration pour tierce personne, ne sera pas prise en compte pour apprécier ce seuil.
(4) Sur les montants applicables depuis le 1er avril dernier, voir ASH n° 2855 du 11-04-14, p. 49.
(5) Cette réforme, déjà envisagée sous le gouvernement « Ayrault », pourra s’appuyer sur le rapport « Sirugue » de 2013 – Voir ASH n° 2819 du 19-07-13, p. 5.