Dans un rapport plutôt positif sur la performance de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) (1), la Cour des comptes constate cependant que le programme national de rénovation urbaine (PNRU) est « loin d’être achevé » et que le bouclage financier de ce plan ainsi que de son successeur pour 2014-2024, le nouveau programme national de rénovation urbaine (NPNRU), « demeure incertain ». Elle préconise dès lors, entre autres, de « s’assurer, par un examen approfondi de la couverture des quartiers prioritaires par le PNRU et le NPNRU, du traitement des sites connaissant les dysfonctionnements les plus importants ».
Prenant acte de ces remarques, la ministre de la Ville, Najat Vallaud-Belkacem, a fait savoir le 29 juillet que la première liste des quartiers difficiles devant bénéficier de l’essentiel des 5 milliards d’euros de crédits prévus pour le NPNRU serait connue le 7 octobre prochain. Ils seront issus des 1 300 nouveaux quartiers de la politique de la ville dévoilés en juin dernier (2). Le ministère a aussi indiqué qu’il allait « accélérer le rythme » des engagements financiers nécessaires pour finaliser « avant la fin de l’année 2015 » le premier PNRU. « L’intervention de l’ANRU a permis de transformer plus de 500 quartiers en mobilisant plus de 44 milliards d’euros », se félicite en outre la ministre dans son communiqué.
Avec un financement de l’Etat fixé à 12,35 milliards d’euros, ce PNRU « reste de loin le plus important programme géré par l’agence », devant les programmes d’investissement d’avenir (PIA 1 et 2), le programme national de requalification des quartiers anciens dégradés et le programme « collèges dégradés », rappelle la Cour des comptes dans son rapport, réalisé à la demande de la commission des finances du Sénat, et dans lequel elle formule 12 recommandations visant à améliorer l’efficacité de l’action de l’ANRU.
« La mission de l’agence au regard de celle d’autres opérateurs de l’Etat mériterait ainsi d’être clarifiée », note par exemple la Cour des comptes, en soulignant que l’ANRU a vu, ces dernières années, ses missions « élargies à plusieurs reprises » au-delà de son « cœur de métier » (la mise en œuvre du PNRU) ; la Haute Juridiction s’interroge d’ailleurs sur la pertinence de certains choix (internats d’excellence, projets innovants en faveur de la jeunesse…) et préconise donc de « préserver la capacité de l’ANRU à intervenir sur son cœur de métier en limitant l’attribution à l’agence de nouvelles missions qui en seraient trop éloignées ».
Evoquant aussi le « pilotage complexe » de cet opérateur de l’Etat « sous tutelle du ministre chargé de la ville tout en étant un outil au service des acteurs locaux, élus et bailleurs sociaux », la Cour des comptes invite les pouvoirs publics à « élaborer sans tarder un contrat d’objectifs et de performance entre l’Etat et l’ANRU, prenant pleinement en compte le contexte nouveau du NPNRU et du PIA 2 et ses conséquences sur le fonctionnement de l’agence ».
Sur le terrain, la Cour des comptes salue « une couverture satisfaisante des quartiers prioritaires », avec des projets soutenus par l’ANRU qui « résultent de la convergence entre l’initiative locale et l’encadrement national du programme » et qui bénéficient de « marges de souplesse » permettant des ajustements locaux, « comme en témoignent les nombreux avenants faisant suite aux conventions du PNRU ». Ces ajustements peuvent « cependant poser question au regard des choix initiaux inscrits dans les conventions », avertit la Cour des comptes. L’objectif d’affecter 70 % des ressources du PNRU aux quartiers les plus prioritaires ne semble pas être atteint, considère-t-elle encore, « sans que l’on puisse avoir un état des lieux exact faute d’un système d’information adapté », le système en place faisant « apparaître de sérieuses lacunes – un suivi financier disjoint du suivi physique, une insuffisante intégration entre données administratives et données comptables, une fonction d’aide à la décision insatisfaisante ».
Faisant enfin état de « procédures inutilement complexes », coexistant avec de nombreuses possibilités de dérogations, la Haute Juridiction financière plaide pour « simplifier les règles d’intervention de l’ANRU, par l’adoption d’un règlement unique d’intervention et d’une charte de fonctionnement interne ».
(1) Rapport disponible sur
(2) Voir ASH n° 2865 du 20-06-14, p. 5 et n° 2868 du 11-07-14, p. 44.