Dans un avis adopté en séance plénière le 17 juillet, le Conseil supérieur du travail social (CSTS) approuve la charte déontologique type pour l’échange d’informations dans le cadre des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD), récemment réactualisée et adressée aux maires par le comité interministériel de prévention de la délinquance. Sollicitée par ce dernier, l’instance s’est aussi penchée sur le guide méthodologique qui accompagne et explicite la nouvelle charte et, enfin, sur l’autorisation unique rendue par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) le 26 juin pour la constitution de fichiers (1). Au fil de l’examen des textes soumis à son approbation, le CSTS commente un certain nombre de points et formule, au final, une liste de recommandations destinées aux travailleurs sociaux, « au nom des principes éthiques et professionnels qui privilégient la prévention globale et la protection de l’enfance ».
L’instance rappelle ainsi que les principes généraux qu’elle expose régulièrement dans ses différents rapports et avis s’appliquent en prévention de la délinquance. C’est le cas du principe de l’information et du recueil du consentement éclairé des personnes concernées, systématique, depuis son officialisation par la loi du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale, pour l’ensemble des professionnels de l’action sociale, qui sont liés « par l’accord ou le refus du consentement éclairé ».
Autre point abordé par le CSTS : « la relation de confiance [avec l’usager] doit être préservée, sans négliger la délinquance à prévenir », ce qui implique que le professionnel dise la vérité à la personne aidée, lui « explique par exemple en quoi sa situation pose problème », l’avertisse « des limites à ne pas franchir et des risques encourus » et lui rende compte du travail effectué et des discussions la concernant.
En outre, « en travail social, la prévention de la délinquance est traitée dans la logique de la protection de l’enfance et se distingue ainsi des pratiques de médiateurs sociaux visant la tranquillité publique », souligne l’instance, qui réaffirme par ailleurs que « leur responsabilité professionnelle étant engagée, les professionnels doivent connaître les textes de référence » et faire preuve de vigilance quant à leur mise en œuvre au niveau local.
Au final, le CSTS juge que la nouvelle charte constitue « une garantie nationale qui respecte l’éthique et les responsabilités professionnelles des travailleurs sociaux ». Et considère aussi que « le guide méthodologique apporte des clarifications intéressantes », mais qu’il laisse cependant « persister des difficultés sur lesquelles le Conseil supérieur du travail social sera vigilant, du fait notamment du peu de convergence entre la gestion des risques et l’aide aux personnes ». Le guide méthodologique comme la stratégie nationale 2013-2017 de prévention de la délinquance (2) sont en effet « centrés sur le risque, la défaillance, le repérage, l’action corrective, la sécurité et la tranquillité publique… alors que, pour le travail social, la personne concernée est au centre de la relation », regrette l’instance. Le CSTS souligne également « le risque de créer une fonction de “référent de parcours” mal définie » et insiste donc sur le fait que ce référent « mériterait d’être choisi parmi les professionnels ayant déjà une relation éducative avec le jeune […] plutôt qu’une personne recrutée pour cela ».
L’instance estime enfin que « l’autorisation unique de la CNIL encadre précisément le traitement des informations », mais s’inquiète toutefois « de leur diffusion placée sous l’autorité du maire et du “besoin d’en connaître” des divers acteurs assurant le suivi de jeunes basculant dans la délinquance ou participant aux groupes de travail des CLSPD ». Il regrette en effet que, « contrairement à la position soutenue par [sa] commission “Ethique et déontologie”, le guide ouvre les groupes à vocation territoriale ou thématique et les groupes opérationnels du CLSPD aux services de police et de gendarmerie ».
Le CSTS invite donc « les travailleurs sociaux à s’appuyer sur la charte et à participer à ces dispositifs avec vigilance, en fonction des modalités d’application locale et des réponses données (ou non) aux inquiétudes exposées » dans cet avis. Et préconise qu’une évaluation accompagne la mise en œuvre de la charte pendant un an et qu’elle lui soit présentée en juin 2015.
(1) Sur la charte, le guide méthodologique et l’avis de la CNIL, voir ASH n° 2869-2870 du 18-07-14, p. 5 et 36.
(2) Voir ASH n° 2819-2820 du 19-07-13, p. 20.