La question de la mobilité professionnelle des travailleurs sociaux ne doit pas être oubliée dans les négociations collectives et les débats sur l’évolution du secteur, interpelle l’Organisation nationale des éducateurs spécialisés (ONES). « Dans le cadre de notre réflexion globale sur les “états généraux du travail social”, elle est remontée de manière très forte, renvoyant à une vraie demande, une vraie souffrance », explique Jean-Marie Vauchez, président de l’ONES. L’organisation a donc décidé de s’en saisir, sans attendre le texte de contribution aux « états généraux » qu’elle prévoit de diffuser prochainement.
Parmi la centaine de professionnels qu’elle avait sondés en 2013 sur le sujet, 57 % ont indiqué vouloir changer d’institution, dans la majeure partie des cas « pour travailler avec un public différent ». Parmi les freins à cette mobilité, les répondants ont notamment évoqué « une ancienneté non reprise suivant les conventions collectives » et des « politiques publiques organisant un déploiement de moyens trop inégal selon les territoires ». En raison du cloisonnement des fonctions publiques et des différences entre les textes conventionnels, « nombreux sont ceux qui, bien que motivés pour travailler dans une autre structure d’emploi, demeurent en poste pour ne pas subir de perte de revenus », précise l’ONES. A cela s’ajoute une mobilité « ascendante » plus difficile. Pour les éducateurs spécialisés, « les deux débouchés principaux qui existaient, la formation et l’encadrement, se sont taris. Les cadres sont de moins en moins d’anciens éducateurs, et de plus en plus des gestionnaires », ajoute Jean-Marie Vauchez.
Pour favoriser la mobilité professionnelle, identifiée comme un facteur « de lutte contre les risques psychosociaux ou l’usure professionnelle », l’ONES estime que la mise en œuvre d’une convention collective unique pour la branche associative sanitaire, sociale et médico-sociale – chantier que l’Union des fédérations et syndicats nationaux d’employeurs sans but lucratif du secteur sanitaire, médico-social et social (Unifed) a accepté de lancer, mais qui n’a pas encore démarré – est « une perspective intéressante », à condition qu’elle ne débouche pas sur « la perte des meilleures dispositions qui constituent ce qui reste de l’attractivité professionnelle du secteur ».
Autre levier, souligne l’association : la formation professionnelle. Mais, à côté de certaines avancées comme l’instauration du « compte personnel de formation », elle craint que la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale ne parvienne pas à « gommer l’ensemble des dysfonctionnements actuels », comme les délais excessifs pour obtenir le financement d’une formation en CIF (congé individuel de formation). « Nous nous inquiétons par ailleurs de ce qu’il restera des formations qui ne sont pas directement qualifiantes, mais qui permettent de redonner un sens aux pratiques », ajoute Jean-Marie Vauchez. Alors que les décrets d’application de la loi ne sont pas encore parus, les partenaires sociaux de la BASS doivent négocier sur le sujet à partir du 9 juillet, pour aboutir à un accord applicable au 1er janvier 2015.