Lors de l’assemblée générale de la Conférence des bâtonniers du 27 juin, la ministre de la Justice a fait le point sur les pistes de financement de l’aide juridictionnelle (AJ), qui soulèvent le mécontentement des avocats (voir ce numéro, page 24). Elle a également profité de cette occasion pour clarifier les modalités de rétribution des avocats qui participent à l’AJ.
Depuis deux ans, rappelle Christiane Taubira, son ministère était confronté à l’engagement du gouvernement à ne pas créer de nouveaux prélèvements obligatoires. Ce qui l’empêchait de diversifier les sources de financement de l’AJ. Mais, récemment, a-t-elle indiqué, le Premier ministre a accepté de déroger à ce principe. La garde des Sceaux a ainsi précisé qu’une nouvelle taxe allait être créée pour abonder le budget de l’aide juridictionnelle. Pour l’heure, elle travaille avec le ministère du Budget afin d’en déterminer les modalités. Elle souhaiterait, de son côté, taxer le chiffre d’affaires des professions du droit, y compris celle d’avocat: ce « mécanisme interne de solidarité » permettrait notamment, selon elle, de mieux répartir la contribution des cabinets au dispositif de l’aide juridictionnelle (1). Alors que les avocats ne souhaitaient jusqu’à présent pas en discuter, Christiane Taubira les a de nouveau invités à négocier.
La ministre a également précisé que le gouvernement proposerait au Parlement de voter une hausse de 10 % du budget de l’aide juridictionnelle dans le cadre du projet de loi finances pour 2015. Bien que ce ne soit « pas satisfaisant », la garde des Sceaux se réjouit tout de même que cette dotation ne soit pas réduite.
Pour mémoire, les avocats qui prêtent leur concours aux bénéficiaires de l’AJ reçoivent une rétribution de la part de l’Etat, calculée à partir d’une unité de valeur de référence. Dans un souci de simplification administrative et d’économies, le gouvernement souhaitait abroger l’actuel système de modulation de cette unité de valeur de référence en fonction de dix groupes géographiques distincts (2). Le projet de loi de finances initial pour 2014 proposait donc d’unifier les dix tranches en une seule tranche et de porter l’unité de valeur de référence de 22,50 à 22,84 €. Mais la mesure ayant été très mal accueillie par plusieurs syndicats d’avocats, la chancellerie avait alors accepté de repousser de un an l’application de cette réforme. Finalement, la ministre de la Justice a annoncé que le gouvernement allait, cette année, annuler cette mesure de « démodulation » qu’il avait suspendue.
(1) Si les missions d’aide juridictionnelle ont triplé, passant de 348 000 par an en 1991 (date de la loi créant l’aide juridique) à plus de 915 000 par an en 2012, leur répartition est « très inégalitaire au sein de la profession, a relevé la garde des Sceaux : moins de la moitié a effectué au moins une mission d’AJ dans l’année » et 7 % de la profession assure 57 % des missions d’AJ.
(2) Ce mécanisme a été mis en place au motif que les coûts de structure des cabinets d’avocats pouvaient varier en fonction de leur localisation, et être moins importants dans les grands centres urbains où les cabinets sont le plus souvent de grande taille.