Recevoir la newsletter

Des chemins d’humanité

Article réservé aux abonnés

Dans son expérience d’éducatrice spécialisée, Célia Carpaye a eu l’occasion de rencontrer « des tas de fous et de folles ». « J’utilise très facilement le mot “fou”. Je n’ai pas peur de mots », écrit-elle dans l’avant-propos de son livre Les habitants voyageurs. Ces « fous », elle les compare à des voyageurs, car ils « arpentent les chemins de l’étrange » et traversent des frontières imaginaires. Elle travaille avec Raphaël Bouloudnine, psychiatre, au sein du programme expérimental de santé mentale « Un chez-soi d’abord », à Marseille (1). Ensemble, ils ont écrit une trentaine de chroniques mettant en scène ces personnes qui « bousculent et questionnent leurs évidences ». Toutes débutent par une citation – de Paul Valéry à Jim Morrison, sans discrimination. La travailleuse sociale et le soignant, qui ont eux-mêmes « navigué » au sein de trois espaces distincts (la rue, l’hébergement collectif et le logement individuel), interrogent leurs pratiques par le biais de ces portraits de voyageurs. Ils évoquent dans ces pages leurs premières maraudes – où, loin du bureau et si près des gens, les diagnostics, les manuels, les bonnes pratiques volent en éclats « à grand coup de mistral » – et détaillent les parcours « de femmes et d’hommes dont l’une des particularités a été de rencontrer la maladie mentale, mais des hommes et des femmes qui, d’abord, avaient de grandes choses à raconter […]. De l’humanité à l’état brut ils nous ont offert. » Comme Bob, qui « chuchote à l’oreille du soleil » ; JM, « ce philosophe bavard qui avait bien d’autres choses à faire que de devenir fou » ; Sam, l’homme des bois à l’allure de prophète ; une anonyme aux dents de devant brisées, la perruque à l’envers et une bière à la main ; Fernande, dont ils ne savent si elle est sorcière ou magicienne, et avec qui Célia parvient à engager la conversation via un atelier d’écriture ; ou encore Félicien, qui n’a envie de rien et « regarde la vie défiler, comme un passager tombé là par erreur qui n’aurait aucun profit à tirer du monde dans lequel il s’est égaré ». Les professionnels tendent une main à ces voyageurs, tous épuisés de leur périple, mais peinent souvent à répondre à des demandes que ces usagers atteints de maladies psychiques ne savent pas toujours formuler. A travers les histoires de ces adultes, Célia Carpaye et Raphaël Bouloudnine insistent sur la question de l’accès au logement pour tous, quel que soit le vécu ou le degré d’exclusion.

Les habitants voyageurs. Chroniques de la folie en mouvement

Célia Carpaye et Raphaël Bouloudnine – ESF Editeur – 14,90 €

Notes

(1) Voir ASH n° 2750 du 9-03-12, p. 32.

Culture

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur