Si la qualité de l’accompagnement des usagers des services d’aide à domicile ne peut se réduire à la notion de « bientraitance », cette dernière, qui « vise à promouvoir le bien-être de l’usager en gardant à l’esprit le risque de maltraitance », en est « l’une des dimensions essentielles », rappelle l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ANESM) dans un rapport d’enquête sur les pratiques des services intervenant auprès des adultes à domicile, publié le 11 juin (1).
Ce document très détaillé – qui s’appuie sur près de 4 000 réponses reçues à un questionnaire en ligne soumis à l’ensemble des services d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD), des services de soins infirmiers à domicile, des services polyvalents d’aide et de soins à domicile (Spasad), des services d’accompagnement à la vie sociale (SAVS) et des services d’accompagnement médico-social pour adultes handicapés (Samsah) – constitue en fait le premier volet de cette enquête. Celle-ci doit être complétée en septembre prochain par une étude qualitative sur les prestations d’accompagnement, centrée sur les personnes âgées accompagnées et leurs proches.
« La bientraitance se caractérise par une recherche permanente d’individualisation et de personnalisation de la prestation », poursuit l’ANESM, en reprenant les termes de la définition qu’elle en avait livrée en 2008 (2).
A cet égard, l’agence met en évidence qu’une large majorité des services qui ont participé à l’enquête (83 %) ont une stratégie de personnalisation de leurs prestations, pour plus des deux tiers des personnes accompagnées. Cette recherche de personnalisation monte même à 97 % pour les services accompagnant principalement des personnes handicapées et s’élève à 82 % dans ceux qui interviennent surtout auprès de personnes âgées. Nombre de recommandations de l’ANESM sont ainsi mises en œuvre dans les services, souligne l’institution, qui évoque notamment le recueil des attentes des usagers (88 %), la recherche de leur consentement ou assentiment (77 %) ou encore de solutions pour adapter l’organisation aux rythmes des personnes (79 %).
« Cependant, la mise en œuvre simultanée de l’ensemble des recommandations de l’ANESM, notamment sur les attentes des personnes et le projet personnalisé, reste rare dans l’ensemble des services », constate-t-elle, en indiquant que 28 % des services ont élaboré un projet personnalisé associant plusieurs professionnels du service, que 12 % mettent en place les trois volets du projet personnalisé (vie quotidienne, soins et vie sociale) et que 5 % seulement mettent en place ces trois volets en élaborant le projet personnalisé de manière collective, en prévoyant un suivi et une réévaluation structurée.
Dans la mise en œuvre du projet d’accompagnement, par ailleurs, les services rapportent qu’ils rencontrent des difficultés principalement avec les personnes ayant des troubles cognitifs (33 %) ou des troubles psychiques (30 %), et avec les personnes en fin de vie (12 %).
L’organisation interne et la coopération avec les partenaires constituent, par ailleurs, « un gage de bientraitance », selon l’ANESM, qui en décrit les modalités: un partage d’informations entre professionnels sous forme de transmissions hebdomadaires orales (60 %) ou écrites (77 %) ou de réunions de services, le plus souvent là aussi hebdomadaires, par exemple dans les Samsah (75 %) et les SAVS (70 %). Ce sont les SAAD qui semblent avoir le plus de mal à organiser des temps d’échanges interprofessionnels, ou alors de manière pas très régulière.
Quant à l’articulation des interventions entre les différents services partenaires, elle s’exprime le plus souvent par le biais du cahier de liaison, mis en place par 93 % des services, à l’exception des SAVS (60 %) « qui n’interviennent pas systématiquement au domicile des personnes ». Les autres modes de coopération les plus fréquents résident dans les réunions de coordination (71 %) et la mise en place de conventions avec les différents acteurs de terrain (65 %).
A noter que les usagers sont toujours rarement ou difficilement associés à l’évaluation interne des services d’aide à domicile (30 %), la forme de consultation la plus fréquente étant une enquête de satisfaction (92 %). Parmi les autres formes de participation des usagers adoptées par 41 % des services en complément, figure l’élaboration du projet de service (18 %) ou du règlement de fonctionnement (9 %).
Enfin, malgré les efforts déployés pour promouvoir la bientraitance, 23 % des services ayant répondu à cette enquête disent avoir effectué, en 2012, un signalement pour une suspicion de maltraitance sur au moins un de leurs usagers. « Un tiers des situations relèvent de maltraitances multiples associant plusieurs natures de maltraitances (médicales ou médicamenteuses, matérielles et/ou financières, violences physiques, psychiques et/ou morales, négligences, conflits familiaux, risques pour l’enfant et de détérioration des liens parents-enfants) », souligne l’ANESM dans la synthèse de son rapport. Selon les déclarations des services, cette maltraitance est « majoritairement le fait des familles ou de l’entourage : pour plus de 80 % des signalements, les services déclarent qu’elles sont le fait des familles ».
(1) Enquête nationale relative aux pratiques concourant à la bientraitance dans les services intervenant auprès d’un public adulte à domicile – Analyse nationale du questionnaire 2013 (volet 1) – Juin 2014 – Disp. sur
(2) Voir ASH n° 2569 du 22-08-08, p. 13.