Adoptée en première lecture par le Sénat le 28 mars dernier contre l’avis du gouvernement (1), la proposition de loi (UMP) permettant aux conseils généraux de percevoir en tout ou partie, en lieu et place des parents, les allocations familiales et l’allocation de rentrée scolaire (ARS) dès lors qu’ils assurent l’entretien effectif d’un enfant confié au service de l’aide sociale à l’enfance (ASE) a finalement été rejetée par l’Assemblée nationale le 12 juin.
Pour les auteurs de la proposition de loi, qui a suscité l’indignation du monde associatif (2), ces allocations doivent bénéficier à la collectivité en contrepartie de la charge qu’elle supporte. Lors de l’examen à l’Assemblée nationale, Gilles Lurton, rapporteur (UMP) du texte, a ainsi déclaré que « les allocations familiales, et c’est bien leur objet, doivent permettre de subvenir aux besoins des enfants pour qui elles sont versées, et elles ne sauraient avoir d’autre vocation. C’est le sens même de l’article L. 521-2 du code de la sécurité sociale » qui dispose que les allocations sont versées à la personne qui assume, dans quelques conditions que ce soit, la charge effective et permanente de l’enfant. Ces sommes qui sont versées aux familles et non au service de l’ASE représentent, « au bas mot, 2,5 millions d’euros par mois », a-t-il ajouté.
Opposée à la proposition de loi, la secrétaire d’Etat chargée de la famille, Laurence Rossignol, a de son côté fait valoir que, « lorsqu’un enfant est confié au service de l’ASE, les parents conservent l’autorité parentale. Dans de nombreux cas, et le juge est là pour tenir compte de ces situations, l’enfant confié revient en effet régulièrement chez ses parents, lesquels, tenus à l’obligation alimentaire, continuent d’engager des dépenses pour son entretien et son éducation ». Le placement « est le plus souvent temporaire : il est prévu seulement pour deux ans, renouvelables, et 95 % des enfants placés ont vocation à revenir dans leur famille ». Ainsi, le versement des allocations aux parents – qui est décidé par le juge – permet de maintenir le lien entre les enfants et leur famille. Laurence Rossignol a étayé son argumentation de quelques données chiffrées. Selon elle, la caisse nationale des allocations familiales comptabilise 50 941 familles dont l’un des enfants au moins est confié à l’aide sociale à l’enfance. Parmi ces familles, 27 945 maintiennent des liens affectifs avec les enfants et continuent de percevoir pour eux la totalité des prestations, y compris les allocations familiales, sur décision du juge des enfants, 18 460 maintiennent des liens affectifs avec ces enfants et ne perçoivent plus les allocations familiales et 4 536 ne maintiennent pas de liens affectifs et ne perçoivent plus les allocations familiales.
(1) Voir ASH n° 2804 du 5-04-13, p. 5.
(2) Voir ASH n° 2804 du 5-04-13, p. 15.