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La Cour des comptes dresse un état des lieux préoccupant de la santé en outre-mer

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Quelles que soient les organisations politiques et administratives des territoires, « il appartient en dernier ressort à l’Etat [d’]être l’ultime garant [de la santé] et de veiller à ce que soit assurée l’égalité de chacun dans [ce] domaine », rappelle la Cour des comptes dans un rapport consacré à la santé dans les territoires d’outre-mer rendu public le 12 juin (1). Si ces derniers « connaissent une situation sanitaire beaucoup plus satisfaisante que celle des pays qui les avoisinent », ils n’en sont pas moins globalement confrontés à certaines « difficultés persistantes » marquées par une mortalité infantile et maternelle élevée (2), une incidence importante des maladies infectieuses et chroniques, des conduites addictives, des maladies transmissibles « très présentes », une fréquence des épidémies, des pathologies rares « courantes dans une partie des outre-mer »… La situation sanitaire dans les territoires ultramarins est par ailleurs « fortement contrastée de l’un à l’autre et au sein même de chacun d’entre eux ». Ainsi, si certains, tels que La Réunion et les Antilles, « sont dans une dynamique de convergence » avec la métropole, d’autres, notamment la Guyane et Mayotte, connaissent encore des retards importants.

Des systèmes de santé « à la peine »

L’organisation des systèmes de santé est « à la peine », constate la Cour des comptes, qui pointe d’abord une prévention insuffisante : la protection maternelle et infantile remplit « inégalement ses missions », les dispositifs de santé scolaire et universitaire sont « souvent insuffisants » et, quant à l’effort de l’assurance maladie, il « est inégal et sans rapport avec les déterminants de santé ». La médecine ambulatoire est, comme en métropole, caractérisée par des inégalités de répartition géographique, aggravées par l’isolement et l’insularité. Là encore, de « forts contrastes » apparaissent entre des régions « surdotées » comme La Réunion et des « déserts médicaux », en Guyane notamment. En définitive, c’est « sur le secteur hospitalier que repose l’armature du système de soins », constatent les rapporteurs. « Mais ce rôle central peut conduire à une préférence coûteuse pour de relativement grands ensembles hospitaliers […] qui concentrent les investissements, fréquemment très mal maîtrisés. »

Le rapport revient par ailleurs sur « quatre situations difficiles », dont celles de la Guyane et de Mayotte (3). « Mayotte, confrontée à une croissance démographique explosive du fait de l’arrivée en continu de Comoriens en situation irrégulière, connaît des problématiques sanitaires très lourdes » et son système de soins « souffre de l’absence d’équilibre entre soins de premier recours et prise en charge par l’hôpital, surchargé ». Ce sont les dispensaires qui doivent assurer les prises en charge ambulatoires, la médecine libérale peinant à se développer « car son modèle économique ne correspond pas à la population, très démunie ». Le système de santé d’une partie de la Guyane est lui aussi « saturé » par la présence d’une forte population en situation irrégulière et dont l’état de santé est souvent médiocre.

14 propositions pour une stratégie adaptée de santé

Au final, « une stratégie adaptée de santé publique pour les outre-mer constitue un enjeu majeur », estime la Cour des comptes, qui formule 14 recommandations autour de trois grandes orientations : « mieux connaître, mieux coordonner, agir plus efficacement avec une stratégie d’ensemble et pluriannuelle permettant de réduire les écarts les plus graves en termes d’égalité des chances. »

Pour « mieux connaître », les magistrats financiers proposent notamment d’établir « un tableau de bord régulièrement actualisé pour mesurer les écarts et engager les actions correctrices ». S’agissant de la coordination, ils recommandent de « charger les agences régionales et territoriales de santé de rééquilibrer les financements au profit d’un programme de prévention spécifique » ou encore de développer, « dans des délais rapides », les protocoles de coopération entre professionnels de santé, en particulier pour les infirmiers, les sages-femmes et les orthoptistes.

Pour un système plus efficace, il faut, selon la Cour des comptes, s’appuyer sur les dispositifs réglementaires destinés à pallier les disparités territoriales d’installation des médecins, mais aussi « recentrer l’hôpital sur les pathologies les plus lourdes, en développant les prises en charge médicales et médico-sociales alternatives à l’hospitalisation, en renforçant la permanence des soins de ville et en améliorant le pilotage des urgences hospitalières ». La Haute Juridiction financière conseille également de « décliner dans un programme de santé publique pour les outre-mer la stratégie nationale de santé et la future loi de santé publique, autour d’un nombre limité de grandes priorités, sur la base d’un calendrier réaliste et d’une programmation budgétaire pluriannuelle ».

En conclusion, les rapporteurs signalent que « seul un programme pluriannuel robustement construit, reposant sur une stratégie d’action publique profondément renouvelée […], tenant compte de l’extrême diversité des situations sanitaires territoire par territoire et remédiant aux profondes insuffisances et inégalités observées au cours des dernières décennies permettra ainsi de répondre à l’enjeu que constitue outre-mer l’égalité des droits à la santé dans la République ».

Notes

(1) La santé dans les outre-mer, une responsabilité de la République – Juin 2014 – Disp. sur www.ccomptes.fr.

(2) Par exemple, en 2012, la mortalité infantile à Mayotte était de 16,1 pour 1 000 naissances, contre 3,3 en métropole.

(3) Les deux autres étant Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna.

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