Le système de financement du secteur de l’aide à domicile est « à bout de souffle » et doit être « réformé d’urgence ». S’il n’est pas nouveau, le constat du rapport d’information sur l’aide à domicile des sénateurs Jean-Marie Vanlerenberghe (UDI-UC) et Dominique Watrin (PC), adopté à l’unanimité le 4 juin par la commission des affaires sociales, a le mérite de confirmer les difficultés structurelles du secteur à l’heure où le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement (1) veut favoriser le maintien à domicile des personnes âgées. Le diagnostic des parlementaires rejoint celui des différents rapports publiés ces dernières années (2) et qu’aucun acteur ne conteste plus (3). L’asphyxie des services d’aide à domicile trouve « une première explication dans la contraction des dépenses publiques et de celles des ménages », note ainsi le rapport. Mais cette situation est accentuée par des « faiblesses structurelles liées au mode de tarification des services ainsi qu’à leur organisation propre ».
Les sénateurs déplorent la complexité de l’environnement juridique et tarifaire du secteur reposant sur la coexistence de deux modalités de tarification des services – l’agrément ou l’autorisation. Pour le simplifier, ils proposent de substituer à ce droit d’option « un seul système d’autorisation rénové ». Fustigeant des tarifs « variables selon les départements » et « globalement insuffisants pour couvrir l’ensemble des coûts supportés par les structures », le rapport plaide pour l’évaluation, dès 2014, du mode de tarification défendu par l’Assemblée des départements de France et le Collectif de l’aide à domicile actuellement expérimenté dans une dizaine de départements. Sur la base de cette évaluation et des résultats d’une étude nationale de coûts, il invite les pouvoirs publics à engager, dès 2015, une réforme pérenne de la tarification des services d’aide à domicile pilotée par la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. Autre proposition: confier à l’inspection générale des affaires sociales une mission d’évaluation du fonctionnement actuel des services polyvalents d’aide et de soins à domicile, structures qu’il juge « indispensables dans une perspective de décloisonnement des secteurs sanitaire et médico-social » (4).
Les fonds de restructuration de 2012 et 2013 pour venir en aide aux structures les plus en difficulté « n’ont apporté qu’une réponse ponctuelle » et les efforts engagés dans le cadre du projet de loi « autonomie » ne permettront pas de « rééquilibrer le financement de l’APA [allocation personnalisée d’autonomie] entre l’Etat et les départements ». Au final, les rapporteurs invitent à renforcer durablement la participation de l’Etat dans le financement de l’APA et de la prestation de compensation du handicap, afin d’assurer la solvabilisation et la qualité des interventions des services. Ils proposent de définir un tarif national de référence de l’APA, modulable suivant les caractéristiques des départements. Enfin, pointe le rapport, l’effort doit aussi venir des structures qui doivent se réformer, notamment en s’engageant dans des actions de mutualisation – mise en commun de fonctions supports, de personnels d’encadrement ou de certains personnels d’intervention.
Les deux sénateurs plaident aussi pour le renforcement de l’attractivité des métiers de l’aide à domicile en poursuivant la mise en place de formations qualifiantes et professionnalisantes. Pour améliorer les conditions de travail des salariés du secteur, ils invitent à « engager une politique structurée de prévention de la pénibilité dans le secteur », à encourager des contrôles plus systématiques dans les structures d’aide à domicile ainsi qu’à renforcer les dispositions relatives aux conditions de travail dans les cahiers des charges applicables aux services.
(1) Présenté en conseil des ministres le 3 juin – Voir ASH n° 2863 du 6-06-14, p. 5.
(2) En particulier le rapport des inspections générales des affaires sociales et des finances de janvier 2011 (voir ASH n° 2694 du 28-01-11, p. 5) et le rapport « Poletti » de janvier 2012 (voir ASH n° 2741-2742 du 13-01-12, p. 6).
(3) Les quatre fédérations d’aide à domicile – Adessadomicile, l’ADMR, la Fnaafp/CSF, l’UNA – se félicitent du « constat lucide et des propositions majeures » formulés par ce rapport. Elles demandent au gouvernement d’en prendre acte et de programmer « de manière urgente » l’examen au Parlement du projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement.
(4) Voir ASH n° 2835 du 29-11-13, p. 14.