Nous nous étions battus pour préserver l’ancien Programme européen d’aide aux plus démunis (PEAD), transformé en FEAD pour la période 2014-2020 (1), mais les modalités de ce nouveau fonds ont changé: le programme impose la gratuité des produits aux usagers. Or, depuis 15 ans, les 750 associations adhérentes à l’ANDES demandent aux usagers une participation financière de 10 à 20 % du montant moyen du produit, ceci dans un souci de respect de leur dignité et de leur autonomie. En outre, les sommes tirées de cette participation symbolique participent à l’équilibre économique des épiceries. Mais nous n’avons pas eu gain de cause auprès de Bruxelles. Alors, plutôt que de changer notre fonctionnement – qui a fait ses preuves –, nous avons préféré refuser l’aide (2).
Sortir du système d’aide alimentaire européen, c’est aussi nous mettre en danger. Nous avons, dès lors, entrepris un travail de lobbying. Christophe Sirugue, vice-président (PS) de l’Assemblée nationale et membre de la commission des affaires sociales, s’est montré intéressé par nos difficultés et a fait voter à la fin 2013, dans la loi de finances 2014, une subvention exceptionnelle. Le « crédit national des épiceries solidaires » (CNES) s’élève à 8 millions d’euros, à répartir entre l’ANDES et la Fédération française des banques alimentaires (FFBA) sur la base du nombre d’épiceries adhérentes à chacun des réseaux. Avec l’enveloppe de 3,8 millions d’euros que nous devrions recevoir prochainement, nous pouvions soit développer des chantiers d’insertion, soit acheter des produits alimentaires dans les grandes enseignes, soit l’utiliser partiellement pour acheter des fruits et légumes auprès des circuits courts, ce qui a pour avantage de créer du lien entre les territoires, d’aider économiquement des petits producteurs et de proposer des produits de qualité à nos usagers. C’est cette troisième option qui a été retenue.
Avec nos crédits non utilisés de 2013… Mais cela ne pourra pas durer éternellement. Dès réception du CNES, nous débloquerons une avance financière de 50 % pour chaque structure qui nous en fera la demande, sans justificatif préalable de son utilisation. Pour recevoir le second acompte, elles devront, bien entendu, fournir les factures d’achats de produits alimentaires liées au premier versement. Cette avance permettra de soulager provisoirement le système. Sachant que, de toute façon, le CNES ne sera pas suffisant pour répondre aux besoins croissants.
J’ai malheureusement du mal à croire que l’Etat nous octroie un crédit supplémentaire. Nous avons pensé à nous associer aux banques alimentaires pour lancer des commandes communes, sauf qu’il aurait fallu demander les mêmes produits qu’elles pour pouvoir tirer sur les prix. Cela n’a pas de sens que les usagers trouvent la même huile d’olive, le même pâté et la même bouteille de jus de fruits gratuitement dans les banques alimentaires et à 10 % du prix dans les épiceries solidaires. Il faut donc envisager de nouvelles sources d’approvisionnement, comme le lancement d’une collecte.
Mais nous avons également un projet bien avancé : en septembre prochain, nous commercialiserons en grande surface une gamme de soupes, dont les bénéfices seront réinvestis dans l’aide alimentaire ! Sans solutions innovantes, des épiceries risquent de fermer.
Cette année, il nous semble en effet plus important de privilégier l’organisation de nombreuses rencontres régionales pour connaître les besoins de terrain.
(1) Voir ASH n° 2815 du 21-06-13, p. 11.
(2) Voir ASH n° 2836 du 6-12-13, p. 15.