L’avenir des 1 850 centres va se jouer dans les mois qui viennent. Depuis plusieurs années, ils sont confrontés à un problème structurel de financement car leur mode de rémunération n’est pas adapté à leurs activités. L’assurance maladie rembourse leurs actes curatifs, comme elle le fait pour les médecins libéraux, mais ne finance pas les autres missions qui font leur spécificité : pratique du tiers-payant, mise en place du dossier unique et partagé permettant une prise en charge coordonnée par des professionnels de santé salariés, accompagnement des patients dans leurs démarches d’accès aux droits, portage d’action de santé publique, accueil de stagiaires. Faute de ressources suffisantes, certains centres sont fragilisés et ne peuvent survivre qu’en agissant sur la rémunération des praticiens, d’autres ont été rachetés ou ont réduit leurs activités. La ministre de la Santé s’est engagée, à la fin 2012, à conforter ses structures et le rapport qu’elle a commandé à l’IGAS a préconisé la création d’un « forfait de gestion regroupée » qui financerait ces missions spécifiques (3).
Une première réunion a eu lieu le 11 avril dans le but de rénover l’accord cadre – vieux de onze ans – qui lie les centres à l’assurance maladie. Mais la proposition de la caisse ne fait que transposer les éléments inscrits dans les conventions libérales et balaie les propositions de l’IGAS. Or si on traite les centres de santé comme les libéraux, rien ne justifie qu’il y ait un accord cadre spécifique à ces structures ! Si on perçoit une volonté politique de pérenniser les centres de santé, nous ne voudrions pas qu’ils soient conçus comme une réponse réservée aux pauvres et collés au fonctionnement du modèle libéral. Ils répondent aux besoins de tous les publics et seront un modèle d’organisation de l’ambulatoire de demain ! De plus en plus d’élus en sont convaincus et ont signé notre « Pacte d’avenir » (4).
Nous souhaitons que l’accord national intègre le forfait de gestion préconisé par l’IGAS. Par ailleurs, nous demandons à faire partie de la négociation en cours avec les médecins libéraux sur le financement de la pratique d’équipe. Depuis 2009, une expérimentation de nouveaux modes de rémunération a lieu dans les structures pluriprofessionnelles telles que les centres, maisons et pôles de santé qui permet de rémunérer le travail en équipe et l’exercice regroupé et interprofessionnel (5).
La négociation entre l’assurance maladie et les organisations syndicales visant à généraliser cette expérimentation doit se conclure avant le 31 juillet. Si nous obtenons le forfait de gestion et le financement de l’exercice d’équipe, les centres de santé ont un bel avenir devant eux !
Les valeurs des centres de santé se retrouvent parfaitement dans le concept de service public territorial de santé (STPS) envisagé dans le cadre de la future loi de santé publique. Tout dépend maintenant de ce que la puissance publique va en faire. Sachant que les médecins libéraux n’ont pas une conception « populationnelle » et territoriale de la promotion de la santé – ce ne sont pas des dentistes libéraux qui interviendront dans les écoles pour faire la promotion de la santé bucco-dentaire –, je doute qu’ils puissent porter les mêmes valeurs. Quant à la réforme territoriale, il serait aberrant de supprimer la clause de compétence générale qui permet aux collectivités territoriales d’agir dans tous les domaines. D’un côté, on leur supprimerait le droit de mener des actions de santé, de l’autre, on leur demanderait de signer des contrats locaux de santé dans le cadre du STPS, c’est un non-sens !
(1) Qui rassemble Adessadomicile, la CANSSM, la C3CI, la Croix-rouge française, la FMF, la FNCS, la FNISASIC, la FNMF, l’UNA, l’UNADMR, l’Uniopss.
(2) Richard Lopez est président de la Fédération nationale des centres de santé (FNCS).
(3) Voir ASH n° 2822 du 30-08-13, p. 11.
(4) Lancée la veille des élections municipales, la pétition pour un « Pacte d’avenir pour les centres de santé » a recueilli plus de 1 500 signatures.
(5) Voir ASH n° 2850 du 7-03-14, p. 53.