« Liberté, égalité, accessibilité ». C’était le slogan affiché en grand format, le 13 mai place de la République à Paris, par l’Association des paralysés de France (APF). Une référence symbolique pour exprimer la colère des personnes à mobilité réduite et leur détermination à refuser les nouveaux délais introduits par le gouvernement pour la mise en accessibilité des lieux publics, dans son plan de rattrapage du retard accumulé dans l’application de la loi du 11 février 2005. Des délais qui peuvent aller jusqu’à neuf ans supplémentaires par rapport à l’échéance initiale de 2015, selon les agendas d’accessibilité programmée (Ad’AP) annoncés en février dernier. Le projet de loi autorisant le gouvernement à légiférer par ordonnance sur le sujet, adopté par le Sénat le 28 avril, devrait être examiné à l’Assemblée nationale au mois de juin.
« Il est inconcevable pour nous d’attendre encore », a résumé le président de l’APF, Alain Rochon, en lançant « l’appel des 100 », nom qui renvoie aux interventions des 100 représentants de l’organisation, venus de toute la France pour illustrer, avec de nombreux autres témoignages, le ras-le-bol des personnes handicapées face à leurs difficultés quotidiennes. Places de stationnement adaptées occupées par des valides, magasins, restaurants, cabinets médicaux impraticables… Tandis que la combativité des militants, valides ou non, s’exprimait sur les pancartes – « non, la liberté d’aller et de venir comme tout le monde ne peut pas attendre », ou encore « le changement, c’est maintenant, pas dans dix ans » –, des stands proposaient de signer la pétition « N’écoutez pas les lobbies », portée par le sportif Philippe Croizon. Celle-ci a recueilli plus de 200 000 signatures, selon l’association. D’autres rassemblements étaient aussi annoncés dans plusieurs autres villes, comme Bordeaux, Toulouse, Orléans, Marseille ou Nantes.
Par cette mobilisation d’ampleur, l’APF réitère son souhait de voir réduits les nouveaux délais de mise en accessibilité, avec des sanctions financières très importantes en cas de manquement. Une revendication partagée par d’autres organisations, comme la FNATH (L’association des accidentés de la vie), l’Association nationale pour l’intégration des personnes handicapées moteurs ou encore le CDTEHD (Comité pour le droit au travail des handicapés et l’égalité des droits), qui invite les personnes dépendantes, les associations et les élus à demander aux députés de ne pas voter le projet de loi autorisant le gouvernement à légiférer par ordonnance sur l’accessibilité. En mars dernier, le Conseil national consultatif des personnes handicapées avait également manifesté sa réprobation sur les délais annoncés (1).
La manifestation n’a pas laissé indifférente la nouvelle secrétaire d’Etat aux personnes handicapées et à la lutte contre l’exclusion, qui a toutefois défendu la ligne gouvernementale sur le sujet. Ségolène Neuville a rappelé, dans un communiqué, que la mise en place des agendas d’accessibilité programmée – dont l’objectif est de permettre « aux acteurs, publics et privés, qui ne sont pas en conformité avec la loi de 2005, de s’engager sur un calendrier précis et resserré de travaux d’accessibilité » – était issue d’une concertation qui a associé toutes les parties (associations de personnes handicapées, élus locaux, fédérations de professionnels). « En l’absence de dépôt d’un agenda, les sanctions pénales prévues par la loi de 2005 pour non-respect des obligations d’accessibilité sont maintenues », souligne-t-elle, ajoutant que « le non-respect des agendas entraînera des sanctions financières qui alimenteront un fonds créé à cet effet et dédié à l’accessibilité ». Et d’insister sur le fait que « l’objectif des agendas d’accessibilité programmée n’est pas de se donner du temps, mais de se donner les moyens d’appliquer la loi de 2005 ».
(1) Voir ASH n° 2852 du 21-03-14, p. 7.