La galère jeune…

Quelle place pour les 10 000 jeunes déscolarisés chaque année ? Comment vivent-ils cette période aussi éloignée de l’école que du monde du travail ? Pour quelques-uns d’entre eux, elle permet de « prendre du recul », mais pour la plupart, c’est simplement « long » et « déprimant ». Souvent, c’est une mauvaise orientation qui les a amenés à tout lâcher bien avant le bac. Mais certains évoquent l’envie trop simple de « travailler pour gagner de l’argent vite ». Une rêverie qui s’est vite confrontée à la réalité. Marieke, Sou­fiane, Fayed, Sarah, Jean-Clément… En tout, 20 filles et garçons venus de Dijon et de Toulouse racontent, sans filtre ni intermédiaire, leur parcours de déscolarisation dans le documentaire Jeune. Le réalisateur Christian Zerbib a eu l’idée de les rassembler, de les former à la prise de vues et au montage, puis de leur prêter des caméras pour qu’ils réalisent leur autoportrait. Avec leur langue, leur musique, leur vérité, ils dévoilent leur richesse intérieure et la réalité d’une mise à l’écart impitoyable.

Ce sont les mêmes jeunes, ou leurs cousins germains, qui racontent dans leurs textes créés dans la douleur comment ils sont restés « sur le bord de la route » dans le roman Une place au milieu du monde de Patrice Robin. Dans un établissement du type école de la deuxième chance, Pierre, le héros, anime des ateliers d’écriture. Cette histoire est tirée d’une expérience personnelle de l’auteur auprès de décrocheurs. En s’inspirant des 300 jeunes qu’il a rencontrés au fil de ses ateliers, il a créé 11 personnages, sur la pensée et sur la vie desquels Pierre aide à mettre des mots. Ils partent de très loin, la plupart étant incapables de décrire en quelques phrases le lieu où ils vivent. Mais au fil du temps, quelques-uns se sortent de leurs difficultés et donnent de l’espoir à l’intervenant. Comme Aude, grâce à qui Pierre se dit que le travail effectué dans l’établissement a peut-être son utilité. Et tous ces autres qui, tellement habitués à l’échec, reprennent confiance en eux quand ils réussissent à rendre un texte cohérent, même si celui-ci reste rempli de fautes d’orthographe. Mais très peu d’anciens passent à La Fabrique pour donner des nouvelles. Si Pierre a appris que Claude travaille chez un paysagiste et que Charlie est entré au garage paternel à la sortie de l’établissement, il sait par un éducateur que d’autres ont été vus dans un centre d’hébergement d’urgence ou faisant la queue aux Restos du cœur.