Deux jours avant le troisième sommet européen sur les Roms qui s’est déroulé le 4 avril, la Commission européenne a présenté un bilan mitigé de la mise en œuvre du cadre européen des stratégies nationales d’intégration des Roms, adopté en juin 2011 pour la période allant jusqu’à 2020 (1). Les Etats membres ont en effet, selon elle, accompli des progrès limités dans les quatre domaines clés que sont l’éducation, l’emploi, la santé et le logement, ainsi que dans la lutte contre les discriminations et l’utilisation des financements dédiés. Les interventions dans le domaine du logement, en particulier, ont souvent été le maillon faible des stratégies nationales, note la Commission. La commissaire à la Justice, aux Droits fondamentaux et à la Citoyenneté, Viviane Reding, a toutefois estimé que de maigres résultats valaient mieux qu’aucun résultat du tout. « Bien sûr, nous ne pouvons du jour au lendemain effacer des siècles d’exclusion et de discrimination, mais le simple fait de placer cette question au cœur des priorités politiques de l’Europe permet d’avancer », a-t-elle souligné.
Le bilan de la Commission s’articule autour d’une communication générale (2) et d’un document de travail résumant la situation par Etat membre (3). Dans la communication générale, la France est citée en exemple pour son projet-pilote « Andatu » (« pour toi » en langue romani), mis en place à Lyon et fondé sur un accès simultané aux droits au séjour, au logement, à la formation et à l’emploi pour les familles de nationalité roumaine. Mais aussi pour des logements temporaires de qualité construits avec l’implication de la communauté rom, grâce à l’aide du Fonds européen de développement régional. Le document de travail, lui, recense les mesures d’ores et déjà mises en œuvre par la France, notamment l’adoption de la circulaire interministérielle du 26 août 2012 relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites (4) et le soutien – y compris financier (quatre millions d’euros par an) – pour faciliter sa mise en œuvre par les autorités locales. Sur cette base, il conclut :
→ que le cadre de la politique d’intégration des Roms est en place et doit maintenant être pleinement appliqué au niveau local ;
→ qu’une meilleure coordination entre les régions et le gouvernement central doit encore être développée ;
→ qu’il faut renforcer davantage la capacité et le mandat du « point de contact national » chargé de la mise en œuvre et de la surveillance de la stratégie nationale d’intégration des Roms.
Le même exercice est répété pour chaque Etat membre (sauf pour Malte, qui n’a pas adopté de stratégie nationale en raison du petit nombre de Roms sur son territoire). Les pays les plus à la traîne sont la Bulgarie, la République tchèque, la Hongrie, la Slovaquie et la Roumanie. Cinq pays qui se sont vu adresser une recommandation de la Commission en 2013.
La Commission européenne est rejointe dans son analyse par le Conseil de l’Europe. Dans un communiqué publié le 7 avril, à la veille de la Journée internationale des Roms, ce dernier estime en effet que « malgré les programmes européens visant à faciliter l’intégration des Roms dans la société, les progrès sont lents ». « Trop de Roms vivent encore dans des ghettos, et leurs enfants sont encore trop nombreux à fréquenter des écoles spécialisées », dénonce-t-il. Et même si « les services communaux du logement, de l’éducation et de la santé ont souvent des moyens très limités […], ils doivent aussi s’occuper des Roms », affirme-t-il. Selon le Conseil de l’Europe, c’est en effet « l’assistance au niveau local [qui] constitue la stratégie la plus prometteuse pour apporter la justice à la plus grande minorité de l’Europe ».
(1) Voir ASH n° 2716 du 1-07-11, p. 17.
(2) Communication COM (2014) 209 du 2 avril 2014, disp. sur
(3) A noter que, dans ce document (disp. en anglais sur http://goo.gl/q7NdMD), la Commission européenne, de façon étonnante, mêle des préconisations concernant les Roms et les gens du voyage. Et, dans un communiqué du 4 avril, elle enfonce le clou en expliquant que « le terme “Rom” désigne des groupes de personnes ayant des caractéristiques culturelles plus ou moins similaires, comme les Sinti, les gitans, les Kalés, les gens du voyage, etc., qu’ils soient sédentaires ou non » (MEMO/14/29 du 4 avril 2014, disp. sur
(4) Voir ASH n° 2772 du 31-08-12, p. 20.