Le Conseil constitutionnel, dans une décision du 13 mars, a censuré le « registre national des crédits aux particuliers » (RNCP) prévu par la loi relative à la consommation adoptée le 13 février (1). Un fichier – dit « fichier positif d’endettement » – qu’il a jugé attentatoire au droit au respect de la vie privée (sur les réactions des association de lutte contre l’exclusion, voir ce numéro, page 18). La Haute Juridiction a, en revanche, jugé conforme à la Constitution les autres dispositions de la loi sur la prévention du surendettement, ainsi que celles concernant les établissements et services sociaux et médico-sociaux (voir ci-contre).
La loi « consommation » prévoyait d’instituer un registre national des crédits aux particuliers ayant pour finalité de prévenir les situations de surendettement des personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels. Ce registre devait recenser des informations relatives aux incidents de paiement caractérisés liés aux crédits, ainsi que des informations relatives aux situations de surendettement traitées par les commissions de surendettement et aux liquidations judiciaires. Les requérants soutenaient que, en raison de son ampleur, du caractère sensible des informations qu’il contient et de ses modalités de consultation, ce registre portait une « atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée, qui n’est pas justifiée au regard de l’objectif poursuivi par le législateur ». Le Conseil constitutionnel a fait droit à leur demande.
Certes, la création de ce fichier était, selon lui, justifiée par un motif d’intérêt général dans la mesure où il visait à prévenir plus efficacement et plus précocement les situations de surendettement en fournissant aux établissements et organismes financiers des éléments leur permettant d’apprécier, au moment de l’octroi du prêt, la solvabilité des personnes physiques qui sollicitent un crédit ou se portent caution et, en conséquence, de mieux évaluer le risque. Mais la Haute Juridiction a considéré que, « eu égard à la nature des données enregistrées, à l’ampleur du traitement, à la fréquence de son utilisation, au grand nombre de personnes susceptibles d’y avoir accès et à l’insuffisance des garanties relatives à l’accès au registre », l’atteinte au droit au respect de la vie privée ne pouvait pas être regardée comme proportionnée au but d’intérêt général poursuivi par le législateur. Elle a ainsi relevé en particulier que le registre était « destiné à recueillir et à conserver pendant plusieurs années des données précises et détaillées relatives à un grand nombre de personnes physiques débitrices », qu’il pouvait « être consulté à de très nombreuses reprises et dans des circonstances très diverses », que les établissements et organismes financiers étaient autorisés « à utiliser les informations collectées lors de la consultation du registre dans des systèmes de traitement automatisé de données » et que « le législateur n’a pas limité le nombre de personnes employées par ces établissements et organismes susceptibles d’être autorisées à consulter le registre ».
Exprimant ses regrets face à la censure du RNCP, le ministre chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation, Benoît Hamon, a indiqué le 19 mars, au cours d’une conférence de presse, que « aussi bien à l’Assemblée nationale qu’au Sénat et au gouvernement », on allait « réfléchir à d’autres mesures pour compenser la décision du Conseil constitutionnel ».