Médecins du monde a réalisé une enquête en 2010 pour apprécier l’effectivité de la prise en charge des patients en situation de précarité par les permanences d’accès aux soins de santé (PASS) (1). La situation de 37 permanences généralistes, implantées dans 23 villes où intervient l’association, a été passée au crible. Seules huit d’entre elles accueillent tous les publics en situation de précarité, y compris les personnes sans droits potentiels à l’assurance maladie ou à l’aide médicale de l’Etat (AME) et celles disposant d’un visa de tourisme, qui n’ont pas d’assurance maladie dans leur pays d’origine et ont l’intention de résider en France.
A contrario, 14 PASS ne reçoivent que les patients éligibles à l’assurance maladie ou à l’AME, pour lesquels les coûts pourront être rapidement recouvrés. Entre ces deux cas de figure, il existe d’autres modalités de travail plus ou moins restrictives et, au final, une tendance fréquente à réorienter les patients vers les structures associatives - dont Médecins du monde -, notamment « pour assurer la surveillance médicale en attendant l’ouverture des droits ». Autrement dit, « alors que les PASS constituent le seul dispositif permettant, en théorie, l’accès intégral aux soins pour les personnes démunies et dépourvues de protection maladie », cet accueil inconditionnel est loin d’être la règle. Quant aux mineurs, qui sont immédiatement éligibles à l’AME dès leur entrée sur le territoire, leur accès aux soins ne se révèle pas non plus systématiquement garanti.
Il existe une importante diversité de moyens et de modes d’organisation : certaines PASS ont des locaux et du personnel dédiés, d’autres pâtissent de ressources humaines et matérielles largement insuffisantes. Si la plupart des permanences sont dotées d’au moins un assistant de service social à temps plein, « qui a un rôle pivot dans le dispositif », on observe globalement un manque de personnel médical. Trop peu de moyens sont, par ailleurs, alloués à la formation des professionnels hospitaliers (non spécifiques aux PASS) pour lesquels le niveau de connaissance du dispositif, de son fonctionnement et de son rôle reste insuffisant. En outre, faute de signalétique adaptée, il est parfois difficile aux personnels comme aux patients de savoir où se situe la PASS dans l’hôpital.
En matière de remise des médicaments, les procédures ne sont pas toujours pratiques et opérationnelles - ni même connues par le service prescripteur -, ce qui amène certains patients à quitter l’établissement avec une ordonnance à honorer. Il existe aussi des cas où les patients reçoivent a posteriori la facture de leurs soins et traitements.
Enfin, d’un point de vue financier, les budgets, trop faibles, ne permettent pas de couvrir l’ensemble des besoins. Aussi, Médecins du monde souligne la nécessité de réévaluer les crédits destinés aux PASS, mais aussi de s’assurer qu’ils leur soient effectivement attribués. En effet, au vu des enjeux de gestion des établissements hospitaliers, « la prise en charge des publics en situation de précarité n’est pas toujours une préoccupation majeure » et les PASS « sont parfois perçues comme un instrument de recouvrement financier ». Garantir « le fléchage le plus strict » des crédits accordés aux hôpitaux pour les PASS est aussi une recommandation de la sénatrice (Groupe écologiste) Aline Archimbaud, qui a remis en septembre 2013 un rapport au Premier ministre sur « L’accès aux soins des plus démunis » (2).
(1) « Etat des lieux des permanences d’accès aux soins de santé dans 23 villes où Médecins du monde est présent » - Août 2010 - Rapport disponible sur
(2) Voir ASH n° 2826 du 27-09-13, p. 10.