Quelques mois après la remise au ministre de l’Intérieur du rapport parlementaire sur la réforme du dispositif de l’asile (1) et dans l’attente de la présentation, prévue en avril, du projet de loi en conseil des ministres, Forum réfugiés-Cosi rend publiques ses revendications.
L’enjeu est d’« assurer à toute personne qui sollicite de la République une protection internationale des conditions d’accueil dignes, une procédure d’asile rapide et juste, et un accompagnement adapté depuis le premier accueil jusqu’à l’insertion dans la société », souligne l’association. Des objectifs, déclinés en « 13 axes d’amélioration », qui rejoignent ceux de la Coordination française pour le droit d’asile, qui avait présenté ses propositions fin février (2) et s’était montrée très critique sur certaines orientations du rapport parlementaire.
Pour Forum réfugiés, qui précise, non sans pointer ses divergences, que plusieurs de ses propositions font « écho » à ce rapport, l’objectif est aussi de conserver « la spécificité d’approche que requiert l’accompagnement du public en quête de protection internationale ». Elle demande la réduction des délais d’accès à la procédure et soutient la proposition du rapport parlementaire de supprimer l’exigence d’une domiciliation. Mais « cette simplification ne sera cependant possible que lorsque tous les demandeurs d’asile seront hébergés », précise-t-elle. Et dans le cas où la domiciliation sera nécessaire, « le maintien d’un système de domiciliation spécifique s’impose ». D’autres acteurs préféreraient l’application du droit commun à ce public.
L’association souhaite aussi un renforcement des droits des demandeurs d’asile à la frontière, de meilleures conditions d’accès à la procédure en rétention et la délivrance aux demandeurs placés en procédure prioritaire d’une autorisation provisoire de séjour. Elle recommande, par ailleurs, la révision des modalités d’application de la notion de « pays d’origine sûrs », afin qu’elle ne soit pas utilisée « à des fins de gestion des flux migratoires ».
Une série des préconisations est consacrée au renforcement de la protection des personnes vulnérables. Toute démarche visant à établir un dispositif de détection des vulnérabilités médicales et psychologiques, telle qu’évoquée dans le rapport parlementaire, doit être précédée d’« un travail conjoint des différents acteurs impliqués dans l’accompagnement des demandeurs d’asile et des professionnels de santé », insiste l’association. Les mineurs isolés étrangers doivent, quant à eux, « être exclus du champ d’application de la zone d’attente ».
L’association préconise un parcours d’accueil en plusieurs étapes : après s’être présenté en préfecture afin d’être admis au séjour, chaque demandeur devrait être orienté vers une « plateforme d’accueil multi-services », qui établirait un diagnostic permettant d’identifier les personnes vulnérables. Le demandeur (qui serait hébergé temporairement dans un « centre de transit ») se verrait ensuite proposer une place dans le dispositif d’hébergement, régulé à la fois sur le plan national et régional. Selon Forum-réfugiés, 10 000 nouvelles places sont nécessaires en centres d’accueil pour demandeurs d’asile et tout demandeur doit être accueilli dans un dispositif qui associe l’hébergement et l’accompagnement social et juridique. Une proposition qui diverge du rapport parlementaire, qui suggère une dissociation de ces prestations. Forum réfugiés-Cosi demande également une revalorisation de l’allocation temporaire d’attente et sa modulation selon la composition familiale.
Elle formule, par ailleurs, plusieurs propositions pour renforcer l’intégration des bénéficiaires d’une protection internationale et demande l’augmentation et la clarification du financement des centres provisoires d’hébergement. Quant aux centres dédiés aux déboutés, préconisés par le rapport parlementaire, leur « éventuelle création […] doit être précédée d’une évaluation précise des expériences européennes similaires, tant du point de vue de leur pertinence dans le cadre d’une politique de retour que du respect des droits fondamentaux des personnes déboutées et de leur famille ».
(1) De la sénatrice (centriste) Valérie Létard et du député (PS) Jean-Louis Touraine - Voir ASH n° 2836 du 6-12-13, p. 13.
(2) Voir ASH n° 2849 du 28-02-14, p. 21.