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La loi « ALUR » adoptée définitivement par le Parlement

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Rapports locatifs, encadrement des loyers, garantie universelle des loyers attribution des logements sociaux, prévention des expulsions locatives, droit au logement opposable, domiciliation… Rapide tour d’horizon des principales dispositions de la nouvelle loi, sous réserve de la décision du Conseil constitutionnel.

C’est la grande loi-cadre promise depuis des mois par Cécile Duflot pour répondre à la crise du logement. La loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové – dite loi « ALUR » – a été adoptée définitivement le 20 février par le Parlement, après avoir été considérablement enrichie au cours des débats. Elle touche, au final, à tous les maillons de la chaîne du logement. Mais, avant d’entrer en vigueur, ce texte fleuve de 177 articles va devoir passer l’épreuve du Conseil constitutionnel, saisi par des députés et des sénateurs de l’opposition.

De nouvelles règles autour du contrat de location

Le premier volet du texte vise à améliorer les relations entre propriétaires et locataires dans le parc privé et modifie en conséquence de nombreux articles de la loi « Mermaz » du 6 juillet 1989, qui régit les rapports locatifs. Une loi dont le champ d’application est, au passage, modifié avec l’introduction de la notion de « résidence principale », qui s’entend de l’occupation du logement « au moins huit mois par an, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure, soit par le [locataire] ou son conjoint, soit par une personne à charge au sens du code de la construction et de l’habitation ».

Contrat de location, état des lieux, pièces justificatives, délais de préavis, frais d’agence, colocation… les nouvelles règles sont nombreuses. On retiendra notamment que, pour améliorer la transparence, la loi impose désormais aux parties d’établir le bail conformément à un contrat de location type, qui sera défini par décret et devra comporter de nouvelles mentions obligatoires. Elle renvoie également à un décret le soin de définir la liste exhaustive des pièces justificatives qu’un bailleur pourra exiger du candidat à une location ou de sa caution, inversant ainsi la logique puisque, jusqu’à présent, la loi déterminait une liste de justificatifs que les propriétaires n’avaient pas le droit de demander à un possible locataire. Celui qui exigera des pièces non prévues par le décret pourra se voir infliger une amende administrative.

Le délai de préavis minimum imposé au locataire qui souhaite quitter son logement sera par ailleurs, non plus de trois mois, mais de un mois en zone tendue ainsi que pour tout locataire s’étant vu attribuer un logement social et pour les bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés.

A noter, encore : le gouvernement devra remettre au Parlement, dans les six mois suivant la promulgation de la loi « ALUR », un rapport sur l’opportunité de réviser le décret du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent (1), « notamment sur la possibilité d’une évolution de la définition du seuil minimal de surface habitable en deçà duquel un logement est considéré comme indécent et d’une intégration de la performance énergétique parmi les caractéristiques du logement décent ».

Encadrement des loyers

Plusieurs articles de la loi du 6 juillet 1989 sont également modifiés afin d’« encadrer durablement les loyers ». Après la publication, l’été dernier, d’un décret portant sur ce thème, qui ne visait qu’à répondre à l’urgence en limitant les hausses excessives (2), la loi « ALUR » entend ainsi créer un dispositif plus ambitieux, réservé aux zones dites « tendues », c’est-à-dire où il existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements. 28 agglomérations de plus de 50 000 habitants sont concernées. Sur ces territoires – qui devront être dotés d’un observatoire local des loyers –, les préfets de département fixeront chaque année, par arrêté, un loyer au mètre carré de référence fixé à partir de la médiane des loyers observés pour la catégorie de bien (studio, deux-pièces, etc.) et le quartier concernés. Les loyers ne pourront dépasser ce loyer majoré de 20 % pour les relocations ou nouveaux baux. A l’inverse, le loyer sera considéré comme sous-évalué s’il est en dessous du loyer de référence minoré de 30 %. Un « complément de loyer exceptionnel » pourra par ailleurs s’ajouter au loyer de base pour des logements présentant des caractéristiques de localisation ou de confort exceptionnelles par leur nature et leur ampleur par comparaison avec les logements de même catégorie situés dans le même secteur géographique. Mais le locataire pourra le contester auprès de la commission départementale de conciliation dans les trois mois suivants la signature du bail.

D’après la ministre du Logement, « on peut estimer qu’en Ile-de-France, un locataire sur quatre emménageant au moment de l’entrée en vigueur du dispositif verra le loyer abaissé et ramené dans la fourchette ».

Garantie universelle des loyers

C’est une des mesures emblématique de la loi « ALUR » et elle aura beaucoup évolué au cours des débats : afin, notamment, de rassurer les bailleurs contre le risque d’impayés, un dispositif de « garantie universelle des loyers » (GUL) va être mis en place sur l’ensemble du parc privé, meublés compris. Les logements loués ou gérés par un organisme de maîtrise d’ouvrage d’insertion ou un organisme qui exerce les activités d’intermédiation locative ou de gestion locative sociale seront également couverts par le nouveau dispositif. Cette GUL sera gratuite et publique. Elle sera gérée par une agence d’Etat, qui sera créée d’ici au 1er janvier 2016, date d’entrée en vigueur prévue du dispositif. Concrètement, les propriétaires des impayés de loyers seront protégés pendant une durée maximale de 18 mois dans la limite d’un loyer médian de référence et après une franchise d’une durée minimale de un mois. Tous les baux privés qui seront signés à compter du 1er janvier 2016 pourront automatiquement être garantis par la GUL. Mais le dispositif, bien que proposé par défaut dans le contrat de location, ne sera pas pour autant obligatoire. Les bailleurs pourront en effet expressément choisir une autre solution dans le bail (application du système de cautionnement actuel ou souscription d’une assurance). Le cumul de la caution et de la GUL sera interdit, sauf en cas de location à des étudiants ou des apprentis. Des organismes agréés par la future agence, dénommés « centres de gestion agréés », seront chargés de la mise en œuvre de la GUL. Autrement dit, de traiter les déclarations d’impayés présentées par les bailleurs, proposer au locataire un plan d’apurement de ces impayés, l’orienter le cas échéant pour bénéficier d’un accompagnement social financé par l’agence… Notons que cette dernière aura la possibilité de procéder à un effacement – partiel ou total – de la dette du locataire à son égard en fonction de difficultés particulières économiques ou sociales.

Mesures d’ordre social

La loi « ALUR » ne s’intéresse pas qu’aux rapports locatifs dans le parc privé. Elle réforme également le système d’attribution des logements sociaux sur deux plans : en posant le principe d’un droit à l’information pour tout demandeur de logement social, d’une part, et, d’autre part, en inscrivant dans la loi deux mesures permettant de simplifier les démarches des demandeurs (le dépôt d’une demande en ligne et la constitution d’un dossier unique accessible par l’ensemble des bailleurs et réservataires présents sur le territoire). Autre nouveauté à signaler : les « surloyers de solidarité » acquittés par les locataires du parc social bénéficiant d’un logement pour lequel ils dépassent les plafonds de ressources exigés pourront servir à réduire les loyers des ménages connaissant des difficultés économiques sociales.

Un autre pan du texte est consacré à l’amélioration du parc existant, avec en particulier des mesures ciblant les marchands de sommeil ou bien encore visant à enrayer le phénomène des copropriétés dégradées. Tandis qu’une autre série d’articles tend à favoriser le développement de « formes d’habitat alternatives » (habitat participatif, habitat léger ou mobile).

Mais on retiendra aussi deux chapitres intéressant plus particulièrement les acteurs de l’insertion par le logement et concrétisant des engagements pris par le gouvernement dans le cadre du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale du 21 janvier 2013 (3). Le premier vise à « faciliter les parcours de l’hébergement au logement », avec au menu des évolutions législatives concernant tant les services intégrés d’accueil et d’orientation (SIAO) – que la loi consacre juridiquement – que le droit au logement opposable (DALO), dont le législateur a voulu renforcer l’effectivité. La loi donne par exemple la possibilité aux commissions de médiation de saisir le juge afin de demander des délais lorsqu’un demandeur menacé d’expulsion est reconnu prioritaire au titre du DALO. Au menu également : des mesures de simplification des procédures de domiciliation qui, pour mémoire permettent aux personnes sans domicile stable d’accéder à des droits et des prestations sociales. Jusqu’à présent, en plus des règles de droit commun, il en existait des spécifiques pour, d’une part, faire une demande d’admission au séjour au titre de l’asile et, d’autre part, faire une demande d’aide médicale de l’Etat (AME). Si la loi « ALUR » maintient finalement celles pour les demandeurs d’asile – le sujet devrait être traité dans le cadre de la prochaine reforme du droit d’asile –, elle aligne en revanche sur les règles de droit commun les dispositions relatives aux bénéficiaires de l’AME. Au passage, elle aligne l’exercice des droits civils sur le droit commun, le lieu d’exercice des droits civils d’une personne sans domicile stable devenant ainsi celui où elle a fait élection de domicile.

Un autre chapitre de la loi vise à renforcer les dispositifs de prévention des expulsions locatives. Des évolutions législatives sont ainsi prévues pour, notamment, traiter les impayés le plus en amont possible ou bien encore renforcer le rôle des commissions de coordination des actions de prévention des expulsions locatives. La trêve hivernale des expulsions est par ailleurs allongée de 15 jours et ira désormais du 1er novembre au 31 mars, y compris pour les « occupants sans droit ni titre ».

Nous reviendrons plus en détails sur la loi « ALUR » dans un prochain numéro.

[Loi à paraître]
Notes

(1) Voir ASH n° 2249 du 8-02-02, p. 9.

(2) Voir ASH n° 2771 du 24-08-12, p. 12.

(3) Voir ASH n° 2794 du 25-01-13, p. 39.

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