Après avoir déploré, fin novembre, les orientations du rapport de la sénatrice (centriste) Valérie Létard et du député (PS) Jean-Louis Touraine (1), la Coordination française pour le droit d’asile (CFDA) rend publiques ses recommandations « pour une réforme d’envergure » du dispositif de l’asile. Un projet de loi initialement prévu pour la fin 2013, qui pourrait finalement être présenté en conseil des ministres en avril prochain et être examiné au Parlement à la rentrée.
Les membres de la CFDA (2) rappellent les principes qui doivent guider, selon eux, la réforme : faire primer la logique de protection fondée sur le respect du droit international, simplifier la procédure « dans l’intérêt exclusif des demandeurs » et renforcer les garanties tout au long de l’instruction. Premier axe pour atteindre cet objectif : assurer le « droit à un accès effectif à la procédure et à la qualité de l’examen de la demande ». Si elle soutient la proposition du rapport parlementaire de supprimer l’exigence d’une domiciliation pour l’admission au séjour des demandeurs d’asile, la CFDA souhaite que cette disparition s’accompagne d’un accès plus rapide aux droits grâce au recours à la domiciliation de droit commun. Elle demande également la fin des dérogations au principe d’admission au séjour, notamment pour les personnes soumises à la « procédure Dublin ». Si les examens accélérés doivent être maintenus, ajoute-t-elle, il devrait appartenir à l’OFPRA (Office français de protection des réfugiés et apatrides), et non à la préfecture, de décider de leur mise en œuvre. Le gouvernement doit aussi, préconise-t-elle, revenir sur la régionalisation de l’admission au séjour qui oblige les demandeurs à déposer leur demande en préfecture de région. L’organisation s’inquiète, par ailleurs, des conséquences de la dématérialisation de la saisine de l’OFPRA à partir des préfectures, telle que préconisée par le rapport. Cette option ne pourrait être retenue qu’en cas de moyens suffisants pour accompagner les demandeurs, estime-t-elle.
Deuxième volet de revendications : le respect du choix du demandeur et l’accès aux droits sociaux. Alors que le rapport propose un système d’orientation fondé sur le « respect d’un équilibre entre les régions », les associations souhaitent préserver le libre choix du lieu d’hébergement, au sein d’un dispositif qui doit assurer un accompagnement juridique social. La CFDA demande également l’instauration d’un droit au travail « effectif et sans opposabilité à la situation de l’emploi ». Elle souhaite que le bénéfice de l’allocation temporaire d’attente ne soit pas lié au choix d’un type d’hébergement et s’oppose au transfert de la gestion de cette prestation à l’OFII (Office français de l’immigration et de l’intégration).
Troisième axe : le droit aux soins et à un accompagnement adapté. Pour la CFDA, le rapport parlementaire, en proposant une procédure d’évaluation des vulnérabilités sociales, médicales et psychologiques, « entretient la confusion entre ce qui relève d’un nécessaire accompagnement sanitaire et social » et ce qui pourrait devenir un outil de « tri des demandes ». Elle juge que cette évaluation doit revenir à des professionnels de santé ou du social, et non à l’OFII, dans une approche pluridisciplinaire, avec le seul objectif d’orienter les personnes vers une prise en charge adaptée.
Dans un dernier chapitre de revendications, la CFDA demande d’améliorer l’intégration des bénéficiaires d’une protection internationale. Le dispositif des centres provisoires d’hébergement, « qui compte 28 centres pour une capacité totale de 1 083 places », est largement sous-dimensionné, relève-t-elle. Elle s’oppose fermement à la création d’un dispositif de restriction de liberté destiné aux demandeurs déboutés.
(1) Voir ASH n° 2836 du 6-12-13, p. 13 et 22.
(2) Parmi lesquels Amnesty International France, le Centre Primo-Levi, la Cimade, le Comede, le GISTI, la Ligue des droits de l’Homme, Médecins du monde, ou encore le Secours catholique.