Lors d’un déplacement le 12 février à Angers, le Premier ministre a présenté plus précisément l’avant-projet de loi d’orientation et de programmation pour l’adaptation de la société au vieillissement, qui déçoit le secteur (voir ce numéro, page 11). Cette journée a aussi permis à Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé, et à Michèle Delaunay, ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l’autonomie, de clore la concertation lancée en novembre dernier pour la préparation de ce texte. « Le gouvernement a fait le choix d’une loi d’orientation et de programmation, inscrivant la totalité de la politique de l’âge dans un programme pluriannuel et transversal, embrassant toutes les dimensions de l’avancée en âge et confortant le choix d’un financement solidaire de l’accompagnement de la perte d’autonomie. L’action qui s’engage sera [ainsi] globale, pérenne et mobilisera la société toute entière », précise le rapport annexé à l’avant-projet de loi. Ce document présente les orientations de l’ensemble des politiques publiques devant contribuer à répondre au défi de la révolution de l’âge et est structuré autour de quatre axes : « l’anticipation et la prévention », « l’adaptation de la société au vieillissement », « l’accompagnement de la perte d’autonomie » et « la gouvernance nationale et locale des politiques de l’autonomie ». Comme le texte de loi, ce rapport sera soumis à l’approbation des parlementaires.
Figurent aussi en annexe de l’avant-projet de loi quatre plans thématiques : un plan national d’action pour une politique du médicament adaptée aux besoins des personnes âgées, un plan pour les métiers de l’autonomie, un plan de lutte contre le suicide des âgés et un plan promouvant les activités physiques. Selon les services de Michèle Delaunay, ces plans « ont valeur administrative », leur date d’entrée en vigueur étant donc « indépendante de la loi », sans autre précision sur cette date.
Rappelons que le projet de loi, qui doit être présenté en conseil des ministres le 9 avril, ne concerne que les mesures relatives au maintien au domicile, qui devraient s’appliquer dès 2015. Ce premier volet sera financé à hauteur de 645 millions d’euros issus de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie. Les mesures sur les établissements, elles, seront mises en œuvre dans la seconde partie du quinquennat (voir encadré, page 41).
Le gouvernement va engager un « acte II » de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) à domicile, une prestation qui, reconnaît-il dans l’exposé des motifs de l’avant-projet de loi, « connaît aujourd’hui des limites liées notamment à la saturation de nombreux plans d’aide [1] et au fait que le ticket modérateur [– part laissée à la charge de la personne âgée –] est d’autant plus élevé que les besoins d’aide sont importants. Cette situation peut générer, pour les personnes âgées qui n’ont pas la possibilité de mobiliser un patrimoine ou la solidarité familiale, un non-recours aux aides nécessaires ou une entrée non choisie en établissement d’hébergement. » Pour y remédier, il est proposé de revaloriser le plafond des plans d’aide pour l’ensemble des bénéficiaires et d’améliorer l’accès à l’APA en diminuant leur ticket modérateur. Au total, un peu plus de 375 millions d’euros seront consacrés à la réforme de l’APA. Les démarches pour y accéder seront par ailleurs facilitées.
L’avant-projet de loi revalorise le plafond mensuel des plans d’aide de l’APA pour l’ensemble des bénéficiaires, quel que soit leur niveau de dépendance. En 2015, il devrait ainsi s’établir à :
→ plus de 1 700 € pour les personnes âgées en groupe iso-ressources (GIR) 1, contre 1 305 € aujourd’hui ;
→ près de 1 380 € pour les personnes âgées en GIR 2, contre 1 118 € ;
→ près de 1 000 € pour les personnes âgées en GIR 3, contre 838 € ;
→ 665 € pour les personnes âgées en GIR 4, contre 560 €.
« Concrètement, a expliqué Jean-Marc Ayrault, cela permettra aux allocataires de l’APA d’avoir davantage d’heures d’aide à domicile ou de compléter par des aides techniques, en répondant ainsi mieux à leurs besoins et en contribuant à soulager leurs proches aidants. »
Le texte entend aussi alléger le reste à charge pour les plans d’aide les plus lourds (2), en introduisant le principe d’une modulation de la participation financière du bénéficiaire en fonction du montant du plan d’aide et de ses ressources, précise l’exposé des motifs. Le Premier ministre a expliqué que, « pour la part du plan comprise entre 350 et 550 €, le ticket modérateur […] pourra baisser jusqu’à 60 % par rapport à son niveau actuel. Un plan d’aide de 500 € avec un niveau de ressources mensuelles de 1 500 € verra ainsi son ticket modérateur passer de 157 € (110 € pour la part du plan d’aide inférieure à 350 € et 47 € pour la part du plan d’aide située entre 350 et 500 €) à 132 € (110 € pour la part du plan d’aide inférieure à 350 € et 19 € pour la part du plan d’aide située entre 350 et 500 €). » « Pour la part du plan d’aide allant au-delà de 550 €, la baisse pourra atteindre 80 % », a-t-il ajouté, illustrant son propos comme suit : « un plan d’aide de 700 € avec un niveau de ressources de 1 500 € verra ainsi son ticket modérateur passer de 220 € à 162 € ». En outre, a assuré Jean-Marc Ayrault, les bénéficiaires de l’allocation de solidarité aux personnes âgées n’acquitteront plus de ticket modérateur. Selon le ministère délégué chargé des personnes âgées et de l’autonomie, « près de 600 000 bénéficiaires de l’APA (soit 86 %) sont gagnants et percevront en moyenne 50 € de plus par mois, soit 600 € par an. Il n’y a strictement aucun perdant à cette réforme », a-t-il assuré.
( A noter ) Toujours pour faciliter le recours aux aides proposées dans le cadre de l’APA, l’avant-projet de loi permet à ses titulaires ainsi qu’aux départements de recourir au chèque emploi-service universel pour payer les prestations et au paiement direct des prestataires de services à domicile.
Par ailleurs, le gouvernement s’engage pour une « APA plus qualifiée, grâce à la professionnalisation des aides à domicile, à l’amélioration de leurs conditions de travail, à la lutte contre la précarisation des salariés et à une meilleure prise en compte de leurs frais professionnels ». Pour ce faire, 25 millions d’euros y seront consacrés chaque année. En pratique, a précisé Michèle Delaunay, il s’agira d’« améliorer la situation financière des intervenants à domicile pour les plus bas salaires [3] et de mieux valoriser leurs déplacements [4], qui font partie intégrante de leur activité ».
Le texte présenté par le gouvernement prévoit de créer dans l’APA à domicile un module dédié au « droit au répit » pour financer l’accès à des solutions temporaires permettant aux « aidants les plus isolés des personnes les moins autonomes » de « souffler ». En pratique, « il s’agit de mieux prendre en compte les aidants, leurs interventions, le cas échéant leur vulnérabilité et leurs besoins de soutien (repérage des signes de fragilité, besoins de conseils, d’accompagnement, de répit), au moment de l’évaluation des demandes d’APA afin d’en tenir compte dans l’élaboration des plans d’aide et leur proposer, si nécessaire, des relais ou des actions d’accompagnement » (5), explique le ministère délégué chargé des personnes âgées. Précisant que cette aide au répit « pourra aller jusqu’à 500 € annuels au-delà du plafond de l’APA ». Cette enveloppe devrait permettre, par exemple de « financer l’équivalent de 15 jours en accueil de jour (pour un tarif journalier moyen de l’ordre de 30 €), qui peuvent être ou non répartis dans l’année ». Ou encore de « renforcer temporairement l’aide à domicile (environ 25 heures supplémentaires, à répartir en fonction des besoins) pour permettre à la personne aidée de rester à son domicile pendant que son aidant fait une “pause” ».
Un dispositif d’urgence en cas d’hospitalisation de l’aidant devrait également être mis en place afin de prendre en charge temporairement la personne aidée au-delà des montants et du plafond des plans d’aide.
Toujours en matière d’offre de répit, l’avant-projet de loi prévoit l’« expérimentation de prestations de relais à domicile assurées par un professionnel intervenant plusieurs jours consécutifs (dit “baluchonnage”) et le déploiement des plateformes d’accompagnement et de répit ».
Toutes ces mesures seront financées à hauteur de 80 millions d’euros. L’Etat octroiera, chaque année, 5 millions d’euros à la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) pour l’aider à financer ses actions de soutien et d’accompagnement des aidants. En ce domaine, a souligné Michèle Delaunay, « toutes les formes d’accompagnement, dès lors qu’elles auront fait la preuve de leur pertinence, devront être encouragées : les lieux de parole, d’écoute et d’échange entre pairs, les cafés des aidants… ».
L’avant-projet de loi prévoit d’instaurer, en faveur des ménages les plus modestes, une nouvelle aide permettant de solvabiliser l’accès aux aides techniques et aux actions collectives. Une aide qui devrait être accordée sous conditions de ressources et quel que soit le niveau de perte d’autonomie, en complément du plan d’aide mis en place par les conseils généraux dans le cadre de l’APA ou par les caisses de retraite dans le cadre de leur action sociale.
A cet effet, 140 millions d’euros seront débloqués et gérés par des « conférences départementales des financeurs de la prévention et de la perte d’autonomie » qui doivent aussi être créées par la future loi. Présidée par le conseil général, cette nouvelle instance devrait réunir obligatoirement les représentants de la caisse de retraite, de la caisse primaire d’assurance maladie, de l’agence régionale de santé (ARS) et de l’Agence nationale de habitat (ANAH). Elle sera chargée de programmer les dépenses de prévention au niveau départemental, « après intervention des aides légales et réglementaires », souligne l’exposé des motifs. Précisant que, « afin que les financements ainsi accordés correspondent aux besoins locaux, la conférence [devra établir] un programme coordonné à partir du recensement des besoins sur la base des schémas de programmation existants ». Concrètement, ces conférences des financeurs devront faciliter l’accès aux aides techniques individuelles, « notamment en soutenant des modes d’achat groupé ou de mise à disposition », programmer les aides correspondant au « forfait autonomie » destiné aux foyers-logements (voir ci-dessous) ainsi que soutenir des actions de prévention mises en œuvre par les services d’aide à domicile.
Sur la base du rapport du groupe de travail sur les établissements d’hébergement pour personnes âgées mis en place par Michèle Delaunay (6), le gouvernement entend « donner un nouveau souffle aux foyers-logements » – rebaptisés à cette occasion « résidences autonomie » – afin qu’ils deviennent une « alternative souhaitée aux maisons de retraite médicalisées quand l’âgé est plus autonome que dépendant ». Pour ce faire, il est prévu de créer un forfait « autonomie » pour renforcer la mission de prévention de la perte d’autonomie de ces structures que l’avant-projet de loi réaffirme par ailleurs (7). Pour la ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l’autonomie, le forfait « autonomie » servira à financer des dépenses non médicales, telles que des actions de prévention individuelles ou collectives visant à maintenir ou à entretenir les facultés sensorielles, motrices et psychiques, et à repérer les difficultés sociales des résidents. Ou encore des actions de promotion des comportements de nature à prévenir la perte d’autonomie (nutrition, mémoire, activités physiques…). En pratique, a expliqué Michèle Delaunay, le forfait autonomie permettra soit de recruter des professionnels de l’animation, formés à l’accompagnement des publics présentant des fragilités psychologiques et sociales, « au besoin mutualisés, en charge de l’organisation et de la mise en oeuvre de la mission de prévention de l’autonomie, soit de financer des intervenants externes réalisant des animations ou proposant des ateliers de prévention ».
Chaque année, la CNSA attribuera 40 millions aux conseils généraux pour financer ce forfait autonomie, des fonds qui seront gérés dans le cadre de la « conférence des financeurs » (voir ci-dessus).
( A noter ) Le gouvernement attribuera exceptionnellement 50 millions d’euros sur 3 ans, dont 10 millions d’euros dès 2014, au plan d’aide à l’investissement de la CNSA pour rénover le parc actuel des logements-foyers.
Pour le gouvernement, l’activité des services d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD) des personnes âgées ou handicapées nécessite une action de régulation et de protection, aujourd’hui matérialisée par le régime soit de l’autorisation, soit de l’agrément, avec un droit d’option entre ces deux régimes. C’est tout l’objectif du chantier dit de la refondation de l’aide à domicile qui a vocation à « sécuriser le financement de cette activité et à conforter un cahier des charges de missions opposables aux services et comprenant des exigences de qualité et de diversification de services ainsi qu’une plus forte professionnalisation des intervenants dans la chaîne de l’accompagnement et le parcours de vie ». Aussi l’avant-projet de loi définit-il le contenu minimal des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyen conclus avec les SAAD (nombre et caractéristiques des personnes prises en charge au titre d’une année, objectifs poursuivis et moyens mis en oeuvre, objectifs de qualification professionnelle au regard des publics accompagnés et de l’organisation des services…).
Pour répondre aux difficultés financières des SAAD, des expérimentations de nouvelles modalités de tarification de ces services ont été lancées en 2012. Selon le cahier des charges initial de l’expérimentation (8), deux types de tarification sont possibles :
→ le forfait global négocié, proposé par l’Assemblée des départements de France et le Collectif de l’aide à domicile (9), qui se substitue à la tarification horaire (10) ;
→ la tarification horaire à la fois pour l’allocation des dotations aux services, le calibrage des plans d’aide des usagers et le calcul de leur participation.
Les expérimentations peuvent être menées par les départements volontaires dans les services d’aide à domicile, autorisés ou agréés, pour une durée de 3 ans au maximum à compter de la signature d’un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyen. La signature de ce contrat devait intervenir au plus tard le 31 décembre 2013. En janvier dernier, le gouvernement a décidé de repousser cette date limite au 31 décembre 2014 pour les expérimentations qui concernent des services intervenant auprès des personnes âgées et au 31 décembre 2015 pour celles qui concernent des services intervenant auprès des personnes handicapées (11). Selon l’avant-projet de loi, en fonction du bilan des expérimentations que le gouvernement devra présenter au Parlement au plus tard le 30 octobre 2015, le droit d’option tarifaire sera pérennisé d’ici au 1er janvier 2016.
Actuellement, un service de soins infirmiers à domicile (SSIAD) et un SAAD peuvent être regroupés au sein d’un service polyvalent d’aide et de soins à domicile (Spasad), dont les contours ont été définis par un décret du 25 juin 2004 (12). L’objectif est de coordonner les interventions des professionnels du soin et de l’aide à domicile afin d’offrir une prise en charge globale aux personnes en perte d’autonomie. Mais de nombreux obstacles juridiques freinent leur généralisation (deux régimes d’autorisation, ceux du SSIAD et du SAAD, deux régimes de tarification…) (13). Afin de les développer, le projet de texte permet aux Spasad, à titre expérimental, avec l’accord du conseil général et de l’agence régionale de santé, d’« opter pour un mode d’organisation intégratif dans lequel les besoins, les prestations de soins et d’aide apportées aux personnes sont évalués, mis en œuvre et suivis sous la coordination d’un infirmier, pour 3 ans ». Plus précisément, ont indiqué les services de Michèle Delaunay aux ASH, « l’expérimentation vise à créer les conditions permettant de faire émerger un modèle d’autorisation, de tarification, de prestation plus intégré ». Ainsi, « au travers d’un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens, les 3 partenaires (conseil général, ARS et gestionnaire) s’accordent sur les missions, la coordination, les actions de prévention financées de manière plus lisible ». Au final, « cela permettra d’accompagner les services dans leur rapprochement de l’aide et du soin et de définir au fil de l’expérimentation un modèle de “Spasad de deuxième génération” ».
L’avant-projet de loi prévoit de mettre en place un Haut Conseil de l’âge, qui prendra le relais du CNRPA (Comité national des retraités et personnes âgées), « peu visible » et qui « n’a pas tout le poids politique qu’il mérite », selon Michèle Delaunay. Cette nouvelle instance – qui sera installée auprès du Premier ministre – doit intégrer non seulement le CNRPA, mais aussi le comité « avancée en âge », présidé par Jean-Pierre Aquino, et le Comité national pour la bientraitance et les droits des personnes âgées et des personnes handicapées. Cette nouvelle instance sera chargée d’apporter aux pouvoirs publics une expertise prospective et transversale sur les questions liées au vieillissement, de contribuer à l’élaboration et à l’évaluation d’une politique globale de l’autonomie, et d’assurer la participation des retraités et des personnes âgées à l’élaboration et à la mise en œuvre de cette politique. Le Haut Conseil de l’âge pourra également faire des recommandations sur les objectifs prioritaires de la politique de prévention de la perte d’autonomie et évaluer leur mise en œuvre, en lien avec le Haut Conseil de la santé publique. Il sera également compétent pour ce qui concerne le respect des droits et la bientraitance des personnes âgées, ainsi que la bonne prise en compte des questions éthiques.
Au niveau local, la gouvernance des politiques de l’autonomie sera aussi renforcée via la création de conseils départementaux de la citoyenneté et de l’autonomie, présidés par les présidents des conseils généraux. Ils rassembleront l’ensemble des acteurs locaux concernés par les politiques locales de l’autonomie (représentants des associations de personnes âgées et de personnes handicapées, du département, des services départementaux de l’Etat, des caisses de retraite, des autorités organisatrices des transports, des bailleurs sociaux, des services gestionnaires des établissements sociaux et médico-sociaux pour personnes âgées et pour personnes handicapées…). En pratique, ces instances se substitueront aux Coderpa (comités départementaux des retraités et des personnes âgées) et aux CDCPH (comités départementaux consultatifs des personnes handicapées), qui, selon l’exposé des motifs, « n’ont pas toujours réussi à faire pleinement émerger [la participation des retraités, des personnes âgées et des personnes handicapées] dans toutes les politiques publiques et dans tous les domaines de la vie sociale ». Les missions des conseils départementaux : assurer la participation des personnes âgées et des personnes handicapées à l’élaboration, à la mise en œuvre, au développement et à la mise en cohérence des politiques de l’autonomie dans l’ensemble des champs qu’elles recouvrent, au-delà des seuls secteurs sanitaire et médico-social. « A cette fin, explique l’exposé des motifs, le conseil est informé ou consulté sur les différents outils de programmation de l’offre, sur les conventions que le département conclut avec ses partenaires et sur les rapports d’activité des services concourant à la mise en œuvre des politiques locales de l’autonomie (MDPH, services du département chargés des personnes âgées) ». Ces conseils départementaux pourront aussi faire des recommandations sur le développement de la bientraitance des personnes âgées et des personnes handicapées dans le département.
Actuellement, des maisons départementales de l’autonomie (MDA) – qui visent à réunir les services dédiés aux personnes âgées et ceux des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) – sont expérimentées (14). L’avant-projet de loi prévoit de pérenniser et de mieux définir ce nouveau mode d’organisation. Il précise en effet que, en vue de la constitution d’une MDA, le président du conseil général peut organiser la mise en commun des missions d’accueil, d’information, de conseil, d’orientation et, le cas échéant, d’instruction des demandes, d’évaluation des besoins et d’élaboration des plans d’aide au profit des personnes âgées et des personnes handicapées. Cette organisation, qui ne donnera pas lieu à la création d’une nouvelle personne morale, regrouperait la MDPH et les personnels et moyens matériels du département affectés à la politique en faveur des personnes âgées et des personnes handicapées. « Toutefois, assure l’exposé des motifs, sa mise en œuvre ne remet pas en cause l’existence de la MDPH ni celle du GIP [gestionnaire au financement de la MDPH] ».
APA. Pour favoriser l’accès à l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), le plafond mensuel des plans d’aide devrait être revalorisé pour tous les bénéficiaires, quel que soit leur niveau de dépendance.
Une modulation de leur participation financière devrait aussi être introduite pour remédier au non-recours aux prestations.
Aides techniques. Dans chaque département, une conférence des financeurs devrait être instituée pour gérer le budget dédié à la prévention de la dépendance et ainsi faciliter l’accès aux aides techniques individuelles.
Aide au répit. L’avant-projet de loi prévoit la création d’une aide au répit pour les aidants les plus isolés des personnes âgées les plus dépendantes. Une aide qui pourrait aller jusqu’à 500 € annuels au-delà du plafond de l’APA.
Spasad. Pour faciliter le développement des Spasad, devrait être expérimenté un nouveau modèle d’autorisation, de tarification et de prestation plus intégré. Objectif : mieux articuler les interventions des secteurs de l’aide à domicile et sanitaire.
« Pour des raisons de clarté et de soutenabilité financière », a rappelé Marisol Touraine, les mesures relatives à l’accompagnement et à la prise en charge des personnes âgées dans les établissements seront mises en œuvre dans la seconde partie du quinquennat. Dans cet objectif, a indiqué le Premier ministre, un groupe de travail sera installé « dès le mois de mars » pour « travailler avec les représentants des gestionnaires des maisons de retraite et les départements (qui financent ces structures au titre de l’allocation personnalisée d’autonomie) à une clarification des missions de ces établissements et à une simplification de la tarification, aujourd’hui particulièrement complexe et peu lisible ».
Signalons au passage que l’avant-projet de loi prévoit d’associer, aux côtés du ministère des Finances, le ministère délégué chargé des personnes âgées et de l’autonomie à la fixation du taux d’évolution maximum des tarifs des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes gérés par des organismes de droit privé qui ne sont pas habilités à l’aide sociale. En outre, pour le fixer, le critère du pouvoir d’achat des âgés devrait à l’avenir être pris en compte.
Parce que, « aujourd’hui, 6 % seulement des logements sont adaptés à la vie quotidienne des personnes en perte d’autonomie », le gouvernement s’est engagé à investir 250 millions d’euros pour adapter 80 000 logements aux contraintes de l’âge et du handicap d’ici à 2017. Dans ce cadre, l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) et la caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), qui proposent actuellement aux personnes âgées les plus modestes des aides qui peuvent prendre en charge – en fonction de leurs ressources – jusqu’à 100 % du coût des travaux d’adaptation, devraient « diviser par deux le délai moyen de traitement d’un dossier (6 mois aujourd’hui) », a-t-il indiqué. Précisant que « les dossiers requérant une instruction urgente [par exemple, en raison d’un retour à domicile après hospitalisation] seront signalés afin de rendre leur traitement prioritaire pour l’opérateur puis pour la CNAV et l’ANAH ». En outre, la liste des travaux financés par la CNAV sera révisée afin de mieux la faire coïncider avec l’évolution des gérontechnologies et de prendre en compte les nouvelles formes de domotique.
Par ailleurs, est programmée la mise en place d’un microcrédit pour aider les propriétaires modestes « qui n’ont pas accès au crédit bancaire classique et dont les travaux ne sont pas totalement couverts par les aides de la CNAV et de l’ANAH » à financer leurs travaux d’adaptation. Ce nouveau dispositif sera financé, en 2015, à hauteur de 4 millions d’euros issus de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie.
Enfin, depuis 2005, les propriétaires et les locataires peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt pour des dépenses engagées dans leur résidence principale et destinées à adapter leur logement. Le Premier ministre a annoncé que ce dispositif serait prorogé par la future loi de finances pour 2015. Dispositif qui ciblera les âgés et les personnes en situation de handicap. En outre, la liste des travaux éligibles à ce crédit d’impôt, en vigueur depuis presque 10 ans, sera révisée afin de permettre aux personnes âgées d’en bénéficier pour des technologies nouvelles de soutien à l’autonomie au domicile.
Encadrement des « assurances dépendance »
Le président de la République déclarait il y a un an, lors du 31e congrès de l’Uniopss : « l’assurance privée, nous ne comptons pas sur elle » même s’il n’est « pas question de l’interdire ni de s’interdire de l’encadrer ». Actuellement, l’offre assurantielle pour la prise en charge de la dépendance est « variée mais très diversifiée et inégale », estime le gouvernement. Aussi envisage-t-il de « favoriser, dans le cadre des prochaines lois de finances, les contrats les plus protecteurs qui devront respecter un cahier des charges (couvertures, modalités de revalorisation, possibilités de transfert…). Cela permettra de garantir, dans une logique de conditionnalité, une offre visible et plus sûre au bénéfice des assurés. »
Création d’un volontariat civique senior
L’avant-projet de loi institue un volontariat civique senior, ouvert aux personnes âgées de 60 ans ou plus ayant un droit ouvert dans un régime d’assurance vieillesse et qui peut être effectué auprès d’une personne morale à but non lucratif, en France ou à l’étranger. La création de ce dispositif devrait, selon l’exposé des motifs, « faciliter et fidéliser l’engagement des âgés ».
En pratique, poursuit-il, « il donne lieu à la prise en charge des frais engagés dans le cadre de la mission et, éventuellement, au bénéfice de titres-repas ».
Plus de poids pour les conseils généraux à la CNSA
Actuellement, le conseil de la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) compte deux vice-présidents désignés parmi les représentants des associations des personnes âgées et des personnes handicapées. Afin d’assurer une représentativité plus importante des conseils généraux, clairement désignés comme chefs de file de la politique de l’autonomie dans le département, il est prévu de nommer un troisième vice-président choisi parmi les représentants des départements.
Renforcement des droits des âgés
Le texte gouvernemental donne la possibilité aux personnes âgées prises en charge par le secteur social et médico-social de désigner, par écrit, une personne de confiance, qui pourra notamment être un parent, un proche ou leur médecin traitant. Une désignation qui sera révocable à tout moment. La personne de confiance sera chargée d’accompagner la personne âgée dans ses démarches et de l’aider dans ses décisions relatives à sa prise en charge. Elle sera consultée au cas où l’intéressé serait hors d’état d’exprimer sa volonté et de recevoir l’information nécessaire.
Protection des âgés et des personnes handicapées
Sur la recommandation de la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (15), l’avant-projet de loi interdit à tout établissement ou service social ou médico-social, et notamment à tout service d’aide à domicile, à toute personne liée à ce service, y compris les bénévoles, et à tout employé de maison directement salarié par une personne âgée et intervenant à son domicile, de pouvoir bénéficier des dons, legs et avantages financiers de toute nature de la part de la personne aidée, sous réserve de dispositions ayant un caractère rémunératoire ou de dispositions universelles en faveur de parents.
(1) Selon Matignon, en 2011, « un plan d’aide sur quatre était saturé (c’est-à-dire atteignait son plafond). C’était même le cas pour près de la moitié des plans d’aide pour les plus dépendants. »
(2) Aujourd’hui, le ticket modérateur est fonction des ressources et du niveau de perte d’autonomie, explique le gouvernement. « Il est nul pour les personnes disposant de ressources les plus faibles (moins de 735 € par mois) et peut atteindre 90 % du montant du plan d’aide pour les personnes disposant de plus de 3 000 € de ressources par mois. »
(3) Il va s’agir de revaloriser les coefficients des grilles de salaire pour les faire passer au-dessus du SMIC.
(4) Rappelons que le montant des indemnités kilométriques applicable au secteur de l’aide à domicile n’a pas été revalorisé depuis 2008. Et encore récemment, en octobre dernier, le ministère des Affaires sociales a refusé d’agréer un avenant à la convention collective applicable à ce secteur qui prévoyait de porter leur montant à 0,37 €/km pour une voiture (au lieu de 0,35 € aujourd’hui) et à 0,17 €/km pour un deux-roues (contre 0,15 €).
(5) « A terme, pour garantir une évaluation homogène sur le territoire, sera développé un outil d’évaluation simple, destiné aux équipes médico-sociales comme aux professionnels de santé, pour repérer les aidants en difficulté », a indiqué Michèle Delaunay.
(7) Leurs prestations-socles (accès à un service de restauration, de sécurité, d’entretien du linge…) devraient être définies par voie réglementaire.
(10) Signalons que, à la demande des ministres chargées des affaires sociales et des personnes âgées, l’inspection générale des affaires sociales a, en septembre dernier, commencé à évaluer ce modèle de tarification.
(14) Trois MDA sont actuellement expérimentées dans la Corrèze, le Cantal et la Côte-d’Or avec l’appui de la CNSA.