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Dérive en province

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C’est l’histoire d’un groupe de jeunes à la dérive, dans le Reims des années 1970. Une bourgade au ciel plombé, bourgeoise et étriquée, qui semble n’avoir rien d’autre à offrir à Ahmed, Serge, Francis, Boualem et leurs copains que l’horizon indépassable de l’ennui. Parmi eux, le narrateur, un fils de harki, grandit dans un logement social du quartier Croix-Rouge. Un appartement « simple » dans un immeuble « banal », trouvé par une assistante sociale fidèle et dévouée, alors que sa mère rêvait d’une ferme, « comme ses parents en avaient en Algérie ». Quarante ans plus tard, l’ado devenu quinquagénaire et ex-détenu – l’auteur Aïssa Lacheb – se promène dans son quartier et raconte le rituel de la fauche aux Modernes, le grand magasin de la ville, les pillages dans les blés les jours d’été, les combines à trois sous pour se procurer jeans et blousons à la mode, et les passages à Rockefeller, le commissariat central de Reims. Empreint d’une certaine tendresse pour ces années d’errances sans grandes conséquences, son récit se teinte de gravité alors que les menus larcins cèdent la place au racket, à la violence « gratuite et crapuleuse », aux cambriolages. Jusqu’au premier braquage et à la première incarcération. « Notre jeune vie commence à être gravement menacée et nous n’en prenons pas conscience ni la mesure, écrit Aïssa Lacheb. Nous semblons tous avoir dans le cœur comme une infinie lassitude. » Comment comprendre une telle dérive ? L’auteur n’apporte pas de réponse toute faite. Tout juste évoque-t-il une loi impitoyable apprise sur le tas. « Parce qu’on aurait un fond enfoui en soi et ignoré de soi de gentillesse, de dignité et de respect […], on devrait toujours échouer et se voir refusé de partout et par tous. Parce que seule la violence induirait la récompense et donnerait des droits. » Quarante ans plus tard, tous les amis d’Aïssa Lacheb sont morts ou partis. Restent le « désarroi immense du quartier » et sa « clameur effrayante ». « Dieu en soit garde », dit pourtant la devise de Reims.

Dieu en soit garde

Aïssa Lacheb – Ed. Au Diable Vauvert – 15 €

Culture

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