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Le Conseil de l’Europe épingle la France sur la scolarisation des enfants autistes

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Saisi en avril 2012 par l’Action européenne des handicapés, le Conseil de l’Europe a de nouveau épinglé la France pour non-respect de ses obligations inscrites dans de la Charte sociale européenne vis-à-vis des enfants et des adolescents atteints d’autisme. Près de dix ans après une première condamnation (1), le Comité des droits sociaux du Conseil de l’Europe a en effet conclu, dans une décision du 11 septembre dernier rendue publique le 5 février (2), que l’Etat français violait l’article 15 de la charte (droit des personnes handicapées à l’autonomie, à l’insertion sociale et à la participation à la vie de la communauté), lu seul ou en combinaison avec l’article E (non-discrimination).

Seuls 20 % des enfants sont scolarisés

Les 15 experts indépendants du comité concluent tout d’abord, à l’unanimité, à la violation de l’article 15§1 de la charte. Il considère en effet que le droit à la scolarisation en priorité dans les établissements de droit commun et le droit à la formation professionnelle des enfants et des adolescents autistes ne sont pas garantis. Selon les données chiffrées fournies par le gouvernement français, en 2012, encore 80 % des enfants autistes n’étaient pas scolarisés (contre 90 % dix ans auparavant). Et le nombre d’enfants atteints d’autisme diminue significativement à chaque étape de la scolarisation obligatoire : 87 % en primaire, 11 % au collège, pour atteindre 1,2 % au lycée (soit 553 élèves pour l’année scolaire 2011-2012). Enfin, 90 % de jeunes autistes âgés de 16 à 19 ans ne bénéficient d’aucune forme de poursuite de scolarisation. Le comité pointe notamment « plusieurs déficiences » dans le dispositif des auxiliaires de vie scolaire (AVS), que le gouvernement français ne réfute pas : nombre insuffisant d’AVS ; refus abusifs des établissements de droit commun d’accueillir des enfants autistes s’ils ne sont pas accompagnés d’un AVS, « malgré une circulaire du ministère de l’Education nationale selon laquelle la présence de l’AVS ne saurait être considérée comme une condition de scolarisation » ; insuffisances dans la formation à l’autisme des AVS ; embauche des AVS en « contrats de travail précaires », ce qui « nuit manifestement à la substance du travail d’aide aux enfants et adolescents handicapés ». Parallèlement, le comité déplore que l’action éducative au sein des institutions spécialisées – instituts médico-éducatifs et hôpital de jour – soit seulement envisagée « d’une manière subsidiaire parmi une pluralité d’autres actions (pédagogiques, psychologiques, sociales, médicales et paramédicales) ». Et regrette que, au cours du plan « autisme » 2008-2010, seule une trentaine de structures utilisant la méthode « ABA » (3) aient été créées, et uniquement à titre expérimental.

L’obligation de quitter la France

Le Comité conclut ensuite (par 9 voix contre 4) à la violation de l’article E combiné avec l’article 15§1 de la charte, au motif que les familles, pour scolariser leurs enfants autistes en milieu scolaire spécialisé, n’ont pas d’autre choix que de quitter le territoire national, pour aller notamment en Belgique. Cette situation, notent les experts, « résulte de l’omission de la France de prendre en compte les besoins spécifiques d’apprentissage et de communication en milieu scolaire de ces personnes sur le territoire national et constitue, pour cette raison, une discrimination directe à [leur] encontre ».

Un contexte budgétaire restreint

Enfin, le Conseil de l’Europe juge (par 8 voix contre 5) qu’il y a violation de l’article E combiné avec l’article 15§1 en raison du contexte budgétaire restreint appliqué au plan « autisme » 2008-2010 qui n’a pas permis de mettre en œuvre toutes les mesures prévues en faveur de la scolarisation des enfants et adolescents autistes. Sur les 170 millions d’euros dédiés à la création de 4 100 places supplémentaires en établissements et services (dont 2 100 pour les enfants), seuls 78,5 millions ont été utilisés pour financer 2 120 places (soit 52 % des objectifs de créations). Par ailleurs, relève le Comité, « l’Education nationale a supprimé 65 400 postes depuis 2007 et prévoyait d’en supprimer 14 000 de plus dans le budget 2012, ce qui entraîne des classes surchargées et, corollairement, une prise en charge des enfants et adolescents atteints d’autisme nécessitant encore plus d’adaptation et de formation de la part des enseignants, lesquels peinent déjà à composer et s’adapter ». Ces restrictions budgétaires sont donc « susceptibles de désavantager les personnes handicapées et ainsi d’entraîner une différence de traitement indirectement fondée sur le handicap ».

Le gouvernement français réagit

« Je veux que cette condamnation soit la dernière », a réagi la ministre déléguée chargée des personnes handicapées dans un communiqué où elle réaffirme « l’engagement sans précédent du gouvernement à travers le 3e plan autisme » qui prévoit, a-t-elle rappelé, la création de 700 places en unités d’enseignement en maternelle (une unité par département à terme) et de 850 places de services d’éducation spécialisée et de soins à domicile, ainsi que le recrutement de 10 000 AVS en deux ans et la proposition d’un contrat à durée indéterminée à 28 000 assistants d’éducation (4).

Notes

(1) Voir ASH n° 2359 du 14-05-04, p. 17.

(2) Disp. sur http://goo.gl/PQsy25.

(3) Méthode de l’analyse appliquée des comportements.

(4) Voir ASH n° 2809 du 10-05-13, p. 5.

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