L’impact des violences conjugales sur les enfants est un domaine de recherche relativement récent. Probablement a-t-on « longtemps estimé qu’un enfant ne devait pas [en] souffrir de façon particulière », commente Edouard Durand. En tant que juge des enfants, lui-même avait toutefois pu constater la fréquence des situations de violences conjugales dans les dossiers d’assistance éducative et de délinquance des mineurs, et la gravité de leurs répercussions sur le développement des enfants. Mais ces violences sont rarement pointées de façon claire dans les rapports socio-éducatifs ou les jugements. Or les identifier pour ce qu’elles sont – non pas une pathologie du lien dont les deux partenaires seraient coresponsables, mais un passage à l’acte unilatéral de l’un pour dominer l’autre – est le préalable indispensable à une mise en œuvre adaptée de mesures de protection de l’enfant. La première d’entre elles est de présumer le danger que représente l’auteur des violences pour son enfant et d’écarter l’exercice conjoint de l’autorité parentale et l’organisation de droits de visite sans médiation, au moins le temps de vérifier ce qu’il en est des compétences du père par une expertise psychiatrique. En revanche, même si la mère est fragilisée dans ses capacités éducatives par les violences subies, ni sa personnalité, ni son comportement ne sont en cause. Aussi, lorsqu’elle a besoin d’être aidée pour réinstaurer des repères sécurisants pour l’enfant, l’enjeu est de la soutenir comme sujet, pas de la traiter « comme un objet de protection après qu’elle a été traitée comme un objet de violence ».
Violences conjugales et parentalité. Protéger la mère, c’est protéger l’enfant
Edouard Durand – Ed. L’Harmattan – 12 €