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Sortie des centres maternels : « La stabilité des familles dépend des conditions de logement »

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Que deviennent les enfants qui ont vécu avec leur mère en centre maternel ? Claire Ganne, responsable du pôle « formation continue » à Buc Ressources et chercheure associée au Centre de recherche éducation et formation de l’université Paris-Ouest Nanterre-La Défense, a consacré sa thèse à cette question (1).
Aviez-vous des a priori sur le devenir des enfants accueillis en centre maternel avant de débuter votre étude ?

Non, mais, en tant qu’ancienne assistante de service social ayant exercé dans ce type de structures, je me demandais ce qu’ils devenaient, sept ou huit ans après leur hébergement. Il était communément admis qu’une part non négligeable d’entre eux était placéen et je voulais mettre ce « on dit » à l’épreuve du réel. Je me suis intéressée à des familles accueillies dans les centres maternels du Nord et des Hauts-de-Seine. La population initiale de l’étude était constituée de 315 familles. Je n’ai pu reconstituer la trajectoire que de 200 d’entre elles. J’ai ensuite rencontré 66 femmes et mené des entretiens avec 33 enfants. Premier constat : les trajectoires sont très différentes d’un département à l’autre, ce qui empêche la généralisation des résultats au plan national. Cela s’explique par les profils des familles, différents selon les territoires, mais aussi par les politiques de protection de l’enfance.

Que sont devenues ces familles ?

Les centres maternels sont des lieux d’hébergement pour les mères et leur(s) enfant(s) de moins de 3 ans. Pour y être admises, ces femmes doivent cumuler des problèmes matériels et des fragilités relationnelles qui justifient un accompagnement éducatif. A la sortie, aux 3 ans de l’enfant, un tiers des familles accède à un logement autonome. Mais 60 % connaissent une période d’instabilité résidentielle importante dans les deux années qui suivent le départ du centre. Parmi celles-là, 15 à 20 % poursuivent leur parcours au sein d’autres structures sociales. Les familles sans domicile fixe sont marginales. J’ai noté combien les conditions de logement au moment de la sortie influencent le parcours résidentiel sur la durée : les personnes qui sortent vers un logement social autonome ont un parcours beaucoup plus stable que celles qui sont d’abord hébergées chez des amis ou de la famille… Et celles qui sortent sans domicile connaissent des parcours d’hébergement en structure sociale et n’arrivent jamais à accéder au logement autonome. Ce qui m’a surprise, c’est qu’un tiers des femmes s’installent avec le père de l’enfant à l’issue de la prise en charge.

Qu’en est-il de l’enfant ?

La qualité de vie des enfants dépend de la situation au moment de l’enquête. Dans les foyers qui ont trouvé une stabilité dans un logement avec la mère, le père biologique de l’enfant ou le nouveau compagnon de la mère, les enfants vont « plutôt bien ». Les trajectoires varient là aussi selon le département d’origine : dans les Hauts-de-Seine, peu d’enfants (6-10 %) sont sous mesure de protection de l’enfance après la sortie du centre maternel, contre près de 50 % dans le Nord – 20 % sont en placement long, 20 % en milieu ouvert et 10 % alternent des placements courts et des retours à domicile.

Quelles sont vos conclusions ?

Si toutes les mères reconnaissent que le passage en centre maternel a été bénéfique pour leur famille, notamment en termes de stabilité, leur ressenti et leur parcours varient en fonction de la prise en charge par les travailleurs sociaux et de leur parcours antérieur. Cette intervention, fondée sur le soutien de la relation mère-enfant, en plus des démarches liées à l’insertion, peut être perçue comme trop intrusive par certaines femmes, surtout celles qui avaient auparavant une vie autonome. Les difficultés de ces familles, qui conjuguent des fragilités relationnelles et matérielles, les situent à l’intersection des politiques de protection de l’enfance et de lutte contre les exclusions.

La focalisation des interventions sur l’une ou l’autre de ces dimensions est parfois dommageable pour leur accompagnement. C’est pourquoi je vais observer avec intérêt la mise en œuvre des centres parentaux, prévue par le plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale (2).

Notes

(1) « Le devenir des enfants accueillis en centre maternel » – Thèse disp. sur http://goo.gl/oy1hm0.

(2) Voir ASH n° 2794 du 25-01-13, p. 30 et n° 2837 du 13-12-13, p. 20.

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