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Plan de lutte contre la pauvreté : le collectif Alerte pointe les « zones grises »

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Les associations se félicitent des avancées obtenues depuis un an, tout en appelant à compléter le plan pluriannuel, à accélérer sa mise en œuvre et à améliorer sa gouvernance.

A quelques jours de la remise au Premier ministre du rapport d’évaluation du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté (1) et du comité interministériel de lutte contre les exclusions, le 24 janvier, les 38 associations du collectif Alerte dressent leur bilan. « Le mouvement est lancé, mais son intensité n’est pas à la hauteur des besoins. La gouvernance du plan mérite d’être améliorée et il existe des zones grises », commente Dominique Balmary, président de l’Uniopss et du collectif Alerte. Déjà mitigées sur le contenu du plan qu’elles avaient appelé de leurs vœux, les associations le sont tout autant, un an après, sur sa mise en œuvre. Alors que, selon l’INSEE, la France comptait 8,6 millions de pauvres en 2010, soit 400 000 de plus qu’en 2009, elles enjoignent au gouvernement d’être « plus ambitieux ».

Elles continuent de saluer la méthode – pilotage interministériel, animation territoriale, évaluation périodique –, ainsi que le changement de rhétorique. « Le discours sur les pauvres a changé dans le bon sens », se félicitent-elles dans un document rendu public le 13 janvier, même s’il reste un « travail pédagogique à mener » pour en finir avec leur stigmatisation. L’introduction dans la législation d’un critère de discrimination pour précarité sociale est, d’ailleurs, toujours très attendue. La participation des personnes en situation de pauvreté, que les associations veulent voir élargie à toutes les instances consultatives, commence à faire son chemin, comme le montre l’officialisation du « huitième collège » au Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale.

Difficultés d’articulation

Pour autant, la conduite du plan de lutte contre la pauvreté connaît des failles. « Interministériel, il l’est, mais pluriannuel, beaucoup moins », pointe Dominique Balmary. Par ailleurs, « le plan sert de révélateur des difficultés d’articulation entre le plan national et le plan territorial, malgré les efforts de François Chérèque. Il aurait fallu une déclinaison en plans régionaux, qui auraient permis une meilleure visibilité et une plus grande mobilisation au niveau territorial. » Selon le collectif, « tout semble se passer comme si les directions départementales de la cohésion sociale naviguaient à vue en fonction des rallonges financières qu’on leur donne au coup par coup ». Il préconise que chaque direction régionale de la cohésion sociale, en lien avec les conseils généraux et les directions départementales, fasse remonter à l’administration centrale ses priorités et que les financements soient alloués en conséquence à l’échelle territoriale. Il suggère également la nomination d’un délégué interministériel en mission dans chaque région. Le décloisonnement entre les politiques sociales et de santé paraît être resté aussi au milieu du gué. Dans les agences régionales de santé, « les référents “cohésion sociale” ne sont pas tous identifiés et ne disposent pas de marges de manœuvre suffisantes ». Alors que le gouvernement a, dans le cadre de la modernisation de l’action publique, lancé une réflexion sur la gouvernance territoriale des politiques d’insertion et de lutte contre les exclusions, les associations attendent la poursuite des décloisonnements. « Le renvoi de balles entre financeurs de l’hébergement généraliste et financeurs de l’hébergement des demandeurs d’asile » continue, par exemple, d’être un casse-tête pour les gestionnaires.

Sur le fond, les associations se félicitent de plusieurs avancées, dont le début de la revalorisation du RSA socle (qu’elle souhaite néanmoins voir augmenter de 25 % en cinq ans, au lieu des 10 % prévus), la lutte contre le non-recours aux droits, la hausse – également en deçà de leurs attentes – du plafond de ressources pour bénéficier de la CMU-C, l’élargissement de l’accès à la complémentaire santé, ou encore l’augmentation du complément familial et de l’allocation de soutien familial. Pour autant, l’amélioration des ressources des plus modestes ne constitue pas encore une ligne très claire : avec le gel partiel de l’aide personnelle au logement en 2014, « ce qui est gagné d’un côté sera perdu de l’autre », déplore le collectif. L’accès à l’allocation de solidarité aux personnes âgées reste très complexe. Quant à la « garantie jeunes » (100 000 bénéficiaires par an), elle est largement « sous-dimensionnée ».

Retards et reculs

Les associations s’inquiètent surtout que certains chantiers n’aient même pas été engagés ou prennent du retard, souvent sacrifiés pour des raisons budgétaires. C’est le cas de la fusion du RSA (revenu de solidarité active) activité et de la PPE (prime pour l’emploi) dans une nouvelle prestation, plus lisible et ouverte aux jeunes. « Les solutions techniques et financières sont sur la table. Que cette réforme reste en panne est très dommageable », s’inquiète Dominique Balmary. C’est peu dire que le chantier de l’accès à l’hébergement et au logement déçoit aussi. « Les objectifs de création de places d’hébergement sont atteints, mais avec des financements tels que la qualité et les conditions d’accompagnement vont en pâtir. La gestion au thermomètre prévaut toujours et les 115 connaissent des embouteillages plus importants que jamais ! » La refondation du travail social traîne, les « états généraux » ayant été repoussés à l’automne 2014.

Sur le front de l’emploi, les associations se félicitent de l’augmentation du volume des contrats aidés, du déploiement des emplois d’avenir et de l’engagement de la réforme de l’insertion par l’activité économique. Dans tous les domaines, elles invitent néanmoins le gouvernement à lancer des réformes plus structurelles, plus préventives. « Sans écarter l’urgence, tous les dispositifs de politique sociale méritent d’être réorientés dans une vision de moyen et long terme », défend Dominique Balmary. A ses yeux, les deux accords nationaux interprofessionnels sur la sécurisation de l’emploi et la formation professionnelle « sont une amorce ». Résorber la dette et relancer la croissance, oui, mais sans oublier que l’insertion des plus fragiles « relève avant tout de la responsabilité de la puissance publique ».

Notes

(1) Voir ASH n° 2794 du 25-01-13, p. 39.

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