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Plaidoyer pour le rétablissement de la trêve hivernale pour tous

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Faire primer la liberté fondamentale du droit à l’hébergement sur le droit de propriété. C’est ce que demandaient, le 13 janvier, plusieurs associations, à l’appel de Médecins du monde, de la Fondation Abbé-Pierre et de la fédération Droit au logement (DAL), à la veille de l’examen en deuxième lecture à l’Assemblée nationale du projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR). Dans un appel commun, elles réclament l’application de la trêve hivernale aux occupants de squats et de bidonvilles. « Depuis l’hiver dernier, on constate dans la région parisienne, en Bretagne, à Bordeaux, Toulouse, Lyon ou Lille, la multiplication d’expulsions d’immeubles et de terrains, dont des familles avec enfants, sans relogement et souvent sans hébergement », interpelle Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole du DAL. Alors que le dispositif d’hébergement est saturé et que la loi sur le droit au logement opposable peine à tenir ses promesses, les associations veulent que les occupants de « squats par nécessité » soient au moins temporairement protégés.

La trêve hivernale a été instaurée par la loi du 3 décembre 1956, après l’appel de l’abbé Pierre dont les associations célèbrent cette année le soixantième anniversaire. Mais la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d’exécution en a restreint la portée. L’article L. 412-6 du code des procédures civiles d’exécution prévoit qu’il est « sursis à toute mesure d’expulsion non exécutée à la date du 1er novembre de chaque année jusqu’au 15 mars de l’année suivante, à moins que le relogement des intéressés soit assuré dans des conditions suffisantes respectant l’unité et les besoins de la famille ». Mais il exclut de ce répit les personnes entrées dans les locaux « par voie de fait » ou lorsque ceux-ci sont situés dans un immeuble ayant fait l’objet d’un arrêté de péril. En 2010, un arrêt du Conseil d’Etat condamnant l’Etat à indemniser des propriétaires a créé une jurisprudence défavorable. « La voie de fait doit être prouvée, mais ce n’est pas toujours le cas », relève Marie Rothhahn, chargée de mission « accès aux droits » à la Fondation Abbé-Pierre. La France a pourtant plusieurs fois été condamnée par les juridictions européennes pour ses décisions d’expulsion, notamment pour non-respect de la dignité humaine. « Le droit européen reconnaît le lieu où l’on vit comme le domicile, ce qui garantit la protection de la vie privée et familiale », ajoute Marie Rothhahn. Dans son avis de mai dernier sur le bilan de l’application de la circulaire du 26 août 2012, relative à l’évacuation des campements illicites, le défenseur des droits plaidait aussi en faveur de l’application de la trêve hivernale aux terrains illégalement occupés, livrant une analyse « rejoignant celle du Conseil constitutionnel et du Comité européen des droits sociaux ».

Les associations réclament que le projet de loi ALUR rende la trêve hivernale universelle. Un amendement dans ce sens avait été présenté par le député André Chassaigne (Gauche démocrate et républicaine) à la commission des affaires économiques, mais il n’a pas été soutenu. Son promoteur devrait le présenter à nouveau en séance publique, selon les associations.

En pleine crise du logement et des dispositifs d’urgence, la revendication d’une extension du périmètre de la trêve hivernale rejoint celle d’un moratoire des expulsions locatives et de la fin des expulsions sans relogement. « Aujourd’hui, on expulse des bidonvilles non pas pour reloger, mais pour mettre les personnes à la rue, enrage Jeanine Rochefort, déléguée régionale Ile-de-France à Médecins du monde. En 1954, on était en pleine reconstruction, la situation sociale était autrement compliquée. Pourquoi n’est-il pas possible de faire en 2014 ce que l’on faisait il y a 60 ans ? »

Côté terrain

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