Un recul majeur. Plusieurs associations de défense des consommateurs et confédérations syndicales dénoncent le rabotage prévisible de la future garantie universelle des loyers (GUL). Mesure phare du projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) adopté en première lecture par le Parlement (1), la GUL pourrait être rendue facultative. C’est ce que prévoit l’amendement présenté par le gouvernement et adopté par la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale le 17 décembre en prévision de la deuxième lecture du projet de loi. Promise par François Hollande pendant la campagne présidentielle et annoncée dans le cadre du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté, la GUL devait permettre de sécuriser les rapports locatifs et éviter les phénomènes de discrimination à l’entrée dans le logement. Elle devait se substituer à la caution tout en offrant l’assurance aux propriétaires de percevoir les loyers en cas d’impayés.
Dans la version actuelle – qui doit encore être examinée en séance plénière à l’Assemblée nationale à partir du 14 janvier – la garantie des loyers ne serait plus obligatoire : les bailleurs pourraient choisir de conserver le système de la caution, qui avantage les locataires les plus aisés. « Un changement de taille », considère la Confédération nationale du logement (CNL) qui « fait la part belle aux bailleurs privés qui feront, seuls, le choix de recourir ou non au dispositif. In fine, les bailleurs continueront d’utiliser le mécanisme de la caution et la garantie universelle des loyers ne répondra pas à son objectif initial, favoriser l’accès au logement pour tous. » Par ailleurs, le loyer assuré ne serait plus le loyer réel – sauf pour les étudiants et les personnes précaires – mais déterminé selon un loyer médian local fixé par les préfets. « En limitant son indemnisation au seul loyer médian, la GUL circonscrit son attractivité pour les bailleurs […] qui seront dans l’obligation de souscrire une autre assurance de leur côté », déplore la confédération Consommation, logement et cadre de vie (CLCV). « Or qu’adviendra-t-il si cette dernière impose des conditions économiques quant au choix du locataire ? […] Les discriminations financières continueront d’exister et cette garantie ne permettra nullement d’y mettre fin. »
Enfin la garantie universelle des loyers ne serait plus alimentée par un prélèvement de 1 à 2 % du loyer, payé à parts égales entre propriétaires et locataires, mais par l’Etat en partie via Action logement (ex-1 % logement). Les cinq confédérations syndicales (CFDT, CGT, CFTC, FO, CFE-CGC) jugent « inadmissible que le financement ne repose que sur l’Etat et Action logement ». Elles réclament que les bailleurs participent au financement de la GUL et demandent la mise en place d’« un accompagnement adapté à la situation des locataires ». Au final, « Le projet de loi était courageux car, pour la première fois, on essayait de mettre en place une garantie universelle, obligatoire, pour aider les personnes les plus fragiles économiquement, à accéder à un logement », a déclaré à l’AFP David Rodrigues, juriste à la CLCV. Or, « la montagne va accoucher d’une souris et le mécanisme qui devait […] permettre une réelle mutualisation du risque locatif est tout simplement abandonné ».
(1) Voir ASH n° 2825 du 20-09-13, p. 20.
(2) La garantie universelle des loyers telle qu’elle était envisagée par le gouvernement initialement avait été critiquée par le Conseil d’analyse économique – Voir ASH n° 2831 du 1-11-13, p. 12.