Conformément à la loi du 5 août 2013 portant diverses dispositions d’adaptation dans le domaine de la justice en application du droit de l’Union européenne et des engagements internationaux de la France (1), les personnes suspectées ou poursuivies dans une affaire pénale bénéficient désormais d’un droit à être assistées par un interprète ou à la traduction de certaines pièces de la procédure. Après avoir été précisé par un récent décret (2), ce droit est aujourd’hui explicité dans une circulaire de la chancellerie.
La personne soupçonnée ou poursuivie dans une affaire pénale peut demander à bénéficier gratuitement d’un interprète lors de ses entretiens avec son avocat. En dehors des cas dans lesquels ce droit à l’interprétation peut s’exercer (au cours de la garde à vue, avant une comparution devant une juridiction…), le ministère de la Justice précise qu’« il appartient au magistrat compétent, saisi d’une demande d’assistance d’interprète, de vérifier si elle est effectivement justifiée pour les besoins de préparer la défense et uniquement si l’interprétation est nécessaire pour garantir le caractère équitable de la procédure ». Rappelons que la personne suspectée ou poursuivie qui fait l’objet d’une audition peut contester l’absence d’interprète ou la qualité de l’interprétation. Si tel est le cas, souligne la circulaire, l’autorité ayant en charge le dossier peut nommer un autre expert et mettre fin à la mission du premier.
Au-delà des documents considérés comme essentiels à l’exercice de la défense et de ceux qui doivent obligatoirement être traduits (décisions de placement en détention provisoire, de saisine d’une juridiction de jugement…), souligne la chancellerie, les autorités compétentes pourront, de leur propre initiative ou à la demande des personnes poursuivies ou de leur conseil juridique, déterminer au cas par cas si la traduction d’autres documents (rapports d’expertise, notamment) est essentielle pour garantir le caractère équitable de la procédure. En outre, l’ensemble de ces documents peuvent, à titre dérogatoire, être traduits oralement lors des entretiens avec l’avocat, indique-t-elle. Précisant qu’« il peut être effectué une traduction orale ou un résumé oral des pièces essentielles qui doivent être remises ou notifiées ». « Cette traduction orale pourra aussi être retenue lorsqu’elle s’avérera plus pertinente ou plus efficiente que la traduction écrite. » Ce sera le cas, par exemple, « lorsque la personne indiquera ne pas savoir lire ou, d’une façon plus générale, à chaque fois qu’une décision juridictionnelle de condamnation ou de placement en détention, un acte de poursuite ou un mandat d’arrêt européen sera notifié à la personne en présence d’un interprète », illustre le ministère de la Justice. A noter: « il convient également de considérer qu’à chaque fois qu’un jugement de condamnation sera rendu de façon contradictoire, avec la présence d’un interprète, l’obligation de traduction est satisfaite », indique-t-il.
La traduction doit intervenir dans un « délai raisonnable », insiste la chancellerie. En pratique, la question du délai de traduction ne se pose pas en cas de traduction orale, qui intervient immédiatement au moment de la notification de l’acte. En revanche, souligne-t-elle, en cas de traduction écrite, « les nouvelles dispositions n’imposent pas nécessairement que la traduction intervienne en même temps que la remise ou la notification de la copie des pièces de la procédure, notamment quand cette remise est enserrée dans un bref délai ». Par ailleurs, selon l’administration, « il semble que le délai dans lequel la traduction d’une décision susceptible de faire l’objet d’une voie de recours a pu être remise à la personne est sans incidence sur le point de départ du délai de recours dès lors que l’information sur les délais et les voies de recours a été donnée oralement et a été dûment traduite ».
Rappelons enfin que les personnes suspectées ou poursuivies peuvent renoncer à leur droit à traduction, sur tout ou partie des pièces essentielles et à tous les stades de la procédure. La renonciation n’est toutefois « valable que si la personne a été préalablement conseillée juridiquement ou informée pleinement des conséquences de cette renonciation, et seulement si cette renonciation est expresse et a été formulée de plein gré », insiste le ministère de la Justice. Une information préalable qui devra être actée au procès-verbal ou dans les notes d’audiences.