Qui sont ces mères qui ne protègent pas leur fille dans les cas d’inceste ? Le plus souvent, des femmes ayant été elles-mêmes victimes d’abus sexuels qu’elles ont tus, ou bien qui « ont été élevées dans des familles où elles ont intériorisé le silence et l’aveuglement collectif » pesant sur les abus sexuels incestueux, explique Dorothée Dussy, anthropologue, l’une des contributrices de ce passionnant ouvrage dirigé par Patrick Ayoun, pédopsychiatre, et Hélène Romano, psychothérapeute. Les différents éclairages proposés permettent d’appréhender les difficultés, pour une mère, d’entendre le drame de sa fille et combien il est important qu’elle y parvienne : c’est le moyen d’aider l’enfant dont la souffrance « est souvent bien plus intense face à celle qui ne l’a pas protégé que face à celui qui l’a abusé », constatent Françoise Eyherart et Charlotte Barat-Scherer, de l’Association girondine d’éducation spécialisée et de prévention sociale, qui interviennent durant la procédure pénale auprès des mineur(e)s ayant été ainsi agressé(e)s, ainsi que de leurs parents – davantage les mères, moins souvent poursuivies que les pères ou beaux-pères. A Agen (Lot-et-Garonne), la maison d’accueil Jean-Bru, spécialisée dans la prise en charge des jeunes filles victimes d’agressions sexuelles intrafamiliales, fait aussi un travail avec leurs mères(1). Analysant la complexité de la relation mère-fille dans le système incestueux, Annick Guimard et Laurent Ducrocq, travailleurs sociaux au service « famille » de l’établissement, en sont arrivés à conclure que, « s’il y a inceste, c’est que la mère l’aura permis… »
Inceste, lorsque les mères ne protègent pas leur enfant
Sous la direction de Patrick Ayoun et Hélène Romano – Ed. érès – 16 €
(1) Voir notre reportage sur cet établissement dans les ASH n° 2625 du 25-09-09, p. 26.