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Prostitution : au-delà du volet répressif, quel accompagnement des personnes ?

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Alors que la proposition de loi continue de diviser les associations, la FNARS veut renforcer les dispositions sur l’insertion.

Protectrice pour les uns, dangereuse pour les autres. La proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel (voir ce numéro, page 5) a été adoptée par les députés le 4 décembre en première lecture, sur fond de débats idéologiques qui traversent également le secteur associatif. D’un côté, Osez le féminisme, le Mouvement du nid ou le Centre national d’information sur les droits des femmes et des familles saluaient un vote « historique » reconnaissant la prostitution comme une violence, dont les auteurs pourront être sanctionnés. De l’autre, des associations qui luttent pour l’accès aux soins et la réduction des risques, comme Act Up, AIDES, Médecins du monde, ou qui représentent les personnes prostituées ou les accompagnent, comme Les Amis du bus des femmes, Cabiria ou le Strass (Syndicat du travail sexuel), accusent la proposition de loi de sacrifier les impératifs de prévention, de soins et d’accès aux droits. S’il supprime le délit de racolage passif dont les effets délétères sont dénoncés depuis dix ans, le texte, en instaurant la pénalisation des clients, repousse encore plus loin, selon ces dernières, l’exercice de la prostitution dans la marginalité. Une position également partagée par le Planning familial.

Et l’accompagnement sexuel ?

De manière moins attendue, l’Association pour la promotion de l’accompagnement sexuel (APPAS), créée en septembre dernier pour défendre la légalisation de l’assistance sexuelle aux personnes handicapées et présidée par Marcel Nuss, voit dans le texte un autre dommage collatéral : « Désormais, non seulement l’APPAS est toujours en porte-à-faux avec la loi sur le proxénétisme, mais, en plus, les client(e)s en situation de handicap qui vont faire appel à des accompagnant(e)s sexuel(le)s prennent le risque d’être poursuivi(e)s et pénalisé(e)s à hauteur de 1 500 € pour la plus petite amende. » Mais « peut-on poursuivre quelqu’un pour un délit d’humanité, alors même que tous les protagonistes de l’accompagnement sexuel sont volontaires et consentants ? »

La FNARS (Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale), pour sa part, ne veut pas trancher ce sujet de la pénalisation des clients (elle fédère des associations aux positions différentes). Elle préfère se concentrer sur le renforcement du volet « accompagnement » de la loi, sur lequel elle a présenté une série d’amendements. Parmi ses préoccupations : le périmètre des associations concernées par la prise en charge des personnes. Alors que, selon le texte initial, cette mission revenait à des associations spécialement constituées et agréées à cet effet, la FNARS souhaitait qu’elle puisse être accomplie par l’ensemble des acteurs de l’insertion dans un objectif de pluridisciplinarité et pour éviter les ruptures de parcours. Elle a, en partie, été entendue : le texte adopté par les députés cite désormais les « associations qui aident et accompagnent les personnes prostituées », mais maintient le système de l’agrément.

Autre demande de la fédération : remplacer la notion de « parcours de sortie » – trop rigide, à ses yeux, pour tenir compte d’une évolution progressive en fonction des vulnérabilités et des situations individuelles – par celle de « projet d’insertion sociale et professionnelle », plus adaptée à la logique du travail social. Les députés ont intégré au texte cette deuxième formulation dans la définition de l’accompagnement. Pour autant, le terme de « parcours de sortie » subsiste. L’examen au Sénat devra donc « apporter des clarifications sur ce point », juge Katya Benmansour, chargée de mission « analyse juridique » à la FNARS. Pour la fédération, l’accès aux droits créés par le texte ne devrait pas être lié à une obligation de parcours. Si la notion de contrat tripartite entre la personne, l’association et l’administration, introduite en commission, a été supprimée lors de l’examen à l’Assemblée nationale, « il faudra être vigilant sur la partie réglementaire de la réforme », ajoute Katya Benmansour. Un décret devrait en effet préciser les modalités de l’accompagnement.

Séjour de plein droit

La fédération avait également proposé des amendements en matière de droit au séjour des personnes victimes de la prostitution. Elle souhaite notamment que la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » soit délivrée « de plein droit » aux personnes qui ont déposé plainte ou témoignent contre les auteurs d’infractions relatives à la traite des êtres humains ou au proxénétisme, un octroi aujourd’hui laissé à l’appréciation des préfectures. « Un amendement dans ce sens, déposé par les écologistes, a été rejeté en commission, explique Katya Benmansour. Les risques d’appel d’air ont été invoqués, alors qu’une centaine de titres sont délivrés pour ce motif chaque année ! » La Cimade, quant à elle, va plus loin en demandant que ce titre de séjour soit également délivré aux personnes qui se signalent comme victimes, sans témoigner ou déposer plainte.

La FNARS se réjouit, par ailleurs, que les députés aient supprimé la mesure qui prévoyait l’octroi de l’allocation temporaire d’attente aux personnes étrangères engagées dans un parcours, pour introduire, dans ce cas, le bénéfice d’une « aide financière à l’insertion sociale et professionnelle », à laquelle davantage de personnes seraient donc éligibles. Mais encore faudra-t-il que les sénateurs précisent les contours de cette aide.

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