Une « conférence parlementaire » consacrée au travail social et à sa contribution à la citoyenneté. Toute une journée au cours de laquelle le président de l’Assemblée nationale, des députés, les ministres déléguées Marie-Arlette Carlotti et Dominique Bertinotti, Sabine Fourcade, directrice générale de la cohésion sociale, ont insisté sur la place essentielle des professionnels dans les politiques sociales, manifesté leur soutien à l’égard de ces derniers et échangé avec des membres du Conseil supérieur du travail social (CSTS), des praticiens et des représentants d’usagers. Cette manifestation inédite s’est déroulée le 5 décembre à l’Assemblée nationale (1) à l’initiative de deux élues du groupe socialiste, républicain et citoyen en partenariat avec l’Unaforis (Union nationale des associations de formation et de recherche en intervention sociale) et la chaire de travail social et d’intervention sociale du CNAM (Conservatoire national des arts et métiers).
Il s’agit en fait d’un projet ancien : cela fait plusieurs années que les deux députées, issues du travail social – Patricia Adam (Finistère) a été assistante sociale et Martine Carrillon-Couvreur (Nièvre) a été éducatrice spécialisée avant de diriger un institut médico-éducatif –, avaient le souhait de mobiliser leurs collègues sur le travail social et l’action sociale (2). « Soit en organisant une journée parlementaire, soit en créant un groupe d’étude à l’Assemblée nationale, rapporte Martine Carrillon-Couvreur, par ailleurs présidente du CNCPH (Conseil national consultatif des personnes handicapées). Il faut répondre à l’inquiétude du secteur qui ne sent pas suffisamment entendu et soutenu par les politiques. On a besoin des travailleurs sociaux qui font un travail remarquable au quotidien, et il faut leur redonner des perspectives. »
Certes, la mobilisation se limite pour l’instant à un petit noyau de députés. « Chacun a individuellement connaissance de situations qui relèvent du travail social, mais il est pris par d’autres préoccupations », reconnaît Martine Carrillon-Couvreur, qui veut croire néanmoins à un début de sensibilisation des parlementaires. « Il commence à y avoir un groupe d’élus mobilisés autour du travail social », assure, pour sa part, Pierre Gauthier, président de l’Unaforis, faisant référence à ceux qui ont interpellé le gouvernement, par le biais ou non de questions parlementaires, sur la gratification des stagiaires. Mais si le travail social a tout à gagner d’une reconnaissance de sa fonction politique de transformation sociale, encore faut-il que le soufflé ne retombe pas après le 5 décembre. C’est pourquoi les organisateurs comptent bien se réunir en janvier pour décider des suites à donner à l’initiative, voire envisager d’autres journées du même type.
Tandis que des députés se penchent sur le travail social, la direction générale de la cohésion sociale est à la manette des « états généraux du travail social » afin de « refonder le travail social ». « Les choses avancent », soulignent des membres du comité de pilotage national, qui s’est réuni le 10 décembre. Les deux « interrégions » pilotes ont démarré leurs travaux – l’interrégion PACA/Languedoc/Corse a tenu son premier comité de pilotage tandis que l’interrégion Rhône-Alpes/Auvergne réunit le sien le 17 décembre. D’autres interrégions commencent également à travailler. Quant aux groupes de réflexion nationaux, ils seront constitués vers janvier ou février afin « de laisser remonter la parole du terrain ».
Reste que la ligne bleue des états généraux – qui devraient se tenir au dernier trimestre 2014 – ne doit pas être le seul horizon auquel on renvoie les travailleurs sociaux et les étudiants en attente de réponses sur la reconnaissance de leurs diplômes et le financement de la gratification – à laquelle la circulaire Fioraso n’apporte pas de véritable réponse (3). Sauf à accroître encore le fossé entre les pouvoirs publics et le terrain. C’était ce qu’étaient venues exprimer les 300 personnes (selon le Collectif des travailleurs sociaux libres) qui se sont rassemblées le 5 décembre devant l’Assemblée nationale en marge de la conférence parlementaire à l’appel de plusieurs syndicats et d’associations professionnelles (4). Et dont une délégation a présenté ses revendications au cabinet du président de l’Assemblée nationale, Claude Bartolone.
Enfin, le décalage demeure entre l’intention du ministère de lancer un processus démocratique avec l’ensemble des acteurs, à travers la démarche des états généraux, et son absence de communication sur les travaux menés au sein du CSTS – réuni à nouveau fort discrètement le 6 décembre.
(1) Son thème était « La citoyenneté, contribution du travail social et des formations sociales en France et en Europe ».
(2) Le projet était porté aussi à l’origine par Paulette Guinchard-Kunstler, présidente de la CNSA et ancienne députée du Doubs.
(3) Voir ASH n° 2831 du 1-11-13, p. 15 et 34.
(4) CGT, FSU, Solidaires et Fédération autonome de la fonction publique à partir de revendications très larges. L’ANAS, l’ONES, France ESF et la FNEJE appelaient également au rassemblement pour la reconnaissance des diplômes de niveau III au grade de licence et l’accès à la catégorie A de la fonction publique.