Henri, la cinquantaine, ancien coureur cycliste, tient avec sa femme Rita un petit restaurant près de Charleroi (Belgique). Elle est chaleureuse avec les clients et assure le service. Il est taiseux, taciturne, et se réfugie derrière ses fourneaux ou les verres de bière qu’il vide avec ses copains Bibi et René, des piliers de comptoir. Sa seule échappatoire : son pigeonnier, où il élève des oiseaux voyageurs. Quand Rita meurt subitement, Henri est désemparé. Leur fille lui suggère alors de se faire aider au restaurant par une personne handicapée mentale hébergée dans un foyer voisin, Les Papillons blancs. Et c’est ainsi que Rosette entre dans la vie d’Henri, d’abord toute en timidité, puis de plus en plus affirmée et épanouie. Incarné par Miss Ming, comédienne, artiste plasticienne, poétesse et autiste, ce « papillon blanc » aurait pu donner son titre au film, tant il illumine de sa présence, bienveillante et décalée, l’univers morne d’Henri. Et c’est là toute la force du film de la réalisatrice belge Yolande Moreau : donner au personnage de Rosette une vraie épaisseur, sans caricature. La jeune femme, en effet, n’apparaît pas seulement fraîche et innocente. Elle sait aussi, au besoin, se montrer manipulatrice et déterminée, tant est puissant son désir de liberté et de normalité – son envie de beauté et d’envol, comme un papillon. A ce titre, le film suggère avec pudeur les tensions entre la vie collective, la nécessaire protection des personnes vulnérables et les aspirations au bonheur et à l’individualité des personnes hébergées en établissement, sans jamais juger ni trancher. Au final, cette rencontre entre deux solitudes, dont le spectateur craint en permanence qu’elle ne dérape, constitue une histoire d’une grande finesse, servie par une réalisation aussi simple en apparence que délicatement ouvragée.
Henri
Yolande Moreau – Avec Pippo Delbono et Miss Ming – 1 h 47 – En salles