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Affaire Baby-loup : soulagement après l’arrêt de la Cour de cassation

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Même si le feuilleton juridique n’est pas clos puisque l’ex-salariée devrait à nouveau se pourvoir en cassation, la cour d’appel de Paris a levé le malaise qu’avait entraîné l’arrêt de la Cour de cassation dans l’« affaire Baby-loup ». Contrairement à la Haute Juridiction et considérant qu’il ne portait pas atteinte à la liberté religieuse et n’était en rien discriminant, elle a validé le licenciement pour faute grave de l’éducatrice de jeunes enfants de la crèche associative, qui avait refusé d’ôter son voile dans l’exercice de ses fonctions (1). « Un grand soulagement » pour Natalia Baleato, directrice de la structure, qui, après cinq ans de contentieux, évoque « un arrêt sage, de pacification, qui va permettre au personnel de se recentrer sur son travail auprès des enfants et des familles ». Et de regretter qu’avec le tourbillon médiatique et juridique qui l’a emportée, Baby-loup soit devenue aux yeux de nombreux habitants une crèche contre l’islam, « alors même que son projet vise le vivre ensemble, quelles que soient les origines et les confessions ». Insultes, menaces, pressions, la situation est telle que la crèche quittera ses locaux de Chanteloup-les-Vignes (Yvelines) le 31 décembre prochain pour s’installer dans la ville voisine de Conflans-Sainte-Honorine où sa directrice espère qu’elle pourra rouvrir le 1er mars 2014.

Soulagement également pour Daniel Verba, sociologue à l’université de Paris-XIII (2). Il se réjouit tout d’abord que la cour d’appel ait ramené l’affaire Baby-loup, « que la médiatisation et la pression de groupes locaux et nationaux avait transformée en symbole de la lutte opposant “laïcards” et “anti-racistes” », à sa banale dimension de conflit du travail, qu’elle n’aurait jamais dû quitter. Il considère ensuite très positif que les juges autorisent la crèche associative à « assurer une impartialité confessionnelle dans un espace réservé à de jeunes enfants auxquels il convient de transmettre les valeurs républicaines et dans lequel le droit à la différence ne s’oppose pas au droit à la ressemblance. » Et d’expliquer que, juste après la décision de la Cour de cassation de déclarer illégal le licenciement, « la crèche a fait soudainement l’objet de demandes d’exceptions culturelles ou religieuses et de pressions pour que les enfants puissent respecter les mêmes prescriptions qu’au sein des familles ».

Robert Lafore, professeur de droit public à l’université de Bordeaux-Institut d’études politiques et spécialiste de l’action sociale (3), se réjouit également que la cour d’appel reconnaisse qu’une association exerçant une mission d’intérêt général et d’utilité sociale puisse exiger, compte tenu de son projet associatif, un certain type de comportement de ses salariés. Il estime toutefois curieux que les juges aient motivé leur décision sur l’idée que la crèche pouvait être considérée comme une « entreprise de conviction ». « Or l’association n’est ni une entreprise, ni un système de conviction, souligne-t-il. Il aurait été préférable qu’ils se fondent sur l’idée que l’association porte une vision du monde, qui doit être protégée et qui participe au plu­ralisme démocratique. » Pour l’UFAL (Union des familles laïques), cette notion d’« entreprise de conviction » n’a pas d’existence en droit et reste donc fragile. « Il n’est pas sûr que la Cour de cassation, s’il y a un pourvoi, la re­tienne. » Pour sortir donc de ce qu’elle considère comme une « impasse », elle réclame à nouveau, malgré les avis contraires de l’Observatoire de la laïcité (4), du Conseil économique, social et environnemental (5) et de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (6) mais aussi de bon nombre d’acteurs du secteur social (7), une loi.

Notes

(1) Voir ASH n° 2835 du 29-11-13, p. 40.

(2) Auteur du Métier d’éducateur de jeunes enfants – Ed. La Découverte, 2006.

(3) Il contribue également de façon régulière à la rubrique « Point de vue » des ASH.

(4) Voir ASH n° 2829 du 18-10-13, p. 14.

(5) Voir ASH n° 2833 du 15-11-13, p. 10.

(6) Voir ASH n° 2827 du 4-10-13, p. 16.

(7) Voir ASH n° 2803 du 29-03-13, p. 11.

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