Comment le gouvernement compte-t-il s’y prendre pour, comme il s’y est engagé (1), « mettre fin à la gestion saisonnière du dispositif d’hébergement d’urgence » et ainsi ne plus lier les capacités exceptionnelles de mise à l’abri à la seule chute des températures ? Dans une lettre qu’elle a adressée le 21 novembre aux préfets de région et de département – et présentée le jour même à la presse –, la ministre de l’Egalité des territoires et du Logement explique le « changement de méthode » attendu dans les prochaines semaines à la fois pour la gestion des capacités de mise à l’abri temporaire, mais aussi pour la gestion du dispositif d’hébergement pérenne et d’accès au logement.
Cécile Duflot demande, en premier lieu, aux préfets de ne plus déclencher l’ouverture de capacités exceptionnelles de mise à l’abri en fonction de plans saisonniers uniformes, mais toute l’année « en fonction des besoins », pour faire face à des « événements exceptionnels ». Autrement dit, l’idée est que la baisse des températures – qui était jusqu’à présent le critère mécanique qui déclenchait l’ouverture de capacités d’accueil temporaire – ne soit plus qu’une raison parmi d’autres (2).
Le champ de ces circonstances exceptionnelles reste ouvert. Devant la presse, la ministre a évoqué, à titre d’exemples, « la défaillance d’un opérateur, comme cela a été le cas récemment à Clermont-Ferrand, ou un afflux massif de migrants, à la suite d’une crise internationale, comme on l’a vécu avec la Tunisie ». Elle fait également référence, dans sa lettre, aux conditions socio-économiques locales des personnes les plus démunies ou bien encore à d’éventuels sinistres.
La ministre demande par ailleurs que les places mobilisées prennent en compte la diversité des publics à accueillir (familles avec enfants, femmes seules, grands exclus, migrants isolés…). Elle insiste aussi sur les principes fondamentaux à respecter toute l’année : continuité de la prise en charge, inconditionnalité de l’accueil, respect des conditions minimales de qualité et de décence, évaluation de la situation des personnes et de leur accompagnement en vue d’une réorientation vers le logement ou une structure plus adaptée.
A noter : selon Cécile Duflot, on recense à ce jour 15 800 places mobilisables temporairement en France, dont près de 4 700 en Ile-de-France.
Le gouvernement souhaite que cette nouvelle gestion de l’ouverture de places temporaires de mise à l’abri s’accompagne d’une réorganisation de la gestion des places d’hébergement pérennes. La ministre du Logement demande ainsi aux préfets de finaliser les très attendus « diagnostics territoriaux à 360° » (3) « pour le premier semestre 2014 » – « au plus tard fin juin », a-t-elle indiqué à la presse – afin de mieux connaître l’offre et les besoins. Un document synthétique devrait être rendu public à l’issue de cette démarche, notamment pour communiquer sur les bonnes pratiques ainsi recensées. Les diagnostics permettront d’alimenter les futurs plans départementaux d’action pour le logement des personnes défavorisées, dont la création est prévue dans le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové actuellement en cours d’examen au Parlement (4).
Cécile Duflot demande encore aux représentants de l’Etat de réduire significativement les nuitées hôtelières. « Dans les territoires ne connaissant pas une tension forte de la demande de logement et d’hébergement, des progrès immédiats sont [à cet égard] attendus », écrit-elle. Les préfets sont invités plutôt à orienter l’offre d’hébergement vers la captation de logements vacants – notamment dans le parc social, par le biais de conventions associations/bailleurs – « pour créer une offre nouvelle d’hébergement dans le diffus pour tous les publics actuellement hébergés à l’hôtel ».
Plus largement, la ministre insiste, dans sa lettre, sur la nécessité d’actionner toute l’année les différents leviers qui, jusqu’à présent, étaient le plus souvent mobilisés uniquement à la sortie de l’hiver, quand les personnes hébergées doivent quitter les centres d’urgence : mobilisation du contingent préfectoral au profit de demandeurs prioritaires de logement social, recours aux baux glissants dans le parc social, orientation des personnes hébergées vers les résidences sociales, les pensions de famille et les maisons-relais, relance des dispositifs d’intermédiation locative, etc.
(2) La période hivernale restant toutefois « porteuse de risques médico-sociaux spécifiques », un « guide national de prévention et de gestion des impacts sanitaires et sociaux liés aux vagues de froid 2013-2014 » a été envoyé aux préfets en septembre dernier – Voir ASH n° 2828 du 11-10-13, p. 41.
(3) Poursuivant la concertation engagée pour la réalisation des projets territoriaux de sortie de l’hiver – qui était centrée sur les personnes hébergées dans le dispositif hivernal –, le gouvernement a, en avril dernier, demandé aux préfets de région de rassembler à nouveau tous les acteurs et d’élaborer avec eux, pour 2013, ces diagnostics territoriaux – Voir ASH n° 2805 du 12-04-13, p. 9.
(4) Ces plans d’action auront vocation à programmer, en fonction des besoins identifiés, l’adaptation quantitative et qualitative de l’offre de logement et d’hébergement – Voir ASH n° 2818 du 12-07-13, page 48.