Un Etat membre qui ne peut transférer un demandeur d’asile vers l’Etat membre compétent pour instruire sa demande au motif que ce dernier ne respecte pas les droits humains fondamentaux a la possibilité (mais pas l’obligation) d’examiner lui-même cette demande. S’il ne le souhaite pas, il est tenu d’identifier un autre Etat membre responsable de l’examen de la demande en fonction des critères fixés par le chapitre 3 du règlement « Dublin II » du 18 février 2003 (1). Tel est le sens d’un arrêt rendu le 14 novembre par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).
L’affaire concerne un Iranien arrivé clandestinement en Allemagne en transitant par la Grèce. Sa demande d’asile a été déclarée irrecevable par les autorités allemandes au motif que, en vertu du règlement « Dublin II », la Grèce était l’Etat membre compétent pour examiner cette demande. L’intéressé a donc été transféré vers la Grèce. Mais il a saisi le tribunal administratif d’un recours en annulation de la décision de rejet de sa demande. Le tribunal lui a donné raison, considérant que l’examen de sa demande d’asile devait être effectué par l’Allemagne « au regard des conditions d’accueil des demandeurs d’asile et de traitement des demandes d’asile en Grèce ». In fine, il a obtenu le statut de réfugié de la part des autorités allemandes. Toutefois, la cour administrative, saisie d’un appel à l’encontre de la décision du tribunal administratif, a souhaité interroger la CJUE afin de savoir si un demandeur d’asile peut exiger d’un Etat membre qu’il examine sa demande s’il ne peut le transférer vers l’Etat membre en principe responsable de cet examen en application des critères fixés par le règlement « Dublin II ».
Dans son arrêt, la Cour de justice de l’Union européenne confirme qu’un Etat membre ne peut transférer un demandeur d’asile vers l’Etat membre désigné comme responsable de la demande d’asile si celui-ci présente des « défaillances systémiques de la procédure d’asile et des conditions d’accueil des demandeurs d’asile » pouvant entraîner « des traitements inhumains ou dégradants » au sens de l’article 4 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Puis elle affirme que si ces défaillances sont avérées – ce qu’elle ne semble pas remettre en cause s’agissant de la Grèce –, l’Etat membre auprès duquel l’étranger a déposé sa demande d’asile – en l’espèce l’Allemagne – peut décider d’examiner lui-même cette demande. S’il ne le souhaite pas, il doit alors identifier un autre Etat membre responsable de l’examen de la demande d’asile en poursuivant, dans l’ordre, l’examen des critères énoncés dans le chapitre 3 du règlement « Dublin II ». S’il n’y parvient pas, le premier Etat membre auprès duquel la demande a été présentée doit alors être considéré comme responsable de l’examen de la demande.
(1) Il s’agit du règlement (CE) n° 343/2003 du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande d’asile présentée dans l’un des Etats membres par un ressortissant d’un pays tiers.