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Rapport « Pêcheur » : des pistes pour « un cadre salarial motivant » et des « parcours professionnels de qualité »

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Le conseiller d’Etat Bernard Pêcheur a remis le 4 novembre à Jean-Marc Ayrault et Marylise Lebranchu un rapport sur l’évolution à venir de la fonction publique (1). Une mine d’idées, plus ou moins innovantes, pour « donner du sens à l’action publique, assurer la confiance des citoyens dans les agents publics, améliorer la gouvernance de la fonction publique, poursuivre la rénovation du cadre commun de gestion des trois versants de la fonction publique [Etat, territoriale et hospitalière], développer les responsabilités et mieux gérer les ressources humaines, définir un cadre salarial plus motivant dans la durée et assurer des parcours professionnels de qualité ». Le Premier ministre a d’ores et déjà demandé à la ministre de la Fonction publique de lui proposer, sur la base des préconisations formulées dans ce rapport, ses « premières orientations [pour rénover la fonction publique] avant la fin de l’année 2013 ». Le document servira notamment de base aux discussions qui s’engageront le 5 décembre prochain entre le gouvernement et les organisations syndicales sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations, avant le début des négociations officielles en mai 2014 (2). Présentation des principales préconisations en matière de rémunérations, de carrières et de classifications.

Rémunérations : « des mesures générales sont nécessaires »

Côté rémunérations, pas de grand chambardement. « Les études de l’OCDE montrent que les fonctionnaires français ont une rémunération qui se situe dans la moyenne des Etats européens » et les niveaux de revenus perçus dans les trois fonctions publiques sont globalement similaires à ceux observés dans le secteur privé (3), constate le conseiller d’Etat, qui reconnaît toutefois que « les évolutions salariales résultent principalement de mesures catégorielles, essentiellement indemnitaires, ainsi que de l’avancement des agents ». En termes de distribution, il constate « à la fois un tassement général de la grille et une érosion de la hiérarchie des salaires, résultant du relèvement du seul pied de la grille, pour suivre les revalorisations du SMIC, alors que les indices correspondant aux échelons et grades plus élevés [ne sont] pas revalorisés ». En outre, « la part des primes dans la rémunération globale des fonctionnaires est devenue trop élevée », poursuit-il : plus de 28 % en moyenne dans la fonction publique de l’Etat (+ 11 points depuis 2000), 18 % dans la fonction publique territoriale (+ 4 points sur la même période), 24 % dans la fonction publique hospitalière (stable).

Pour le conseiller d’Etat, « des mesures générales sont donc nécessaires ». En matière salariale, il préconise notamment de « recourir aux différents leviers d’une politique salariale dynamique et responsable : rémunération indemnitaire, mesures catégorielles de grille, mais aussi mesures générales ». Il s’agit également, selon lui, de « conserver aux divers employeurs publics une marge de négociation salariale propre » ou encore de « rechercher la conclusion avec les organisations syndicales d’un “contrat social triennal” [qui] porterait sur les grandes orientations salariales et les autres chantiers transversaux à incidence budgétaire (ajustements de grille, réformes indemnitaires ayant une dimension transversale, action sociale…) ».

Par ailleurs, Bernard Pêcheur estime que, en cas de rénovation de la grille indiciaire, celle-ci devra obligatoirement se traduire par la transformation d’une partie des rémunérations indemnitaires en rémunérations indiciaires. « A se multiplier, les indemnités perdent de leur sens, certaines deviennent en réalité des substituts de rémunération indiciaire, et les dispositifs se chevauchent. » Il propose donc de dresser, d’ici à la fin 2014, un audit complet des dispositifs indemnitaires et d’engager, sur la base de ce travail, un chantier de simplification et d’harmonisation indemnitaire (4).

Quant à la politique d’alignement systématique du minimum de traitement indiciaire sur le SMIC au moyen d’un relèvement continu du bas de la grille au détriment de l’augmentation de la valeur du point d’indice, elle « conduira, d’ici 2017, à aligner le bas de la grille de la catégorie A sur le SMIC ». Le rapport propose donc, « lorsque le contexte budgétaire ne permet pas que des mesures générales suffisent à assurer une progression suffisante des traitements les plus bas, [de] laisser jouer le mécanisme d’indemnité différentielle […] plutôt que de relever le bas de la grille pour aligner le minimum de traitement indiciaire sur le SMIC ». En outre, afin de ne pas privilégier les agents du secteur public, il préconise d’inclure dans l’assiette de comparaison entre la rémunération de l’agent public et le SMIC, outre le traitement indiciaire, les indemnités correspondant à un travail effectif.

Repenser les structures des carrières et des classifications

Si, côté rémunérations, certaines préconisations du rapport font l’effet de mesurettes, le conseiller d’Etat est plus innovant sur la question des carrières et des classifications des agents. Dans la perspective d’une rénovation de la grille indiciaire, il propose par exemple de :

→ « caractériser chaque corps ou cadre d’emplois par un “niveau de fonctions” qui correspondrait soit au diplôme détenu [pour les corps dans lesquels cet élément est incontournable], soit à la nature des missions et des responsabilités exercées ». Oubliées donc les catégories A, B et C, qu’il propose de remplacer par cinq niveaux de fonction, plus un sixième, au sommet, qui correspondrait aux emplois de très haut niveau de responsabilités et auquel aucun corps ou cadre d’emplois ne serait spécifiquement attaché ;

→ « mettre en place pour chaque corps ou cadre d’emplois deux paliers de recrutement, le premier à destination des personnes sans expérience professionnelle, le second à destination des personnes ayant acquis une expérience professionnelle dans la fonction publique ou dans le secteur privé ». Dans ce schéma, indique le rapport, les recrutements des personnes sans expérience professionnelle s’effectueraient « en pied de corps » par la voie du concours externe. Ces agents accéderaient ainsi au premier grade du corps ou du cadre d’emplois. Le recrutement des personnes détenant déjà une expérience professionnelle serait organisé, selon le corps, par voie de concours interne (pouvant comporter des épreuves de reconnaissance des acquis de l’expérience professionnelle), de « troisième concours » ou de nominations au tour extérieur. Les agents ainsi recrutés accéderaient directement au deuxième grade des corps organisés en trois grades, et au second et dernier grade des corps n’en comportant que deux ;

→ « développer les échelons fonctionnels et les échelons spéciaux » et « donner davantage de sens aux avancements d’échelons ».

Dans tous les cas, note le rapport, « l’éventail de la grille indiciaire est trop resserré ». L’allongement de la vie professionnelle rend inévitable l’allongement de la durée de carrière. La prochaine rénovation de la grille devra donc permettre « de recréer des espaces indiciaires suffisants, autrement dit des écarts accrus entre le début et la fin de carrière des agents ».

FONCTION PUBLIQUE : CAP SUR LA MOBILITÉ

Sept fonctionnaires sur dix auraient déjà vécu au moins une situation de mobilité, quelle soit fonctionnelle (type de poste), géographique ou structurelle (employeur), et près de quatre fonctionnaires sur cinq souhaiteraient évoluer professionnellement au sein des fonctions publiques. Fort de ce constat, un rapport des inspections générales des finances, de l’administration et des affaires sociales préconise toute une série de mesures pour développer et encourager, à l’avenir, cette mobilité (5). Au menu, notamment, la création d’un portail commun aux trois fonctions publiques de bourses de l’emploi. Une proposition que reprend à son compte le rapport « Pêcheur » en proposant de créer un portail Internet unique intégrant ou fédérant les portails des bourses existantes et les complétant pour permettre d’avoir connaissance de tous les emplois publics vacants à chaque instant. Pour faciliter la mobilité, le rapport du conseiller d’Etat va même encore plus loin. Il propose, par exemple, de créer un répertoire commun des emplois qui harmoniserait les répertoires d’emplois existants dans les différentes fonctions publiques pour faciliter la mobilité structurelle des agents. Autre piste, la création d’un cadre professionnel commun à certains corps et cadres d’emploi très proches, voire commun aux trois fonctions publiques. Les professions sociales et médico-sociales pourraient notamment être concernées. Dans cette optique, note le rapport, « les fonctionnaires appartenant à un cadre professionnel seraient recrutés par un concours unique ». « Le nombre de postes ouverts au concours serait égal à la somme des besoins de chaque fonction publique concernée par le cadre professionnel » et « les formations seraient communes ou comporteraient des cycles communs ». Les fonctionnaires recrutés dans un cadre professionnel trans-fonctions publiques choisiraient ensuite, par ordre de mérite, la fonction publique dans laquelle ils souhaitent débuter leur carrière et s’engageraient à rester dans leur premier poste durant trois ans.

Notes

(1) Rapport de Bernard Pêcheur sur la fonction publique – Octobre 2013 – Disp. sur www.fonction-publique.gouv.fr.

(2) Voir ASH n° 2827 du 4-10-13, p. 14.

(3) Avec quelques nuances toutefois puisque le rapport constate que, « pour l’ensemble des trois fonctions publiques, les employés et les ouvriers sont en moyenne mieux rémunérés que leurs homologues du privé, tandis que les professions intermédiaires bénéficient de rémunérations globalement comparables dans la fonction publique ou le privé. En ce qui concerne les cadres, en revanche, les fonctionnaires sont moins bien rémunérés que leurs homologues du privé. »

(4) La fonction publique compte, à l’heure actuelle, pas moins de 1 700 régimes indemnitaires, note le rapport.

(5) Affectation et mobilité des fonctionnaires sur le territoire – Septembre 2013 – Disponible sur www.interieur.gouv.fr.

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