Des établissements dans l’obligation de changer, tel est le portrait des instituts médico-éducatifs (IME) que dresse le Creahi (centre régional d’études et d’actions sur les handicaps et les inadaptations) Aquitaine dans une étude compilant données nationales et tendance régionale (1). En l’espace d’une dizaine d’années, les 1 200 IME ont vu leur public se métamorphoser. Les 16 ans et plus sont passés de 38 % en 2001 à 43 % en 2010, sous l’effet conjugué d’entrées de plus en plus tardives en institution et du manque de perspectives de sortie. Alors que ces établissements étaient conçus à l’origine pour accompagner les déficiences et les retards intellectuels, la part des enfants autistes ou apparentés a plus que triplé, passant de 5 % à 16 %, celle des jeunes souffrant de psychose infantile avoisine les 12 %… pour seulement 7 % de places adaptées. Dans le même temps, les IME ont dû absorber une population grandissante d’enfants et d’adolescents présentant des troubles graves de la personnalité et du comportement. Environ 60 % des jeunes cumulent deux déficiences associées, physique, intellectuelle ou psychiatrique.
Les conditions de scolarisation sont tout aussi problématiques. « Pour 15 % des jeunes concernés par l’obligation scolaire, aucune forme de scolarisation n’a pu être mise en place », relève le Creahi. Un sur dix seulement bénéficie d’une scolarisation dans le milieu ordinaire à travers les différents dispositifs mis en place par l’Education nationale. L’écrasante majorité des autres continue d’être accueillie dans les établissements, au grand dam des directions qui constatent l’insuffisance du nombre d’enseignants et leur manque de préparation à l’évolution des handicaps et des pathologies de leur public. Le Creahi évoque, enfin, « les rigidités de l’Education nationale » pour adapter le temps de scolarisation à la situation des élèves d’IME, ce qui achève de freiner leur inclusion dans le milieu ordinaire.
Si une majorité des établissements indique avoir musclé l’offre de préparation à la vie professionnelle (ateliers, formations qualifiantes, stages en milieu ordinaire) pour répondre à l’évolution du public, « les difficultés rencontrées pour trouver une orientation adaptée aux besoins de ces jeunes vont en se renforçant ». Les sorties d’établissement sont de plus en plus tardives : 40 % ont lieu après 20 ans, contre 34 % en 2001. Plus du quart des jeunes quittent leur institut pour intégrer un autre IME, 24 % sont dirigés vers un ESAT (établissement et service d’aide par le travail), 15 % vers une autre structure médico-sociale de type foyer occupationnel, 9 % sont en insertion professionnelle et seulement 7 % en milieu scolaire. Enfin, « 10 % se retrouvent chez eux, sans prise en charge et en attente d’un autre placement ».
Dans ce contexte, les directions d’établissement souhaitent s’ouvrir à de nouvelles compétences professionnelles. « Les postes à renforcer ou à créer visent en priorité la prise en compte de l’autisme et des troubles du comportement, ainsi que l’accompagnement des plus grands vers l’extérieur (autonomie, insertion socioprofessionnelle, vie dans la cité, sexualité…). » Un établissement sur quatre souhaiterait créer une section pour autiste. Autre attente : la mise en place de « référents » chargés d’animer le réseau des partenaires du territoire. Signe que « la coordination est devenue le maître-mot du travail au quotidien ».
(1) Publiée prochainement dans Les Cahiers de l’Actif n° 444/445 – Mai-juin 2013 – 17 €.