Il n’y a pas de profil type puisque cela va du chômeur à la personne en CDI – mais tous ces emprunteurs ont en commun de ne pas avoir accès au crédit bancaire classique. Les banques estiment qu’ils sont trop « risqués », parce que leurs revenus sont trop faibles ou fluctuants, ou parce qu’ils sont interdits bancaires ou en surendettement. Mais ce sont des personnes solvables puisqu’elles doivent pouvoir rembourser leur prêt. Les sommes empruntées sont plafonnées à 3 000 €, remboursables sur trois ans (5 000 € sur cinq ans pour l’achat d’un véhicule). Le microcrédit finance avant tout des projets liés à la préservation de l’emploi ou au retour vers l’emploi. Cela dit, des emprunteurs l’utilisent également pour des cautions pour un logement ou des frais de santé. En moyenne, 12 000 microcrédits sont attribués chaque année. Ces chiffres doivent être augmentés car ils sont en deçà des besoins.
C’est un prêt avec un taux d’intérêt compris entre 2 et 12 % et il est accordé par des banques. A la différence d’une aide sociale, octroyée selon des critères d’accès précis, le microcrédit est attribué par les prêteurs et les accompagnateurs après un diagnostic très personnalisé de la demande afin d’évaluer le risque. Résultat : pour 16 prises de contact, sept postulants seulement voient leur projet éligible, quatre viennent au rendez-vous, deux dossiers sont instruits et un seul est présenté en comité de décision. Le filtrage est important !
Comme l’aide sociale, le microcrédit entraîne un accompagnement social car les bénéficiaires sont confrontés à des situations délicates. D’ailleurs, si 94 % des prêts sont remboursés, 45 % des emprunteurs connaissent au moins un impayé au cours du prêt.
Les accompagnateurs – principalement des travailleurs sociaux des CCAS ou des UDAF, des membres d’associations comme le Secours catholique, des employés d’organismes de microfinance (ADIE et Crea-Sol) ou des personnels dédiés des banques – doivent être disponibles si la personne rencontre des problèmes.
Pour 80 % d’entre eux, il a permis d’« améliorer » ou de « préserver » leur situation. C’est très positif quand on voit les faibles montants en jeu ! Au-delà d’une réponse pécuniaire, le microcrédit améliore l’estime de soi d’un grand nombre de bénéficiaires. En effet, ces personnes, de par leur histoire, ont eu des relations avec les institutions et les banques marquées par le mépris. Dans le cadre du microcrédit personnel, elles sont considérées comme des gens à qui l’on peut faire confiance. Au cours de l’étude, elles nous ont dit « j’ai été écouté, on a pris en compte mon projet ». Elles ont retrouvé de la dignité. Mais le microcrédit a aussi un impact sur les accompagnateurs, dont le regard sur les publics précaires change. Ils réalisent qu’ils ont des capacités à condition de leur donner la possibilité de les exprimer. Leurs pratiques ont pu évoluer : le diagnostic, qui permet d’explorer la situation budgétaire des demandeurs dans le détail, permet souvent de détecter d’autres difficultés auxquelles des solutions peuvent être apportées.
Le microcrédit devrait pouvoir financer des dettes. Pour le moment, c’est impossible alors que de très nombreuses personnes expriment ce besoin !
L’accompagnement est mis en œuvre de façon hétérogène. Or toutes les personnes, que leur crédit soit de 200 ou de 5 000 €, ont besoin d’avoir un contact régulier avec leur accompagnateur pendant la durée du prêt. Enfin, il faut mettre en œuvre des outils de gestion des impayés qui privilégient le bien-être de l’emprunteur à la récupération de l’argent.
(1) Voir ASH n° 2402 du 8-04-05, p. 5 – La synthèse de l’étude est à retrouver dans l’ouvrage Microcrédit contre pauvreté, des prêts entre solidarité et marché de Georges Gloukoviezoff et Nicolas Rebière – Ed. de l’Atelier, 2013 – Voir aussi l’interview « Le microcrédit, encore trop méconnu » dans les ASH n° 2598 du 27-02-09, p. 24.