Deux jours avant que le feuilleton judiciaire de la crèche Baby-loup ne connaisse un nouvel épisode devant la Cour d’appel de Paris (1), l’Observatoire de la laïcité a émis, le 15 octobre, un avis sur la définition et l’encadrement du fait religieux dans les structures assurant une mission d’accueil des enfants (2). C’était, on s’en souvient, une commande du président de la République pour répondre à l’émoi suscité par cette affaire « Baby-loup » et en particulier à l’épisode de mars dernier, au cours duquel la Cour de cassation a jugé qu’une crèche, même assurant une mission d’intérêt général, ne pouvait imposer un devoir de neutralité aux salariés.
Dans cet avis – adopté par 17 voix pour, 3 contre et une abstention –, l’observatoire estime qu’il n’est pas nécessaire de légiférer sur la question de la neutralité des personnels qui travaillent dans le secteur de la petite enfance, rejoignant ainsi la position de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (3). Il recommande plutôt au gouvernement d’édicter une circulaire interministérielle « explicitant la jurisprudence de la Cour de cassation et rappelant clairement, à destination de tous les acteurs concernés, ce que le droit positif permet et ne permet pas selon la catégorie juridique à laquelle appartient le gestionnaire ». L’objectif, explique l’avis, est de donner les outils permettant aux crèches qui le souhaitent d’élaborer, pour des raisons qui leur sont propres, des règlements intérieurs limitant l’expression religieuse de leurs salariés, à la condition que ces restrictions soient justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché. Plusieurs critères sont admis par la jurisprudence pour restreindre l’expression religieuse et certaines tenues vestimentaires dans le monde du travail. L’interdiction ne doit toutefois pas être « générale et imprécise ». Une fois cette circulaire publiée, l’observatoire proposera de labelliser des guides pratiques rappelant les réponses aux cas concrets relevant du fait religieux dans le monde du travail, indique encore l’avis.
L’instance présidée par Jean-Louis Bianco recommande plus globalement au gouvernement de rediffuser la « charte de la laïcité dans les services publics » publiés en 2007. Elle envisage également l’hypothèse dans laquelle, à l’avenir, l’option législative serait finalement retenue. Le cas échéant, l’observatoire conseille de ne pas utiliser la loi « pour répondre à un seul cas particulier » et de s’assurer au préalable d’une concertation entre groupes parlementaires « afin de permettre un débat serein évitant toute instrumentalisation partisane ».
(1) La juridiction devait rejuger le 17 octobre le licenciement d’une employée voilée au travail après son annulation par la Cour de cassation le 19 mars dernier – Voir ASH n° 2802 du 22-03-13, p. 36 et n° 2803 du 29-03-13, p. 11.
(2) Avis disponible sur
(3) Voir ASH n° 2827 du 4-10-13, p. 16.