Au 1er septembre 2013, près de 5 % des saisines du défenseur des droits émanaient des détenus et, chaque année, près de 5 % des personnes qui entrent en détention le saisissent. C’est ce qui ressort d’un rapport que Dominique Baudis a rendu public le 11 octobre (1), dans lequel il dresse le bilan de son action menée auprès des personnes incarcérées et formule quelques recommandations pour améliorer la visibilité de son institution et les conditions de vie des détenus, en particulier en matière de maintien de droits familiaux.
Les délégués du défenseur des droits installés dans les établissements pénitentiaires reçoivent de plus en plus de saisines des détenus relatives aux relations avec les services publics : 1 000 en 2007, 3 500 en 2009 et un peu plus de 4 000 en 2010. De façon stable, 42 % d’entre elles sont des demandes d’information et 58 % des demandes d’intervention (2). Mais, au cours des derniers mois, le nombre de demandes reçues par les délégués en matière d’accès au service public et d’accès aux droits a fléchi, relève Dominique Baudis. Ce qui, selon lui, « traduit très certainement une perte d’identification de l’institution par le personnel pénitentiaire, les partenaires et les personnes détenues ». Aussi demande-t-il aux pouvoirs publics de rédiger une circulaire précisant les missions et les modalités d’intervention des délégués du défenseur des droits, notamment dans les établissements pénitentiaires, ce qui permettrait d’améliorer la connaissance du service offert par l’institution. Pour lui, ce texte devra aussi inviter les chefs d’établissements pénitentiaires non seulement à veiller à ce que les détenus reçoivent dès leur incarcération une information complète sur l’institution et sur les modalités de sa saisine, mais aussi à organiser « périodiquement » des séances d’information en direction des personnels de la prison.
Selon Dominique Baudis, nombre d’interlocuteurs déplorent l’insuffisance de coordination entre les différents acteurs de l’accès au droit, à la fois au niveau local et interrégional. Si des réunions étaient auparavant organisées pour faire le bilan de l’activité des délégués et remédier aux difficultés de fonctionnement du dispositif, « cette pratique s’est perdue » « avec le temps et le changement institutionnel intervenu en 2011 » (3). C’est pourquoi le défenseur des droits préconise de « remettre en place ces réunions et qu’un correspondant en charge du suivi soit nommé dans chaque direction interrégionale des services pénitentiaires ». De leur côté, souligne le rapport, les délégués revendiquent la « nécessité de disposer d’une boîte aux lettres dédiée au recueil des saisines des personnes détenues », ainsi que d’un bureau adapté à la confidentialité des entretiens et d’un local situé dans le secteur administratif doté d’une ligne téléphonique et d’un accès à Internet.
En 2012, 14 % des saisines du défenseur des droits étaient liées aux difficultés des détenus à maintenir leurs liens familiaux. Aussi l’institution recommande-t-elle d’« amender l’article 717 du code de procédure pénale en intégrant une disposition visant à favoriser le rapprochement familial des détenus condamnés et prévoyant l’indemnisation des frais de déplacement et d’hébergement engendrés par les visites des familles ou des enfants ayant de faibles ressources à leur parent incarcéré dans les cas où la condition de rapprochement familial des détenus n’est pas respectée ». Elle suggère aussi d’« adopter les circulaires nécessaires pour prendre en compte l’intérêt supérieur de l’enfant lors de la visite de son parent détenu dans l’organisation des parloirs et la délivrance des permis de visite [4], notamment en intégrant des dispositions permettant d’adapter la durée et l’organisation des parloirs à la situation de l’enfant, en veillant à une meilleure adaptation des horaires des parloirs au rythme de la vie scolaire des enfants et aux périodes de vacances scolaires, [et] en permettant au parent détenu de prendre une douche le jour d’un parloir avec son enfant » (sur cette question, voir aussi page 12).
(1) L’action du défenseur des droits auprès des personnes détenues. Bilan 2000/2013 – Disp. sur
(2) En 2012, les réclamations adressées au siège de l’institution ont concerné à 30 % des manquements à la déontologie (changement du régime de détention, gestion du compte nominatif, problèmes liés aux transferts…) et à 24 % des litiges avec le service public pénitentiaire (suspension des droits de visite, organisation des parloirs, renouvellement du titre de séjour, difficultés d’accès aux médicaments, modalités et aménagements d’exécution de la peine).
(3) C’est cette année-là que les services du médiateur de la République, du défenseur des enfants, de la Commission nationale de déontologie de la sécurité et de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité ont fusionné au sein de l’institution incarnée par Dominique Baudis.
(4) Rappelons que la chancellerie a, en 2012, diffusé des instructions pour que les liens des détenus avec l’extérieur soient facilités – Voir ASH n° 2750 du 9-03-12, p. 9.