Saisi par une ressortissante roumaine qui estimait que le refus d’admission à l’aide médicale de l’Etat (AME) que lui avait opposé une caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) était fondé sur sa nationalité et revêtait ainsi un caractère discriminatoire, le défenseur des droits a profité de l’occasion pour revenir, dans une décision rendue le 14 juin dernier – mais rendue publique le 1er octobre –, sur les règles applicables en matière d’ouverture des droits à l’AME au bénéfice des ressortissants communautaires. Et demander à la caisse nationale de l’assurance maladie (CNAM) de procéder à une piqûre de rappel auprès des CPAM. En effet, l’attention de l’institution a été appelée à plusieurs reprises concernant « des divergences d’interprétation entre les caisses sur les conditions d’ouverture de l’AME ».
L’AME, rappelle le défenseur des droits, est une prestation d’aide sociale n’intervenant qu’à titre subsidiaire, réservée aux personnes exclues de l’assurance maladie en raison de l’irrégularité de leur séjour. Pour l’ouverture de leurs droits, les intéressés doivent apporter la preuve de leur identité, de leur résidence habituelle en France (condition de résidence préalable de trois mois) et de leurs ressources.
Si la condition liée à l’identité « ne pose en général pas de difficultés », le défenseur estime toutefois que la CNAM devrait rappeler aux caisses que, en vertu de plusieurs textes réglementaires :
→ la production d’une traduction de l’extrait d’acte de naissance n’est pas nécessaire s’il est possible de s’assurer directement, à partir du document rédigé en langue étrangère, des nom, prénoms, date et lieu de naissance de l’intéressé ;
→ lorsque l’intéressé est dépourvu de documents officiels attestant de son identité, tout document nominatif tel un permis de conduire ou une carte d’étudiant doit être reçu ainsi que, à défaut, l’attestation d’une association reconnue ou d’un professionnel de santé.
La condition d’antériorité de trois mois sur le territoire français est, pour sa part, « davantage sujette à des interprétations divergentes selon les caisses ». C’est pourquoi le défenseur des droits demande à la CNAM de veiller à porter à la connaissance des caisses primaires les règles en vigueur. Et de leur rappeler, en particulier, que dans l’hypothèse où la justification de cette condition ne peut se faire par la présentation d’un visa ou du tampon sur le passeport, elle peut être satisfaite par la production de différentes factures (hôtellerie, eau, électricité, gaz, téléphone au nom personnel ou au nom de l’hébergeur quand l’intéressé est hébergé à titre gratuit) ou d’autres pièces comme l’avis d’imposition ou l’attestation de domiciliation d’une association agréée. A défaut de l’une de ces pièces, souligne encore le défenseur, il est encore possible de communiquer « tout autre document de nature à prouver que cette condition est remplie ». Une circulaire du 27 septembre 2005 a énuméré à cet égard plusieurs pièces susceptibles d’être délivrées par des personnes ayant une mission de service public : documents émanant de ministères, d’établissements scolaires, d’organismes de sécurité sociale ou de Pôle emploi. Mais, pour le défenseur des droits, cette précision de la circulaire concernant les sources susceptibles de délivrer un document probant ne saurait limiter leur liste aux seules autorités publiques ou privées chargées d’une mission de service public. Le texte exclut en effet seulement des documents probants les déclarations sur l’honneur, qui ne sont pas « de nature à satisfaire les exigences posées » par le droit réglementaire. Or plusieurs cas de refus d’ouverture des droits à l’AME ont été signalés aux services de Dominique Baudis « concernant des pièces émanant certes de personnes privées – hors professionnels cités par la circulaire – mais non constitutives de déclarations sur l’honneur ». Le défenseur insiste donc sur le fait que toute pièce nominative et datée, telle la facture d’un achat ou une facture de téléphone portable, doit être reçue par les caisses primaires d’assurance maladie et permettre d’établir la résidence en France.