Un fauteuil dans la lumière

De 1961 à nos jours, L’histoire enchantée du petit juif à roulettes retrace les événements de la vie de Frédéric Zeitoun. Sans être une immense personnalité, il est de ceux que l’on aperçoit par-ci, par-là : chroniqueur dans l’émission Télématin ou sur la chaîne Télé Melody, comédien dans Plus belle la vie, parolier pour Enrico Macias ou Zaz. Il devrait marquer pour sa bonne humeur, son talent… On se souvient surtout de lui parce qu’il est en fauteuil. Frédéric Zeitoun traverse la vie sur des roulettes, et on lui a « souvent mis des bâtons dans les roues », chante-t-il dans la comédie musicale qu’il a écrite. Il y conte les épreuves et les victoires inhérentes à sa condition. Juif de Tunisie arrivé bébé à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), il a dû s’adapter à la société plus qu’elle ne s’est adaptée à lui. Dans le spectacle, avec deux acolytes qui chantent et jouent de l’accordéon à ses côtés, il raille le manque d’accessibilité des transports en commun parisiens – et notamment de la station Invalides, impraticable pour les personnes handicapées –, de la SNCF – qu’il surnomme « Société nationale chiante pour les fauteuils » –, des toilettes des restaurants ou même de l’immeuble de sa petite amie, qui vit au 6^e étage sans ascenseur ! Frédéric Zeitoun fait preuve de beaucoup d’ironie et n’hésite pas à tacler ses congénères : il va loin dans ses critiques du Téléthon – « Viens te faire voir pour que les gens donnent » – et du film Intouchables. Mais il parle aussi de ses amis qui le portaient d’un amphi à l’autre à la fac, des rencontres du show-biz qui lui ont ouvert des portes (Jacques Martin, William Leymergie…) et de ses jolies vacances en Espagne. L’ensemble est gai, rythmé grâce à la mise en scène d’Alain Sachs, et surtout empreint de nostalgie. Bègue, myope, immigré, handicapé, Frédéric rêvait de la lumière. C’est devenu une réalité puisqu’il se fait désormais applaudir sur la scène de la Gaîté-Montparnasse.