« Petite chose puante »

Il aura fallu à Laurence Noëlle – un pseudonyme – quatre ans d’écriture pour parvenir à ce récit de 200 pages. Quatre ans pour Renaître de ses hontes, au prix de rechutes d’alcoolisme, de violentes nausées et de sanglots interminables. Quatre ans pour oser raconter son chemin de croix, celui qu’elle a dû parcourir pour seulement apprendre à s’aimer. Difficile quand on a grandi avec la certitude d’être une « petite chose puante », reléguée par ses parents dans la salle de bains familiale, sans aucune manifestation d’attention ou ­d’affection, quand on est devenue un « déchet humain » à 17 ans, broyée par la prostitution, l’alcool, la drogue. « J’ai fait la morte lors de l’inceste, et j’ai continué dans la prostitution », résume Laurence Noëlle. Avec le recul que lui ont offert des années de psychothérapie et d’exercices spirituels, elle décrypte les mécanismes de la honte, de l’anéantissement, les scénarios d’échec maintes fois répétés, mais aussi le douloureux processus qui lui a permis de se pardonner, au point d’atteindre une authentique paix intérieure. Car son récit est surtout celui d’une incroyable résilience, réussie grâce à des rencontres déterminantes : le Mouvement du Nid, les Alcooliques anonymes, des moines bouddhistes, une sophrologue, des formateurs en développement personnel. « Cicatriser ses blessures ne veut pas dire les oublier ou les renier, c’est les pacifier pour qu’elles deviennent supportables et pouvoir vivre avec elles », conclut la quadragénaire. Aujourd’hui formatrice, elle propose des modules sur la prévention de la violence et intervient à la demande de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) ou des services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP).