Le développement de l’économie sociale et solidaire (ESS) ne doit pas se faire au détriment des principes fondateurs du secteur, tels la gouvernance démocratique, la lucrativité limitée et l’encadrement des rémunérations. Se fondant sur cet argument, trois organisations associatives – la FNARS (Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale), le Coorace et Emmaüs France – ont formulé six propositions d’amendement au projet de loi sur l’ESS, qui doit être discuté au Sénat les 6 et 7 novembre prochain.
Les organisations souhaitent d’abord une définition de la « gouvernance démocratique » plus stricte que celle prévue par le projet de loi : elles demandent que chaque associé de l’entreprise ait le même poids dans les prises de décision (une seule voix lors des votes), quel que soit son apport en capital ou le montant de sa contribution financière. Un système égalitaire qui représente, en outre, « une protection contre l’appropriation de l’activité et de ses fruits par un individu ». Deux autres propositions d’amendement visent à « intégrer l’égalité entre les hommes et les femmes dans le référentiel juridique du secteur ».
Elles veulent également rendre plus contraignantes les règles d’affectation du résultat de l’entreprise en rendant largement majoritaire la part du bénéfice qui ne peut être partagée entre les associés (90 % au minimum, contre 60 % dans le projet de loi). Elles proposent, par ailleurs, de mieux encadrer la limitation des écarts de rémunération – critère dont devront se prévaloir les entreprises prétendant à l’agrément « entreprise solidaire d’utilité sociale ». Selon le projet de loi, la moyenne des cinq rémunérations les plus élevées ne doit pas excéder un plafond fixé à sept fois la rémunération annuelle perçue par un salarié à temps complet sur la base du salaire minimum de croissance ou de branche. Or, dans les structures ayant un faible nombre de salariés, cette référence pourrait « cacher des disparités importantes entre le salaire du dirigeant et le salaire d’autres salariés au niveau de rémunération proche du SMIC, rentrant dans le calcul du fait de la taille réduite de la structure », font valoir les organisations. Elles préconisent donc de retenir la moyenne des trois rémunérations les plus élevées.
Elles souhaitent enfin que les parlementaires reviennent sur la disposition selon laquelle toutes les structures d’insertion par l’activité économique pourront obtenir de plein droit l’agrément « entreprise solidaire d’utilité sociale ». Elles craignent que cette mesure engendre « une instrumentalisation du conventionnement “insertion par l’activité économique” par des sociétés commerciales y voyant un moyen de contourner les conditions d’obtention de l’agrément ». L’Uniopss avait également rendu publique une contribution visant à clarifier l’identité de l’ESS dans le projet de loi, notamment en intégrant l’objectif d’utilité sociale dès le premier article, qui définit le périmètre du secteur (1).
(1) Voir ASH n° 2826 du 27-09-13, p. 22.