Attendue depuis un an, la tenue, le 25 septembre, du premier comité interministériel du handicap (CIH) depuis sa création en 2010 (1), laisse les acteurs du handicap sur leur faim. Certes, l’ensemble des associations salue l’ambition politique du gouvernement. Toutes prennent acte du lancement d’une « nouvelle dynamique pour le handicap » – selon les termes de la FISAF (Fédération nationale pour l’insertion des personnes sourdes et des personnes aveugles) –, qui « favorise une approche transversale », relève l’Uniopss (Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux). Reste que si le gouvernement veut promouvoir « un nouveau souffle pour la politique du handicap », « souffler n’est pas jouer ! », rétorque la FNATH (L’association des accidentés de la vie). Ce plan ne serait-il alors qu’une coquille vide ?
De fait, certaines mesures avaient déjà été annoncées, notamment la création du diplôme d’accompagnant de vie scolaire. Quant aux nouvelles dispositions, elles sont souvent renvoyées à des groupes de travail (scolarisation des jeunes sourds, évaluation des centres de formation des centres de rééducation professionnelle…) ou à des expérimentations qui ne seront lancées qu’en 2014 (renforcement de la coopération entre le milieu ordinaire et le secteur médico-social, évaluation de l’employabilité). Ce qui donne le sentiment d’« un catalogue incomplet de bonnes intentions », juge l’Anpihm (Association nationale pour l’intégration des personnes handicapées moteurs). Pour elle, ce plan laisse « un étrange goût de déjà-vu ». L’Uniopss s’étonne, de son côté, que les projets de loi sur la décentralisation, « dont on peut penser qu’ils auront un impact sur le champ du handicap », n’aient pas été abordés dans le cadre du CIH.
Plus ennuyeux, aucun chiffrage n’accompagne cette feuille de route « alors même que l’évolution de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie médico-social est annoncée à la baisse », relève la Fegapei (Fédération nationale des associations gestionnaires au service des personnes handicapées), espérant, non sans ironie, n’y voir qu’une « omission ». A l’heure où s’ouvrent les débats au Parlement en vue de l’adoption des projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2014, les associations sont en tout cas bien décidées à monter au créneau pour obtenir les financements nécessaires à ce programme. La FISAF réclame notamment que des moyens humains et financiers soient dévolus au secrétariat du CIH.
Plusieurs sujets, en outre, n’ont pas été abordés. Les mesures relatives à l’accès aux soins restent « en dessous des attentes suscitées par le rapport “Jacob” [2] », regrette la Fegapei, et « doivent aller plus loin », note la Fédération des APAJH (Association pour adultes et jeunes handicapés). Par exemple, le CIH ne dit rien de l’intégration d’un module dédié au handicap dans tous les cursus de formation des acteurs du soin, préconisé par ce rapport. Il n’apporte pas non plus de réponses à certaines demandes portées par plusieurs associations dont l’Unapei (Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis) : l’ouverture de l’accès à la couverture maladie universelle complémentaire aux bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés, le développement de l’hospitalisation à domicile ou l’organisation de l’échange de savoirs et de compétences entre les secteurs médico-social et sanitaire.
« L’accessibilité et l’adaptabilité de l’habitat sont les grands oubliés de la réflexion ministérielle », déplore par ailleurs l’Anpihm. L’association craint que la concertation qu’envisage le gouvernement en vue d’adapter les normes pour mieux prendre en compte tous les handicaps, l’évolution des techniques et les contraintes des opérateurs, se traduise par la remise en cause du principe d’accessibilité. Elle estime plus urgent de prendre certaines mesures « de bon sens » comme abaisser le seuil à partir duquel un ascenseur est obligatoire dans un immeuble neuf. L’accessibilité est pourtant « un sujet prioritaire » pour les Français, pointe l’Association des paralysés de France (APF), s’appuyant sur le sondage qu’elle a réalisé : 95 % d’entre eux pensent que chacun peut être confronté à des difficultés d’accessibilité et 75 % déclarent en avoir déjà rencontré.
Quant à la question des ressources, « aucun coup de pouce, si minime soit-il » n’a été annoncé, déplore encore l’Anpihm, « l’allocation aux adultes handicapés et les pensions d’invalidité restent toujours bien inférieures au seuil de pauvreté ». L’APF s’indigne, pour sa part, une nouvelle fois des restes à charge trop élevés « engendrés par une prestation de compensation du handicap mal adaptée ».
(1) Voir ASH n° 2826 du 27-09-13, p. 5.
(2) Voir ASH n° 2814 du 14-06-13, p. 5.