Une semaine après la fin de l’évacuation du plus gros campement de la métropole lilloise (1), Amnesty International dénonce une nouvelle fois les expulsions forcées dont sont victimes les Roms (2). Après l’Ile-de-France en 2012 (3), l’association s’est intéressée, en juin et juillet 2013, aux agglomérations de Lille et de Lyon, dans lesquelles vit près d’un quart de cette population. Se fondant sur leurs rencontres avec les Roms et leurs avocats, les associations qui les soutiennent, les maires et les préfectures, les auteurs du rapport (4) démontrent que, malgré la circulaire du 26 août 2012 censée encadrer les évacuations des campements informels (5), les démantèlements « continuent de se dérouler en violation des normes internationales ».
Parmi les points noirs, le manque d’information dont disposent les familles sur la procédure. Elles ne savent pas toujours qu’une décision d’expulsion a été prononcée et, lorsque c’est le cas, elles n’ont pas d’information sur la date prévue pour l’évacuation. Après l’expulsion, les propositions d’hébergement temporaire « varient grandement selon les régions ». A Lyon, aucune solution n’a été proposée lors des évacuations des derniers mois. A Lille, certaines familles ont pu être hébergées temporairement, mais rares sont les personnes qui ont intégré une structure où elles ont pu bénéficier d’un accompagnement social.
Les mesures figurant dans la circulaire restent peu ou pas appliquées par les préfets. A Lyon, aucun « diagnostic social global et individualisé » de la situation des occupants des campements informels n’a été effectué avant les évacuations et la préfecture n’a pas mis en place de comité de suivi censé réunir régulièrement associations et autorités locales. A Lille, ces diagnostics ont été réalisés dans des délais trop courts (seulement quelques jours alors qu’il faudrait six mois). Les projets d’insertion encouragés par le circulaire, lorsqu’ils sont élaborés, « ne constituent qu’un accueil temporaire pour un nombre limité de personnes sélectionnées ». Au final, le texte n’a pas amélioré les conditions de vie des Roms et le nombre des expulsions est en augmentation.
L’association exhorte donc le gouvernement à mettre en place des garanties effectives contre la pratique des expulsions forcées. Et propose plusieurs mesures. Il s’agit de s’assurer que personne ne sera sans abri à la suite d’une évacuation de campement informel et de proposer des solutions d’hébergement et de relogement convenables à tous les habitants plusieurs jours avant le début de l’opération. Amnesty International souhaite également que les évacuations soient interdites durant la trêve hivernale et, plus largement, que les personnes soient consultées et informées avant toute opération de démantèlement.
L’association demande enfin au gouvernement de garantir l’accès aux services essentiels de base pour les personnes habitant dans des campements informels (approvisionnement en eau, ramassage des ordures, installations sanitaires) et le respect des droits à l’éducation et à la santé.
(1) Au total près de 750 personnes ont été évacuées lors de trois opérations les 25 juillet, 6 septembre et 11 septembre.
(4) « Condamnées à l’errance » – Disponible sur